Calcutta

Les préjugés collent à l’image du centre de Calcutta. La troisième plus grande cité d’Inde effraye à l’avance par sa misère crasse. Et pourtant c’est oublier que la « Belle en Guenilles » fut la capitale du Raj britannique. Elle conserve d’ailleurs de magnifiques monuments de sa période de gloire.  Comme souvent, je vous propose plusieurs articles. Dans le premier, voici une visite du centre de Calcutta. il vaut mieux y venir entre octobre et mars pour des raisons climatiques.

Autour de l’Esplanade

Ce que l’on appelle le centre de Calcutta correspond au quartier historique de la capitale du Raj Britannique. Desservi par le métro, ce quartier regorge d’hôtels et de petits restaurants.

On y trouve de jolies adresses comme l’Oberoi, le Grand hôtel de l’époque britannique avec son piano bar, ses petits salons. Dans les rues avoisinantes, une foule de petites pensions bon marché accueillent des routards. Les touristes attirent une foule miséreuse autour de ces rues très commerçantes. Car on trouve de tout à New Market . Entre petits stands et jolies boutiques anciennes, ce quartier est le paradis des acheteurs. Pour une petite boisson, le joli hôtel Fairlawn vaut le détour. Il offre une vision désuète et pleine de charme du Calcutta colonial. Ses vieux sofas poussiéreux et ses photos de célébrités d’antan invitent à une halte dans le passé.

Outre les bâtiments gouvernementaux, l’on trouve deux des monuments les plus importants de la ville et de nombreux espaces verts.

Le Maidan, poumon vert de Calcutta

Le Maidan est un immense poumon vert au centre de Calcutta articulé autour de Fort William. La forteresse remonte à 1696, une cinquantaine d’‘années après Fort Saintt Georges, à Madras. Ces Forts marquent les lieux de naissance de ces villes anglaises. Celui au centre de Calcutta se trouve toujours entre les mains de l’armée et ne se visite pas. On trouve de nombreuses statues dans le parc ainsi que des jardins aménagés. Ainsi Eliott park a été financé par la famille Tata.

S’y succèdent également des bâtiments emblématiques du centre de Calcutta. On y voit le planétarium Birla, de style classique, financé par la famille du même nom . Non loin de là, se dresse le mémorial à la Reine Victoria. Puis, la cathédrale st Paul, bâtie sur le modèle de Westminster Abbaye. Son architecture est une réplique fidèle de la grande abbaye londonienne.

Le Victoria Memorial

C’est un superbe édifice de marbre blanc plus palladien que moghol. Sa construction remonte au début du XXème siècle. Elle visait à célébrer la grandeur de l’Empire dont le centre était Calcutta. Entouré de jolis jardins bien entretenus, sa forme rappelle celle d’un capitole américain. Les petits lanternons autour de la coupole ne sont pas sans rappeller l’eglise de la Salute à Venise. C’est aujourd’hui l’un des plus beaux musées du centre de Calcutta. Le rez-de-chaussée expose des peintures et statues des Anglais qui ont marqué le Raj. En revanhe, le premier étage a été aménagé en musée des « combattants de la liberté ». Dans une muséographie moderne, inédite en Inde, on y suit l’évolution des idées et des hommes qui menèrent vers l’indépendance.

Le musée indien de Calcutta

Ce musée est l’un de plus anciens d’Asie et remonte à 1814. Conçu à l’anglaise, mais dans une palais bengali, il est resté pratiquement en l’état depuis le départ des colons. La muséographie n’a visiblement pas été retouchée. Les chemins y sont compliqués, comme la belle salle des textiles, cachée derrière la collection de poissons et d’oiseaux. La poussière date visiblement de la même époque, en tous cas dans les salles d’histoire naturelle. Néanmoins, la richesse des collections fait de ce grand palais, articulé autour d’une cour, l’une des attractions majeures du centre de Calcutta. Parmi les merveilles, les vestiges de la cité bouddhique d’Amaravati complètent ceux exposés à Chennai. La galerie de peintures mogholes au premier étage jouit néanmoins d’un réaménagement et les œuvres valent d’y passer un moment.

Maison de Mère Teresa

La maison de la grande figure chrétienne est devenue le lieu le plus visité de Calcutta. C’est une maison grise, entretenue par les missionnaires de la charité. On y voit notamment la tombe de la Sainte, cannonisée en 2016.

Au nord de Calcutta, le Pont Howrah et la Gare

Cette fois il s’agit de partir vers le nord de Calcutta. On va y découvrir deux bâtiments emblématiques de la ville. Ils se situent de part et d’autre de la rivière Hoogli, un des bras du delta du Gange. Il s’agit du pont et de la gare.

Le pont d’acier suspendu ne date que de 1943, mais il apparait sur de nombreuses représentations de la ville. Il domine l’impressionnant marché aux fleurs. Tout autour, on croise une foule de petits commerces de rue ahurissants,tels des raseurs publics ou nettoyeurs d’oreille.

De l’autre côté du fleuve, la gare Howrah st l’une de plus anciennes d’Inde avec celle de Royapuram à Chennai. C’est surtout la plus grande et la plus fréquentée du pays. Sa belle architecture est emblématique du style indo-sarracénique.

Saint Thomas

Saint Thomas a marqué Chennai de sa présence. D’abord parce que l’apôtre qui doutait y est mort au 1er siècle de notre ère. Il s’y est arrêté. Il y a aussi vécu huit ans nous raconte la légende, prêché et y a subi le martyr.

St Thomas, epinture de Saint Homas au Mont

L’Apôtre est donc venu évangéliser, subir la torture et mourir en ces lieux, bientôt suivi de disciples du Christ. Ceux-ci ont d’ailleurs motivé la construction de l’une des trois seules basiliques bâties sur le tombeau d’un apôtre. Avec Saint Jacques de Compostelle et Rome, Madras s’enorgueillit ainsi d’une communauté chrétienne.

L’arrivée de Thomas à Madras

Il n’est pas si étrange que st Thomas ait accosté en ces terres lointaines. En effet, les Romains y avaient déjà fondé des comptoirs. En atteste le site d’Arikamedu, situé à quelques kilomètres au sud de Pondichéry.

Les bateaux des marchand romains amenaient également à leur bord des missionnaires. Ceux-ci venaient au nom de cette religion nouvelle qui depuis la terre sainte essaimait à Rome. Ces hommes de foi n’étaient pas forcément nombreux mais assez pour construire quelques églises dans le Kerala. L’un d’entre eux, Thomas s’aventura de toute évidence jusqu’à la côte de Coromandel. Il avait déja séjourné douze ans sur la côte de Malabar. Il dut gagner l’Est en traversant les Ghats ou en contournant l’extrémité sud du cap Comorin.

