Egmore Museum

Le Egmore Museum ou musée de Chennai, occupe une dizaine de bâtiments éparpillés dans un grand espace arboré du quartier de Egmore. Les édifices les plus anciens, de style indo-sarracénique, ont été complétés par des constructions plus récentes.

Histoire de Egmore Museum

L’idée d’un musée de Chennai date de 1846 et émane de la société Littéraire de Madras. Dans un premier temps on logea sur le campus st George les 1100 spécimens géologiques.

Les collections s’accrurent régulièrement. Face à la détérioration des lieux et à l’exiguité, le musée déménagea de College Rd à Pantheon Rd dans les Assembly Rooms dans lesquelles l’élite de la ville se retrouvait pour des banquets, bals, conférences à la fin du XVIIIe s.

Dès 1853, une bibliothèque publique s’organisa dans les locaux du Musée. En 1862, commencèrent les travaux de construction d’une salle de lecture. Ouverte en 1896, elle prit le nom des ancêtres du gouverneur de Madras, Lord Connemara. Construite sur les plans de l’architecte Irvin, elle s’enorgueillissait de beaux rayonnages de tek et d’une imposante tour (la plus haute de Madras alors) détruite en 1897 car elle s’écroulait.

Après le centenaire du musée en 1951, un nouveau bâtiment fut construit pour héberger l’exceptionnelle collection de bronzes, ainsi qu’un autre dédié à la conservation. 1963 vit aussi l’ouverture de la galerie des oiseaux. En 1984 la galerie d’art contemporain s’ajouta aux édifices et en 1988 le musée des enfants.

Aujourd’hui, Egmore Museum s’organise en 7 édifices distincts avec des collections disparates.

7 bâtiments pour des collections disparates

  • Le premier, une sorte de délicieuse pâtisserie, abrite la billetterie. Tout à côté, un grand panneau donne le code QR d’une remarquable visite guidée enregistrée par Story trail.
  • Vers la droite de la billetterie, La bibliothèque Connemara occupe un bâtiment plus moderne aux lignes vaguement art déco.  Elle accueille les chercheurs et les étudiants. Il s’agit d’une adjonction au bel édifice ancien vanté par les guides mais caché derrière le théatre.
  • Un magnifique bâtiment rond sert de théâtre. Sa restauration vient de s’achever. Bati sur le modèle du Royal Albert Hall de Londres, c’est une petite merveille architecturale mêlant les influences anglaises à des accents indo-sarracéniques.
  • En contournant le théâtre, on accède à un bâtiment de style flamand. Avec pignons de briques rouges. Ce style est emblématique de l’architecture de Kensington, le quartier de Londres bâti à lé poque victorienne dans le but de créer une enclave culturelle, l’Abertopolis. Cet édifice abrite la collection archéologique. Le rdc expose des collections de marionnettes de toute l’Inde, mais aussi des vases de terre néolithiques. Au premier étage, le palier orné d’un beau plafond victorien, distribue vers la section anthropologique et vers les salles consacrées à la civilisation harappéenne.

-Plus loin encore, se dresse le bâtiment consacré à la monnaie. Les collections numismatiques font en Inde l’objet de soins considérables

– derrière cette magnifique construction de brique rouge, un triste parallélépipède de béton annoncé par un dinosaure en plâtre abrite l’amusant musée des enfants. Des vitrines y regroupent de petites poupées évoquant les autres pays du monde selon une vision indienne.

– enfin le dernier bâtiment, lui aussi moderne et sans grâce, abrite la collection de peintures. Des croutes poussiéreuses égrènent les gouverneurs qui ont marqué la présence coloniale.

La statuaire de pierre

  En contournant le théâtre, on parvient au bâtiment principal abritant les sculptures de pierre puis au pavillon abritant les bronzes cholas. Le bâtiment principal du musée d’Egmore présente au rdc une belle rétrospective des statues des périodes historiques le plus emblématiques du sud de l’Inde. On y admire des statues datant des Pallavas, des Cholas puis des Vijayanagars.

A l’étage, une section est consacrée à l’épigraphie. Elle présente dans une petite salle les premières formes d’écriture consignées sur la pierre mais aussi sur des tablettes de cuivre ou des feuilles de palmier. Un couloir mène aux vestiges les plus impressionnants, comme les sculptures bouddhiques d’Amaravati. De là, on accède au fouillis typique des musées victoriens avec des salles consacrées à la faune et à la flore locales. Des vitrines sur la soie alternent avec des animaux empaillés au siècle dernier ou des fossiles. Des salles de paléontologie suivent en enfilade celles représentant l’habitat des bestioles du cru. La muséographie n’a pas changé depuis le départ des Anglais et le ménage doit remonter à peu près à la même époque.

Juste derrière le jardin de sculptures se dresse le pavillon des bronzes cholas.