Saint Thomas à Chennai

Les implantations chrétiennes les plus anciennes se trouvent de fait au Kerala. D’ailleurs, l’archéologie atteste bien d’une présence précoce de chrétiens. Néanmoins c’est bien à Chennai que l’apôtre Thomas aurait décidé d’organiser une communauté.

Thomas, si l’histoire est vraie, a prêché sur la plage au milieu des pécheurs. Il se retirait sur les hauteurs tropicales alentours. Une charmante petite église rappelle son lieu de retraite, au sommet de la colline. Avec son autel carrelé d’azulejos elle a un petit air portugais. Les escaliers qui y mènent, l’architecture de type missionnaire, avec sa façade simple, ourlée et blanche rappellent également le Portugal. A l’intérieur, on peut s’interroger sur l’étrange écriture sur un certain nombre de pierres tombales. Elles proviennent des marchands arméniens . Ceux- ci y pratiquaient leur culte avant de construire leur ravissante église à George Town au début du XVIIIème siècle.

Sur les côtés de l’autel, un extraordinaire étalage de reliques souligne la sainteté du lieu. Cela va des rognures d’ongles, au morceaux de dents de diverses figures plus ou moins illustres de l’Eglise locale.

Little Mount, lieu du martyr de Saint Thomas

Sur le chemin de sa retraite, en haut du Mont Saint Thomas, une flèche aurait transpercé Saint Thomas, lancée par un hérétique un peu énervé par son prosélytisme. Un étonnant lieu, nommé “Little Mount”, le petit mont, rappelle l’évênement. Ici, deux jolies chapelles portugaises à l’architecture missionnare cotoient une grande église ronde comme un tipi. Sa clarté disille une foi étonnante. Sur le même site, un fléchage permet de suivre la cellule dans laquelle l’Apôtre aurait été enfermé. On voit également au sommet de la colline un rocher dans lequel est imprimée une empreinte de pied, une infractuosité, nommée source miraculeuse, ainsi qu’un rocher maculé de sang. Une reconstitution en cire très haute en couleurs retrace la mort de Saint Thomas. Le tout est abrité sous une construction curieuse et destinée à accueillir des foules de pélerins.

La Basilique Saint Thomas

Il y a pourtant des reliques de Saint Thomas, a priori tout au moins. Et elles se trouvent dans la Basilique à son nom. Celle-ci est construite tout près de la plage, là même où l’apôtre se serait rendu pour prêcher. Celle-ci fut construite à l’aplomb de la sépulture. On est ici dans le schéma de st Pierre de Rome . A savoir une basilique majeure construite sur la chapelle construite autour de la tombe de l’apôtre. Néanmoins, l’architecture y est moins glorieuse ou spectaculaire qu’à st Jacques de Compostelle ou à st Pierre de Rome. Il s’agit d’une église néogothique blanche dans le plus pur style colonial britannique. Cette structure à clocher ressemble un peu à une tarte meringuée dans le paysage de Chennai. Cependant, l’intérieur ne manque pas de charme avec son étonnant plafond vouté à croisée d’ogive en bois.

 La basilique recèle quelques morceaux de bravoure. Ainsi, la crypte propose une reconstitution édifiante en carton-pâte de la mise à mort de St Thomas. Juste au-dessus, un petit musée recèle des vestiges de l’ancienne église. Quelques images le disputent à de vieilles pierres dans un joyeux fatras dont l’Inde a le secret.

 Le long de l’édifice néogothique, une petite chapelle abrite une vierge en saree assez unique. On peut lui préférer l’ensemble de portraits des apôtres qui ornent les murs de la nef de l’église supérieure. Au lieu de tableaux pompiers ou de mauvaises reproductions d’œuvres sacrées anciennes, le diocèse a choisi des photographies. Il s’agit de portraits de jeunes hommes magnifiques en guise d’apôtres, en tous cas certains d’entre eux. Bien que depuis longtemps fanés, ces portraits conservent la beauté de stars de cinéma.

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Musée du Cinéma, Chennai

Voici un spécial Musée du Cinéma à Chennai. Les lecteurs les plus avertis l’auront certainement déjà subodoré. Le Monsieur Cinéma du Petit Journal dit aussi Greg le cinéphage, est ma meilleure moitié. Il a d’ailleurs opéré sa mue pour devenir M Bollywood sur ce site.

Pour changer des salles obscures, Monsieur Cinéma est parti en quête du musée chennaiote du 7e art. Il porte le nom de AVM Heritage Museum en hommage aux studios aujourd’hui fermés et disparus dans Chennai.

On peut accéder au musée depuis le Métro Vijaya. Celui-ci se trouve dans un centre commercial tout moderne et proche du temple du même nom, Arulmigu Vatapalani Murugan . De là, on rejoint Arcot Road pour rechercher les studios.

La vaine quête des studios

Le cinéma du sud étant très prolifique, Greg le cinéphage pensait trouver des grands espaces. Il s’attendait donc à trouver décors, starlettes au maquillage dégoulinant, caméras. Malheureusement, il a fait chou blanc. Il parait que les studios ont déménagé dans la campagne pour cause d’inflation immobilière au centre de Chennai.

En effet, au lieu de studios, seul le sigle AVM permettait d’imaginer que les lieux avaient pu importer pour le cinéma. Et de fait, ils avaient abrité l’âge d’or de la création cinématographique locale. Malheureusement, celle-ci a migré hors de la ville. De ce fait, les spéculateurs immobiliers se jettent avec gourmandise sur ces quartiers relativement centraux. Ceux-ci attendaient ces vastes terrains le couteau ou plutôt le carnet de chèque entre les dents. L’année dernière encore, quelques techniciens oubliés se consolaient dans les terrains vagues et les chantiers.

Car en cherchant un peu, il existe nombre de petits studios de doublage et d’effets spéciaux dans la ville. Pourtant l’idée de se rendre aux ex studios AVM  n’était pas si mauvaise. En effet, en avril 2023 un petit musée du cinéma a effectivement ouvert à Chennai.

Le Musée du Cinéma de Chennai

C’est bien dans le quartier historique de cette cité du cinéma disparue que le Musée du Cinéma s’est installé dans un studio rescapé. Le quartier se voit pour le reste envahi par des immeubles flambants neufs sur un boulevard un peu pourri.

Ne vous attendez pas à y trouver de grande reconstitution. Il manque un peu d’explications. Cependant, on y trouve les voitures conduites par les grands acteurs d’hier. Elles coexistent avec les bobines à l’origine de grands succès locaux.  Le propos ici est d’exposer les bobines et machineries utilisées pour tourner les films. C’est surtout l’occasion de montrer des dizaines de voitures utilisées par les grandes stars locales.

Alors si vous ne vous intéressez pas aux voitures anciennes ou aux films du Sud, passez votre chemin. Si, en revanche, l’évocation par de petits extraits de films locaux utilisant les voitures présentées vous tente. Si, les voitures elles-mêmes vous plaisent ,c’est l’occasion de passer un après-midi sympathique. Il est préférable de connaitre a minima quelques vedettes tamoul du grand écran. Vous vous formerez un peu aux noms et grands principes du cinéma local.

Mais une fois que vous aurez compris que Kollywood raffole des films de justiciers au grand cœur avec beaucoup d’action, des personnages joviaux et des stars indéboulonnables dans leur rôle de grand gentil, que les films sont ponctués de scènes dansées chantées peut être un tantinet plus folkloriques que dans la production du nord, vous aurez déjà une bonne idée de ce que vous allez voir.

reels at cinema Museum Chennai

 Laissez les grandes reconstitutions historiques et les films à très gros budget au Karnataka. Vous comprendrez ainsi mieux ce musée sympathique coloré mais pas immense. Des affiches concluent la visite de ce grand hangar converti en musée ou plutôt en hommage aux studios AVM.

Le train à Chennai

Le train est omniprésent à Chennai, terrestre ou souterrain. La ville abonde en effet en gares. Une quarantaine d’entre elles attestent du développement privé du chemin de fer d’origine.  Elles permettaient de relier la multitude de petites communes qui composent la ville d’aujourd’hui. Les premières lignes appartenaient en effet aux grandes familles et facilitaient leurs déplacements. Ainsi la Compagnie carnatique permettait au Nawab de se rendre de leur capitale Arcot à Royapuram. Je vous propose ici une double promenade pour découvrir le train à Chennai

Une ôde au train à Chennai, le musée du chemin de fer

Le bien amusant musée du chemin de fer. Ouvert en 2002 puis agrandi, il a pour but de valoriser le patrimoine et l’image du train en Inde. La billetterie se trouve dans un wagon. Elle donne accès au parc récréatif, aux collections et à un verre de thé. Il est particulièrement attractif pour les enfants avec ses locomotives anciennes. On peut y grimper et profiter des jeux répartis dans un grand parc. Et bien sûr on peut faire le tour du parc en petit train. On peut même déjeuner dans un wagon restaurant. Cinq galeries exposent des modèles, photographies, maquettes de trains ainsi que des œuvres d’art liées à la thématique.

Des cartels y font remonter la création du train à la Grèce. Cela me parait un peu osé, mais l’argument ne manque pas de sel. Le musée voit l’ancêtre du train dans les wagonnets traversant l’isthme de Corinthe, aujourd’hui percé par un canal, sur des rondins de bois. En place de locomotive des esclaves se chargeaient de haler les voitures. Ils évitaient ainsi le long contournement maritime du Péloponnèse.

Puis le musée évoque rapidement les locomotives tirées par des chevaux. Et il s’intéresse ensuite à la révolution industrielle et à James Watt et à l’invention de la machine à vapeur. Des explications alternent avec des reproductions et maquettes. Viennent alors les premières locomotives électriques. Suit une chronologie des chemins de fer. Elle commence en France avant de se diffuser à l’Angleterre et à l’Europe mais aussi aux colonies dont l’Inde.

Des trains de luxe

Un bâtiment du musée est consacré au métro . En revanche, une grande section présente une autre façon de profiter du train en Inde. Elle présente en effet les trains fastueux, recréant ceux des cours princières et restaurés pour des touristes avides d’expériences originales. Le « palace on wheels » réhabilité en 1982 recrée ainsi les splendeurs des maharajas. Et permet de découvrir le Rajahstan à des prix.. royaux.  Le « Golden Chariot », lui, parcourt le Karnataka et s’enorgueillit d’une décoration empruntée au site archéologique d’Hampi.

 Toujours dans le Nord et l’Est du pays, autour de Dehli ou Mumbai, le « Deccan Odyssey ». Lui aussi propose des voyages de luxe.

La majorité de ces palais roulant offrent malheureusement des expériences longues (8 jours) et onéreuses. Alors pourquoi ne pas vous contenter d’un voyage plus court et à Chennai même?

Une balade en train et des arrêts en gare

Pour retracer l’histoire du train à Chennai on peut effectivement faire le tour des gares. L’expérience prend tout son sel en chemin de fer. Bruyant et sale, il offre néanmoins un moyen amusant et original de découvrir la ville. On peut en profiter pour s’arrêter dans les stations les plus belles.

–   C’est à Royapuram que se trouve la plus ancienne gare d’Inde,

Edifiée en 1853, elle dispute son ancienneté avec la grande gare Howrah de Calcutta. Construite en lisière de l’implantation britannique, elle desservait l’ensemble des petites lignes d’alors. Bien que contemporaine lors de sa construction de Bori Bunder à Mumbai, seule Royapuram reste encore debout. En effet, la première gare de Mumbai a laissé place vingt ans plus tard au terminal Victoria, aujourd’hui Chhatrapati Shivaji Terminus.

Royapuram affecte un style classique avec son grand porche et ses colonnes de briques rouges. Avec l’édification de Central station en 1873, la circulation des trains se déplaça. La gare de Royapuram ne fut plus affectée qu’au déchargement des cargos. Très endommagée, il est question de lui redonner de sa splendeur passée. Mais rien n’est encore véritablement décidé à ce jour. Et il faut traverser un véritable no man’s land aujourd’hui pour découvrir ce joyau de temps révolu. Certes repeinte à l’extérieur, mais abandonnée.

– La Gare centrale de Chennai

Lors de son inauguration., Madras Central Railways Station s’affirma comme un équivalent des grandes gares londoniennes. Avec ses énormes halles bordés de kiosques et boutiques, ses grandes verrières abritant les quais, elle utilisait les matériaux modernes. Elle visait à concurrencer les plus belles constructions anglaises. Si elle est globalement de style néo roman, sa grande tour néogothique est néanmoins devenue emblématique de la ville. Influencée par les modèles britanniques, elle imprime une marque très anglaise à Chennai. Son horloge et son style victorien rappellent Saint Pancras . Elle marque la porte d’entrée dans les régions du Sud pour les voyageurs du Nord ou de l’est du pays.

–  La ravissante Egmore station date de 1907.

La gare d’Egmore avait pour vocation de décongestion Central station en desservant le sud du pays. Les nouveaux matériaux, fer forgé et verre,  et la claire distribution des espaces attestent de la volonté de modernité. En contraste, Sa façade indo-sarracénique donne une version locale amusante de l’art nouveau. Ses dômes reposent sur des colonnes ouvragées d’inspiration dravidienne. Ses motifs animaliers, dont un joli éléphant lui donnent du pittoresque. Son aspect extérieur éclectique ne fait pourtant pas l’unanimité chez les architectes.