Les Bronzes cholas, stars du musée de Chennai

La collection des bronze cholas a été refaite récemment, c’est-à-dire il y a moins de 50 ans. Elle jouit de lumière et d’air conditionné. La salle plongée dans le noir met en scène dans des vitrines éclairées (je le souligne car ce luxe électrique est unique dans les musées de Chennai) les plus belles pièces du musée. Il s’agit de statues de bronze de petite taille représentant les dieux hindous. Elles remontent à l’âge d’or des Cholas entre les XIII et XIVème siècles.

Cette dynastie brilla alors sur le sud de l’Inde depuis sa capitale Tanjore. Les Cholas sont restés célèbres dans l’histoire de l’art pour leur maitrise du bronze à la cire perdue. Il s’agit ici de la plus belle collection au monde. Certains de ces chefs d’œuvres viennent de rejoindre la magnifique salle de la galerie nationale, le plus beau bâtiment du musée de Chennai. De style indo-sarracénique, voire Gujarati, celui-ci évoque les splendeurs des palais de maharadjas.

Comme vous l’aurez compris tout n’est pas incontournable dans ce musée poussiéreux et il n’est pas forcément facile de s’y orienter. Néanmoins certaines sections valent la visite, notamment la galerie des sculptures et celle consacrée aux bronzes cholas.

La route du garum

La route du garum sera notre aventure de la semaine. Ou plutôt la route du commerce romain jusque vers le sous-continent indien. Cela constituera une diversion à l’automnale route du rhum qui se déroule tous les 4 ans.

Les Romains sur la route du garum

Alexandre le Grand a abordé l’Inde en arrivant par le nord. Ses troupes ont franchi l’Hindus et par extrapolation ont donné au pays qu’ils atteignaient le nom d’Inde. Puis, épuisée, l’armée du grand Général s’est arrêtée et a rebroussé chemin.

Mais qu’en est-il des Romains allez vous me dire ?

Les Romains aimaient les épices et notamment le poivre dont ils parsemaient allègrement leurs plats. Ils consommaient beaucoup d’encens dont ils embaumaient leurs dieux. Ils recherchaient aussi textiles et perles. Tout cela transitait en Inde vraisemblablement depuis l’Afghanistan ou la Malaisie.

Les anciens raffolaient également du garum ce mélange de petits poissons en saumure, semblables à ceux que l’on trouve fréquemment sur les étals des marchés indiens. Ils maitrisaient également les vents. De ce fait il n’est guère étonnant de retrouver leur présence sur les côtes orientales et occidentales du sud de l’Inde. ils allaient y chercher leur précieux et odorant condiment.

Les Romains sur la cote de Malabar

C’est tout d’abord sur la cote ouest, dite côte du Malabar que l’on retrouve la présence romaine dans le sud de l’inde. Ils auraient laissé des temples dont aucun vestige ná été retrouvé. En revanche la documentation existe. Le papyrus de Muziris est le premier document en grec renseignant sur un commerce égyptien et romain sur le sol indien, il date du 2e s et est conservé au musée archéologique de Cochin.

 La table de Peutinger, cet itinerarium latin de la fin de l’Empire portait mention des routes empruntées par l’armée et les marchands. Recopiée au 13e s par un moine elle est aujourd’hui conservée à Vienne. Une copie se trouve au musée archéologique de Cochin et atteste de l’existence d’un temple augustéen dans la localité de Muziris. Cependant, le site n’a jamais été retrouvé. Les archéologues l’imaginent situé un peu au nord de l’actuel Fort Cochin, du côté d’Ernaculum. Des amphores et panneaux évoquent aussi les incursions romaines.

Les Romains sur la côte de Coromandel

La présence romaine ne se limite pas à la cote ouest. Il semble que nos légionnaires aient traversé les ghats, ou contourné le sub continent en longeant les plages du sud pour gagner la cote de Coromandel au sud du golfe du Bengale. A défaut de soldats, des marchands s’y sont rendus. Les accompagnaient certainement quelques protochrétiens au rang desquels se trouvait le fameux st Thomas. On retrouve leur trace aux embouchures des fleuves . Par exemple, non loin de Pondichéry, sur le site d’Arikamedu où l’institut français a exhumé des amphores au 19e s. D’autres proviennent de Adichanallur-Tuticorin et remontent au IVe siècle avant notre ère. Quelques vestiges sont exposés dans deux mini vitrines de la minuscule section indienne du Musée Guimet à Paris. Mais aussi dans la première salle peu reluisante du musée de Pondichéry.

Saint Georges

Saint Georges est le Saint sous l’invocation duquel se placèrent les premiers colons britanniques.  Il devint patron de leurs Iles durant les croisades car il personnifiait les idéaux chrétiens des chevaliers. On le représente le plus souvent avec une croix rouge. Le martyr du jeune homme blond fougueux terrassant le dragon a eu lieu sous Diocétien, en 303. Longtemps après, le tout premier fort de Chennai a pris son nom. Celui-ci remonte aux Anglais lorsqu’ils ont décidé de s’installer dans le hameau de Madras-Patnam au XVIIème siècle. Bien que décapité, Georges est resté si l’on peut dire à la tête des colonies de sa gracieuse majesté.