Un autre Cochin

Cet autre Cochin s’adresse à tous ceux qui restent plus d’une demi-journée dans la ville et qui veulent explorer ses environs. En effet, Dans un premier article j’avais déjà évoqué les incontournables de la ville coloniale avec son Palais, sa promenade le long des carrelets chinois, le quartier juif.

lustre de la synagogue de Cochin

Il est temps maintenant de déborder du quartier historique et de s’intéresser à tout ce qui fait le charme de cette énorme métropole.

fresque Kochi es a feeling

Un autre Cochin, plus local à Ernakulam

Ernakulam correspond à la bande de terre continentale agglomérée aux vieux quartiers de fort Cochin, sis sur une presqu’ile lagunaire. Moins touristique, cette zone abrite les bâtiments administratifs, universités, centres commerciaux. C’est aussi un grand quartier marchand. On y trouve donc sans surprise de grands temples, comme celui de Shiva et des marchés bien fournis. Globalement, si l’on veut passer une journée à Ernakulam, voici des idées de balades :

-Le Musée du folklore

Musée du folklore

Il se situe au sud du quartier Thevara, à la pointe de la bande de terre que constitue Ernakulam. Bien que privé, ce musée du folklore offre une foultitude d’objets à découvrir, voire à acheter, on s’y perd un peu. C’est un peu chaotique mais tellement fourni, que l’on y trouve toujours son bonheur.

Le musée lui-même est une recréation architecturale à partir de maisons traditionnelles en bois. Sa structure avec ses toits quasi en pagode emblématiques du Kerala, et ses décorations, valent la visite. Des petits panneaux permettent de se repérer néanmoins

tablette de cuivre ancienne musée Folklore

-Les Marchés et temples de Ernakulam

rue déserte et illuminée bordée de magasins fermés

Ceux-ci nous rappellent que les locaux y vivent. Certainement plus populaire mais aussi plus authentique que Fort Cochin, Ernakulam abonde en marchés et magasins très bien achalandés. La végétation luxuriante du Kerala permet en effet de se régaler de fruits et légumes en avance par rapport au tamil Nadu. Le temple de Shiva non loin de l’embarcadère impressionne pour la ferveur de ses fidèles. Tout autour, se pressent de petits restaurants végétariens. Entre le débarcadère et le métro, Market road la bien nommée regroupe une grande partie des petits commerces. Les ruelles adjacentes donnent des airs de souk à ce quartier extrêmement animé.

-La Promenade

Le long de la lagune, elle s’étend entre le débarcadère de ferries pour Fort Cochin et le quartier commerçant de Market Road. Les jardins joliment dessinés donnent des allures européennes à ce long ruban vert très apprécié par les locaux en soirée et le week end. De là, on peut se diriger vers le ferry qui dessert Fort Cochin. On peut également se rendre vers le métro et au-delà vers la ville moderne. Sans charme, cette partie de Ernakulam fait penser aux villes d’extrême orient par son animation, ses grands et petits commerces, et même, chose rare dans le sud, ses gigantesques grands magasins.

apercu de la lagune depuis le pont

Enfin, surtout, c’est depuis Ernakulam que l’on accède à la zone des plages. Attention néanmoins à la foule des fins de semaine et à l’extrême chaleur. La longue bande de terre qui fait face à la mer accueille d’immenses plages dont certaines sont considérées comme parmi les plus belles du pays. Parmi celles-ci, Cherai Beach. Il existe encore une foultitude de musées et galeries selon les gouts de chacun.

Un autre Cochin au sud du Fort

Hors des sentiers battus de Fort Cochin, la zone prisée des touristes il reste à découvrir des lieux fascinants. Au sud, s’étend le labyrinthique quartier chrétien. Le long de la plage, au musée d’archéologie on découvrira des témoignages de Muziris, de fondation romaine.

-Le quartier chrétien, un autre Cochin

poster de Jesus sur les murs de Cochin

Au sud de Fort Cochin, commence le quartier chrétien. Alors qu’Ernakulam et le quartier juif sont maintenant musulmans en grande partie, le sud de Fort Cochin abonde en églises. De véritables petits labyrinthes impénétrables en voiture s’enroulent sur eux-mêmes à proximité des églises dans les quartiers de Bethleem et Nazareth. C’est dans ces quartiers bien nommés que l’on découvre la laverie municipale. Dans des sortes de box les hommes  et femmes s’activent qui à laver qui à repasser dans des éclats de couleurs. Dhobi Kana public Laundry

étendage de linge

-Le musée du Patrimoine, Ernakulam District Heritage Museum

Sur la plage, juste derrière les marchands, un beau bâtiment ancien abrite le musée archéologique. C’est un des des bastions survivants du fort Portugais. Les étiquettes se mélangent régulièrement les pinceaux et les gardiens racontent un peu n’importe quoi. Pour autant on découvre des amphores vernissées attestant d’échanges commerciaux avec le monde arabe. Mais aussi des écrits évoquant la présence des romains à Muzuris, comptoir de fondation romaine. Malheureusement, les constructions, la surpopulation et les tempêtes ont changé la cote. Et il ‘s’avère aujourd’hui impossible de retrouver le moindre vestige de l’antiquité, qu’il s’agisse du temple d’Auguste ou autre. En revanche, une copie de la fameuse table de Peutinger, sorte de viatique du XIIIe reposant sur la cartographie du bas empire romain rappelle l’existence de ce comptoir dans les périodes les plus anciennes. Il vaut mieux ne pas trop écouter la pauvre demoiselle en charge de la salle et se hâter pour découvrir l’histoire des découvertes de ce joli petit musée provincial.

table de peutinge

-Des transports variés et en voie de modernisation

L’idée dans cet article est de découvrir un autre Cochin. Alors vous pouvez remiser votre application uber (qui fonctionne très bien ici et notamment pour les autos) et opter pour d’autres transports plus locaux. L’idée dans la capitale économique du riche et communiste Kerala est de re relier tous les transports de la ville.

fresque des 4 grands personnages du communisme au Kerala

le bus,

Ouvert aux quatre vents, le bus donne une idée d’un autre Cochin. Il est en effet très simple d’utilisation surtout sur la presqu’ile de Fort Cochin avec des trajets quasi rectilignes. Vous montez dans le bu indiquez votre arrêt et payez en conséquence. Il vaut mieux vous munir de petite monnaie

le ferry,

Si vous aimez la foule, la transpiration et la bousculade, c’est idéal. Pour un tarif modique vous aurez le droit de vous serrer avec vos commensaux dans la queue pour acheter vos billets puis de vous faire compresser pour monter dans le ferry. Une fois à bord, si vous avez eu la chance de monter portés par des foules de bras et d’aisselles se dirigeant dans le même sens, vous pourrez peut-être vous assoir, ou non. Les horaires sont indicatifs. Dès que le ferry est plein, il part. Les « bus d’eau » ont adopté une mascotte appelée Jengu.

-Le métro aérien, accès à un autre Cochin

Le métro est une splendeur à Cochin. Neuf, moderne il est loin d’être terminé. Ce réseau exceptionnel ne comprend pour l’instant qu’une grande ligne desservant Ernakulam.

Initié en 2013, ce métro est encore largement en construction. Néanmoins la (longue) portion terminée dessert déjà les zones essentielles de marchés, administrations, universités, lycées, gare et Centre commerciaux.

Milu mascotte du metro de Cochin

La ligne en activité permettra un jour de relier l’aéroport, mais l’ile de Fort Cochin et les plages ne font pas partie du projet pour des raisons assez évidente d’environnement et de population concernée. Car le but est de s’adresser aux familles et aux jeunes locaux. D’où une communication et des publicités ciblées pour ce métro ultra moderne dont la mascotte est un adorable petit éléphant bleu ailé qui nous rappelle que la modernité n’enlève rien aux traditions charmantes du Kerala et de Ganesh. Milu, c’est son nom, s’inspire de son grand frère Serge le lapin qui a bercé nos enfances parisiennes avec ses injonctions à ne pas mettre ses doigts n’importe ou sous peine de se pincer les doigts très fort.

 Alors embarquez en compagnie de Milu et Jengu et suivez leurs aventures à chaque arrêt !

Mysore, la ville des Palais

Mysore, ville des palais, allie le charme des villes du sud de l’Inde et l’histoire et le raffinement des villes du Nord marquées par la période Moghole. Elle mérite de s’y arrêter pour profiter de la cité elle-même mais aussi de ses environs. Du coup, je vous propose un premier article sur la ville et un second sur ses environs.

Le Palais de Mysore

Splendeur du Palais de Mysore

L’un des charmes de Mysore réside en effet dans ses palais. L’histoire des maharadjas et de toute la mythologie occidentale qui y est liée s’apprécie ici. Pourtant, la plupart de ces palais sont récents. L’occupant britannique dans sa mansuétude a reconnu les potentats locaux en leur accordant des demeures mirifiques comme pour mieux se jouer de leur pouvoir réel. Quoiqu’il en soit Mysore compte au moins 3 palais dignes de ce nom et de nombreuses maisons palatiales.

Entrée du Palais Royal de Mysore

Le plus connu, le Palais de Mysore est une énorme pâtisserie kitsch. Il s’illumine de mille ampoules les soirs de la semaine le temps d’un son et lumières très sonore. Le dimanche à 19h30, toutes les lumières se mettent à briller. Dans la journée, les salles officielles se visitent pieds nus, ainsi que différents temples à l’intérieur de cet énorme complexe fréquenté par des hordes de touristes.

Le Palais de Mysore illuminé

Sur les hauteurs de la colline Chamundi, la villa Rajendra, palais réservé aux visiteurs du roi de Mysore, Krishnaraja Wodeyar IV, abrite aujourd’hui un hôtel. Son architecture s’inspirerait de la cathédrale St. Paul’s de Londres. Construit en 1921, il appartenait au vice-roi des Indes.

Palais Musée Jahangar

La famille royale, a fait don à la ville d’autres palais. Ainsi, le Palais Jahangar, à l’architecture sobre abrite des collections artistiques. Les amateurs d’art à l’occidental peuvent passer leur chemin. Pour ceux qui tiendraient vraiment à visiter les lieux cependant,  il ne faut pas manquer la guitoune à l’entrée. Elle fait office de billetterie. On accède aux galeries par la verrière au fond du jardin à droite.

le dernier Maharadja de Mysore

Le premier grand salon expose des œuvres horlogères. Quant à la grande collection de portraits, elle révèle combien dès la fin du XVIIIe l’européanisation s’exerçait autant dans les mœurs, l’économie que dans les arts. Des portraits de dignitaires locaux posant à la manière anglaise côtoient des profils moghols agrandis. Des portraits de groupe juxtaposent maladroitement des jambes et torses sur lesquels ont été posés des visages, visiblement par des artistes différents. Les perspectives sommaires, attestent de l’intérêt porté à l’art européen par des artistes locaux.

De jolies fresques ornent néanmoins les murs du second étage.

Le Palais Lalita

Le Lalita Palace, Mysore, des allures de Capitole

Plus au sud de la ville, le Palais Lalita reste impressionnant. Son architecture n’est pas sans rappeler le capitole de Washington ou tout autre grand bâtiment néo colonial anglais. Les salons ont gardé un charme désuet. Dommage néanmoins que l’hôtel vive sur son précieux passé et ne songe guère à se moderniser. La tasse de thé et le biscuit digestif offert en contrepartie de 100 roupies pour compléter le tour d’horizon pourraient gagner en classe. On se voit bien profiter d’un véritable et « so british » afternoon tea dans un lieu pareil.  

Salon du Lalita Palace

Outre ces Palais, de très belles maisons se découvrent au hasard des avenues plantées. On peut citer le Green Hotel une jolie demeure coloniale entourée d’un vaste jardin dans le quartier de l’université. Au fond du hall de cet hôtel vieillot au charme colonial, se niche une ravissante pâtisserie.

Jolie halte à la pâtisserie du Green Hotel

Mysore, une ville pensée

En dehors du marché, très animé et typique des villes indiennes, Mysore jouit d’un urbanisme incomparable dans le sud. Car elle n’a pas poussé au gré des exodes, comme bon nombre d’autres villes. Au contraire les larges avenues aérées, les rond points et les perspectives attestent d’une véritable pensée urbanistique. En d’autres termes Mysore a été dessinée avant d’exister.

On sent certes la patte anglaise, dans le plan et les nombreux espaces verts, les édifices blancs et symétriques. Mais la présence moghole compte certainement beaucoup dans la création de cette véritable cité jardin. Le plan s’est d’ailleurs d’autant plus imposé ici qu’il a fallu tenir compte de la géographie des lieux. En l’occurrence de nombreux lacs et collines parsèment cette ravissante cite verte.

Mysore, cité jardin

Car si les grandes avenues donnent un aspect aéré rarissime en Inde, la profusion des jardins, parcs et arbres rajoutent au dépaysement. Alors Mysore ville jardin, ou ville Palais ?

Première salle du Palais Royale de mysore

Autour de Victoria Station

On ne débarque plus à Victoria Station lorsque l’on vient de France. Néanmoins, pour peu que vos pas vous mènent vers le sud de l’Angleterre, vous pouvez avoir à passer quelques heures dans ce quartier. Dans ce cas, que faire ? Comme pour les autres gares, voici des itinéraires selon le temps dont vous disposez à Victoria Station.

frise en pierre de Coade sur Belgrave Square

Il pleut ou vous ne voulez pas trop vous éloigner de Victoria Station

Si vous ne disposez que d’1 heure

Dans ce cas vous pouvez déjà déambuler dans Victoria Station modernisée par l’ajout d’un centre commercial. Mais, vous pouvez aussi vous aventurer vers l’étonnante cathédrale catholique Westminster. A moins que vous ne disposiez d’un peu plus de temps, et que vous ne vous décidiez carrément pour l’abbaye de Westminster et Westminster Square.

De Victoria Station à Pimlico

Vous disposez d’un peu de temps, il pleut encore et vous avez une envie de vous cultiver ? dans ce cas, pas une minute à perdre ni une hésitation, rendez-vous directement à la Tate Britain, orgueil du quartier de Pimlico.

Turner, autoportrait à la Tate Britain, non loin de Victoria Station

Les majestueux bâtiments ont été refaits. La galerie consacrée à la peinture anglaise offre un panorama passionnant de la peinture élisabéthaine à la création contemporaine avec des galeries très réjouissantes consacrée à Turner bien sûr, Hogarth, Sargent et Moore. Personnellement, j’ai un petit faible pour Sargent et ses portraits distingués d’une Angleterre déchue. Les collections permanentes sont, comme toujours dans les grands musées anglais, gratuites. Les expositions temporaires, elles, coutent assez cher.

Sargent
David Hockney

Du côté de Knighstbrige

Vous disposez de plus de temps, l’averse s’est enfin interrompue ? Vous avez maintenant envie de prendre l’air et de visiter un quartier moins touristique mais élégant. Vous pouvez longer Buckingham (et faire le détour par la galerie de la Reine) puis rejoindre Knightsbridge.

De là, trois options s’offrent à vous.

Belgravia

Vous pouvez commencer cette incursion dans les beaux quartiers par la visite de Number one. Apsley House fut la maison de Wellington. Comme il se doit, un musée occupe désormais les lieux. Vous y apprendrez tout du Duc de fer et de la vie des grands de ce monde au début du 19e siècle.

Vous pouvez aussi vous diriger directement vers les effluves d’Oud émanant de Harrods et vous régaler des magnifiques décors des rayons nourritures. Si vous voulez éviter la foule, vous pouvez obliquer vers Belgravia. Ici les ruelles attestent de la richesse des riverains.

Motcomb street

De jolies maisons bordent les « mews » alors que les places sont bordées de grandes demeures. Belgrave square ou Eaton square et les rues alentour restent des oasis de luxe et de tranquillité si près du tohu-bohu des quartiers centraux. La rue Motcomb a conservé une jolie animation. Son ancien cinéma panteknikon est aujourd’hui un restaurant doublé d’un petit centre commercial. Le jardin à l’arrière accueille un couple Rabbit girl et Dogman de Gillie and Marc : le banc de l’amitié.

Rabbitgirl and dogman

Chelsea

De Eaton Square, ou directement depuis Victoria Station, il est facile de gagner Chelsea.

La place Sloane square regorge de boutiques et restaurants chics qui continuent le long de King’s Road. L’artère principale de ce ravissant quartier de Londres voit se succéder enseignes à la modes et boutiques indépendantes. Quelques bâtiments anciens rappellent néanmoins le village ancien. L’Hôtel de ville et les quelques belles maisons précèdent en effet les charmants petits cottages de brique, et les jardins si typiques de Chelsea.

Plus près de la Tamise, la zone a hébergé de nombreuses personnalités du monde littéraire notamment. Ainsi Cheyne Walk après avoir été distingué à l’époque de Thomas More est devenu LE quartier des Préraphaélites. Cheyne Row, où a habité Thomas Carlyle, auteur d’une somme sur l’histoire anglaise, garde tout son charme.

Surtout, le Royal Hospital, équivalent britannique de notre Hôtel des Invalides et chef d’œuvre de Christopher Wren peut à nouveau se visiter.

Vers Kensington

Le quartier chic par essence. Outre les belles artères commerçantes et les célèbres grands magasins, on y apprécie les grands parcs. Pas seulement Hyde Park mais aussi Kensington avec le Palais voulu par Guillaume et Mary et depuis résidence des héritiers du trône. La construction de brique a conservé l’aspect sobre déterminé, par la maison d’Orange. Les grilles restent envahies par les tributs des fans de feu la princesse de Galles, Diana.

Holland Park et son ravissant Kyoto Garden vaut la visite. Non loin, la maison du Japon a ouvert sa vitrine avec un magasin et un restaurant extrêmement raffiné.  Tout autour, on se régale de rues élégantes et verdoyantes, de petits parcs.

Kensington est aussi et surtout un des hauts lieux de la culture avec le regroupement de musées fantastiques. J’ai déjà abondamment parlé de ce quartier dans mes pérégrinations victoriennes.

Les Inns of Court

Les Hôtels de cours ou Inns of Court offrent une balade bien plaisante et presque campagnarde dans le quartier le plus animé de la capitale. Ils visaient à loger les avocats dans la capitale. L’idée était de former, entrainer et réguler cette corporation apparue au Moyen Age au même titre que d’autres guildes.

Ces « Hôtelleries » s’articulent autour de Fleet Street. Néanmoins, on y accède par des portails discrets et ouverts uniquement dans la journée en semaine.

Accès à Lincoln’s Inn

De quoi s’agit-il ?

Au Moyen Age, ces « hôtelleries » apparaissent à la limite de Westminster et de la City, à la lisière du pouvoir royal et du pouvoir économique. Elles se répartissent d’ailleurs de part et d’autre de Fleet Street, face à Temple Bar. La porte majestueuse dessinée par Christopher Wren a changé d’emplacement. On la trouve aujourd’hui à côté de Saint Paul. Elle marquait le passage de la cité royale à la city. Un socle surmonté d’un dragon marque aujourd’hui le passage toujours respecté par le souverain régnant.

L’émergence des Inns of Court correspond à la volonté de remettre le pouvoir judiciaire entre des mains laïques. Pour éviter toute dépendance à l’égard du pouvoir religieux ou royal, elles constituent de petits microcosmes accueillant élèves, stagiaires et professionnels. Si les avocats ne logent plus sur place, ils disposent toujours des commodités leur permettant d’exercer au mieux. Bibliothèques, chapelles, lieux de réunion et de cérémonies, restaurants assurent une vie en cercle quasi fermé. Les bâtiments s’organisent autour de cours et jardins clos et admirablement entretenus.

Lincoln’s Inn

De la dizaine d’hôtelleries initiales, il n’en subsiste que 4 : Middle et Inner Temple, Gray et Lincoln’s Inn. A chacune correspond un blason animalier.

Bien que fort touchées par le Grand incendie de 1666 et par le Blitz, puis reconstruites, les Inns of Court ont conservé un charme médiéval et une atmosphère presque bucolique tout à fait surprenante en plein cœur de Londres.

Inner et Middle Temple 

 Ces deux Inns of court occupent les terres des Templiers. L’Ordre fondé en 1119 pour protéger les lieux saints et les routes de pèlerinage s’enrichit en prêtant de l’argent aux croisés. Installé à la lisière de la cité londonienne en 1185, il y construisit son église sur le modèle du Saint Sépulcre de Jérusalem.

Leur pouvoir finit par faire de l’ombre aux souverains et papes. Jugés entre1307 et 1314, les templiers périrent sur le bûcher et leurs possessions passèrent entre les mains des Hospitaliers de St Jean de Jérusalem. Ceux-ci agrandirent l’église ronde en lui adjoignant une nef gothique aux fines colonnes de marbre. Ils louèrent les terres  aux laïcs chargés de rendre la justice. A la dissolution des congrégations religieuses sous Henri VIII, la zone resta entre les mains de ces laïcs. Ne subsiste que le double vocable de Inner temple et Middle. Il ne reste qu’un passage de Outer Temple qui se trouvait à l’extérieur de la city.

Portail temple Church

Middle temple s’articule autour de la belle place de la fontaine sur laquelle donnent la chapelle et le New Hall entouré d’un magnifique jardin qui s’étend jusqu’à la Tamise. On y accède par l’harmonieuse New court, œuvre de Christopher Wren.

New Hall, Middle Temple

Inner Temple

On passe facilement de Middle à Inner temple (dans la cité). Chacun étant signalé par le blason animalier : agneau de dieu pour Middle temple, Pégase pour Inner temple. Ce dernier est remarquable pour ses superbes jardins mais aussi sa fantastique église

Temple Church

Devant le temple rond, construit sur le modèle du Saint Sépulcre de Jérusalem juchés sur une colonne, la statue de deux templiers sur un seul cheval souligne l’austérité de l’Ordre. L’église, célèbre pour ses gisants, sa forme ronde, ses belles arches néo gothiques et son portail roman quasi intact avec son intrados sculpté a acquis la célébrité grâce au film tiré du « Da Vinci Code ».

Ye Olde Cork Tavern

On sort de Inner Temple par une très belle porte de bois incluse dans un bâtiment Tudor d’excellente facture surnommé chambre du prince Henri. Tout à côté ,un autre joli témoin médiéval la Ye olde Cock tavern. Toujours sur le même trottoir en direction cette fois de St Clement Dane, église construite par Christopher Wren. Les impacts de balles de 1940 y restent très visibles. En face, se trouve la belle échoppe de thé de Twinings

Prince Henry’s room

Gray et Lincoln’s Inns

Au Nord de Fleet Street, s’étend l’immense bâtiment néo gothique des Cours de justice. On peut y entrer et circuler dans les couloirs sans fin. Des visites guidées ont lieu et on peut également assister à des audiences.

Chancery Lane rappelle les Inns of Chancery, des hôtelleries secondaires ou préparatoires qui doublaient les Inns of Court. Il n’en subsiste que deux souvenirs : une grille de Clifford Inn, aujourd’hui intégrée à King’s College et la merveilleuse façade Tudor de Stapple Inn.

Stapple Inn

Dans Carey Street, s’amorce la petite Star Yard . On y trouve l’un de plus anciens tailleurs de Londres Ed and Ravensburg. S’y vendent tenues et perruques des avocats et avoués.

 Pratiquement en face, un curieux édicule vert en fer forgé est l’un des rares urinoirs survivants de l’époque victorienne.

pissotières victoriennes

Le long de Carey Street, juste derrière les cours de justice, de jolis magasins et pubs anciens se succèdent. On voit même une borne marquant la limite de paroisse. Et surtout l’une des portes menant à Lincoln’s Inn. Cette grande hôtellerie très reconstruite a conservé une magnifique chapelle. On peut respirer l’atmosphère de ces lieux chargés d’histoire dans le très joli restaurant situé sous les ogives de l’ancienne cuisine.

Lincoln’s Inns Field et Soane Museum

Façade supposée de Iningo Jones sur Lincoln’s Inn Field

Une grandiose porte néogothique s’ouvre sur Lincoln’s Field, le plus grand square londonien, dessiné par Inigo Jones. La maison 59/60 lui doit ses harmonieuses proportions. Cette place abrite deux des musées les plus étonnants de Londres. Au Sud le Hunterian Museum (fermé jusqu’en 2023) héberge la collection scientifique et un peu macabre de John Hunter.

Musée John Soane

C’est au nord du ravissant jardin que se dressent les trois maisons constituant le Soane Museum. Dans 19 petites pièces, le célèbre architecte de la Banque d’Angleterre mort en 1837 a compulsivement emmagasiné une collection de copies et fragments antiques, tableaux et objets hétéroclites. Dans ce capharnaüm étonnant, on s’arrêtera sur l’extraordinaire collection d’œuvres de Hogarth (2 séries complètes et quelles séries ! ) de très beaux Canaletto. Au chapitre des antiquités, le clou est assurément le sarcophage de Sethi 1er, père du fameux Ramses II.  Son arrivée a fait l’objet d’une célébration typique de l’époque victorienne. Evidemment, il ne fait pas être claustrophobe ni craindre les escaliers un peu pentus

Hogarth, le vote
Sarcophage de Séthi Ier

Bath

La ville de Bath est née autour de la seule source d’eau chaude des Iles Britanniques, dédiée à la déesse celte Sulis.

Les Romains, lors de la conquête, l’assimilent à Minerve et construisent un temple en 60 autour de cette source. Un complexe thermal enserre ensuite le sanctuaire au IIe s. La ville porte alors le nom de Aquae Sulis. Elle croit et se dote d’une muraille défensive au siècle suivant. Mais avec le déclin de l’empire et les invasions, les thermes tombent dans l’oubli.  Redécouverts, superbement organisés, ils se visitent aujourd’hui. Et c’est un plaisir que d’écouter les commentaires précis pour comprendre comment se déroulait la vie à l’époque romaine dans ces établissements thermaux. https://www.romanbaths.co.uk/

Les Thermes de Bath

Au VIIe, la petite ville renaît autour d’un nouveau complexe :  l’abbaye. Elle devient alors un centre religieux. Le passé romain est gommé, et on réutilise les pierres pour reconstruire l’abbaye au XIIeme siècle. On redécouvre les bains et la ville prend le nom de Bath. Un hôpital accompagne la redécouverte des propriétés curatives des eaux.  

Au XVI e siècle, Ia ville tombe et l’évêque décide de reconstruire une abbaye plus petite au moment même où Henri VIII déclare la dissolution des monastères. https://www.bathabbey.org/

Voûte en éventail de l’Abbaye de Bath

A l’epoque élisabéthaine, les spas deviennent à la mode et la ville attire l’aristocratie.  L’abbaye s’orne alors de fantastiques plafonds en éventail.

La ville se modernise au XVIIIe  et John Wood l’ancien et le jeune, la parent d’un urbanisme régulier. Ils y inventent la notion de croissant (crescent). Ils unifient en une façade un ensemble de maisons le long d’une rue en demi-lune. Cette forme jouxte le circus, place ronde, donnant une allure cosmique au plan de la ville. Les façades classiques et les eaux curatives attirent l’élite britannique et Bath devient très à la mode. On retrouve cette ambiance typiquement géorgienne à la Pump Room le temps d’un tea time. https://thepumproombath.co.uk/.

On peut aussi visiter la maison au 1 sur le Croissant Royal pour avoir une idée de la vie à Bristol à l’époque géorgienne : https://no1royalcrescent.org.uk/

Number 1 Roral Crescent, Bath

D’ailleurs, Bath, abonde en petits lieux charmants et élégants. Ainsi, sur le pont Pulteney, un des trois seuls ponts d’Europe bordé de maisons.

Enfin les fastes géorgiens apparaissent dans les Assembly Room aménagées en un superbe musée du costume. https://www.fashionmuseum.co.uk/

Musée du Costume, Bath

Ville touristique et culturelle, Bath offre également des expositions au musée Holburn ou au Victoria and Albert. J’ai d’ailleurs déjà parlé des expositions de ce musée : https://visitesfabienne.org/themes/toulouse-lautrec-de-montmartre-a-bath/

Musée du Costume, Bath

/ https://www.victoriagal.org.uk/

Hogarth

William Hogarth est regardé comme l’un des plus grands peintres anglais. Cet artiste du XVIIIe siècle (1697-1764) fait l’objet de nombreuses expositions, la dernière en date à la Tate Britain.. https://www.tate.org.uk/whats-on/tate-britain/exhibition/hogarth-and-europe . Après avoir été adoré, il est néanmoins aujourd’hui dénoncé pour ses contenus « pouvant choquer certaines sensibilités ». Qu’en est-il réellement ?

Mary Hogarth

Loin des grandes envolées picturales de Turner ou des portraits de la bonne société chers à Gainsborough, Reynolds ou Lawrence, Hogarth s’est davantage illustré dans la peinture dite de genre que dans la « grande peinture ».

Un peintre de genre, critique social de son époque

Ses quelques œuvres historiques (notamment à l’Hôpital Saint Bartholomée) https://spitalfieldslife.com/2010/10/20/hogarth-at-st-bartholomews-hospital/

 ne lui rapportant que peu de gloire, Hogarth s’est vite consacré aux portraits de ses proches ou de la bourgeoisie. Il ne connait pas le succès d’un Gainsborough en la matière. Du coup, il se fait un nom dans le portrait de groupe. En revanche, son mordant et son sens du détail font mouche.

Petit chien dans un mariage à la mode

Ainsi, graveur et peintre «de genre », il a connu du succès avec ses séries illustrées et moralisatrices. La plus connue est certainement « le mariage à la mode » de la National Gallery de Londres. https://www.nationalgallery.org.uk/

 Au travers de 6 scénettes, on voit l’évolution d’un mariage arrangé entre le dernier rejeton débauché d’une famille aristocratique et la fille d’un riche bourgeois. Derrière le ridicule, se lit la désapprobation du peintre. Les détails s’accumulent pour enrichir son propos : cicatrices de maladies vénériennes sur le visage du comte, petits chiens mimant la fidélité, accumulations archéologiques à peine dépoussiérées, enfants désœuvrés. Car Hogarth adore les petits, animaux et humains, et se plait à les mettre en scène.

Petit garçon détail dans un mariage à la mode

Une exposition consacrée à Hogarth et l’Europe, à la Tate Britain

La Tate Britain conserve nombre de ses tableaux de genre et portraits. L’exposition qui s’y tient jusqu’au 20 Mars 2022 restitue le peintre dans le contexte européen. https://www.tate.org.uk/visit/tate-britain

Affiche de l’Exposition de la Tate

Malheureusement, à trop insister sur le hiatus entre sa peinture et la pensée « woke » propre à notre siècle, cette exposition me semble manquer l’essentiel. Si l’idéologie de Hogarth n’est pas conforme à celle d’aujourd’hui, il n’en reste pas moins un extraordinaire chroniqueur de son époque. Son œuvre, outre l’intérêt pictural, se veut mordante et caustique. Elle dénonce avec humour les travers de son époque marquée par l’ascension décomplexée de la bourgeoisie d’affaire et la décomposition morale et financière de l’aristocratie.

“After” fait le pendant de “Before”….

L’exposition, en présentant Hogarth auprès de ses contemporains européens réduit encore l’impact du peintre. En effet, elle le place en parallèle de peintres tels le vénitien Longhi ou le français Chardin. C’est ne lui accorder qu’un intérêt documentaire, celui de chroniqueur de son époque.

Un peintre de conviction, comique mais engagé

Or, Hogarth a beaucoup consacré de sa vie et de sa fortune pour aider les autres. Sa petite maison de campagne, à Chiswick, nous le montre en famille. https://hogarthshouse.org/

Tout le petit monde de Hogarth

Malheureusement encerclée par les échangeurs routiers, cette charmante maisonnette expose des reproductions de ses séries les plus célèbres mais aussi des évocations de ses proches. Epris de sa femme, attentionné avec ses proches, il s’intéresse à toute sa famille, aux domestiques qu’il peint, aux chiens qu’il s’amuse à montrer dans ses tableaux. Sans descendance, il vient en aide aux enfants abandonnés et donne de son temps et de ses œuvres au Foundling Museum. Il offre ainsi au bienfaiteur Thomas Coram son portrait et à l’institution deux œuvres. https://visitesfabienne.org/les-enfants-abandonnes/

critique social de son siècle

Ami fidèle, Hogarth offrit également son portrait à Thomas Twinnings son portrait pour le remercier de lui offrir du thé. Conformément à la volonté du peintre, on peut encore admirer l’original accroché dans la boutique originelle sur le Strand. https://twinings.co.uk/pages/twinings-flagship-store-216-strand