Fort Saint Georges

La plus ancienne église anglaise de Chennai est Ste Marie dans l’enceinte du Fort Saint Georges. Dans les faits, les paroisses portugaises du XVIème siècle préexistaient à cette romantique construction de 1680. Les missionnaires portugais avaient déjà repris le flambeau de l’apôtre. Ils avaient ainsi tenté d’imposer la foi catholique du côté de Mylapore et d’y installer un comptoir commercial. Pourtant, Ste Marie apparait encore dans les documents comme la plus ancienne église de Chennai. Ce qui n’enlève rien à son charme suranné. La construction, de style palladien, reprend au classicisme vénitien ses colonnes et sa symétrie. Mais la blancheur a fané, les boiseries se sont écaillées. La vannerie des dossiers est mangée par les rongeurs et l’humidité. Les pigeons souillent le sol et le tout respire l’infinie tristesse d’une ère passée.

Elle évoque la fondation du Fort le jour de la Fête du Saint patron de l’Angleterre par Francis Day. Cet envoyé de la Compagnie des Indes orientales y fonda un petit fort commercial. Il visait à concurrencer les Européens établis sur la côte de Coromandel. Pour ce faire, il acheta au Nayak local ce petit morceau de terre en bord de plage. Puis, il y établit ce qui allait devenir le centre d’un empire et d’une incroyable réussite économique pour Les Anglais. Pourtant, le fondateur a quasi disparu des registres et des mémoires.

Clive, Yale, Wellington, ont marqué le petit Fort Saint Georges

Du premier comptoir, subsistent quelques maisons en piteux état. Celle de Clive, le Gouverneur sans scrupule qui devint l’homme le plus riche d’Angleterre. Celle où passa Wellesley également. Futur vainqueur de Napoléon, il y connut ses premières victoires et devint quelques années plus tard le célèbre Wellington . Peu de gens se souviennent également que le premier gouverneur de la petite colonie est resté dans l’histoire. Celui-ci légua une toute petite partie de la fortune amassée à Madras pour fonder une petite université américaine. Brave Monsieur Elusha Yale.

L’Eglise Saint Georges

Plus austère, mais néanmoins tout aussi palladienne d’inspiration, l’église Saint Georges se cache derrière le consulat américain. Elle aussi devait se trouver dans un magnifique parc aujourd’hui malheureusement utilisé comme parking. Elle s’inspire très largement de St Matin in the fields à Londres. Avec ses colonnes classiques surmontées d’un clocher pointu elle ne déparerait pas dans le ciel londonien. Mais la couche de blanc un peu décrépi de la façade, les ventilateurs fatigués, les bancs recouverts d’osier et les pigeons voletant dans la nef nous rappellent que la paroisse anglaise s’est largement tropicalisée. Les feuilles de palmier traversent les jalousies ouvertes.

Mais le plus émouvant se trouve à l’extérieur dans le cimetière nostalgique. Ses tombes fracturées par les racines de banyans exposent avec détails la vie de colons morts en ces terres inhospitalières. On y lit des histoires d’officiers décédés au combat. On découvre des veuves courageuses. Des souvenirs de missionnaires dévoués se dessinent au hasard des dalles de granit gagnées par la végétation. Le petit cimetière de St Georges est certainement l’un des lieux les plus romantiques de Chennai.

Le Campus Saint George

La présence de George ne se limite pas au Fort ou à la cathédrale anglicane. En francais, on lui préfère Georges. On en trouve également la trace sur le campus de College Road, lieu de la plus ancienne université de Chennai. Il ne reste que peu de bâtiments de l’époque coloniale. Cependant, le secrétariat et la poussiéreuse mais étonnante société littéraire résistent au temps. La petite chapelle Saint Georges a, elle, été reconstruite. Elle manque singulièrement de charme mais rappelle le patron de la petite colonie et de son premier établissement d’enseignement supérieur.

Livre sur le Tamil Nadu

Ces deux années à Chennai m’auront permis d’écrire un livre sur le Tamil Nadu.  Je viens ici étoffer mon article annonçant la naissance du bébé.  On m’a en effet souvent demandé d’expliquer la genèse de ce projet. J’avais prévu de faire des conférences sur des sujets transversaux à l’Angleterre où je conservais des élèves et l’Inde où je venais de m’installer. J’avais ainsi commencé à rassembler du matériel sur l’histoire du thé et sur celle des textiles.

Des rencontres, un livre sur le Tamil Nadu

C’est en décembre 2022 que j’ai croisé Mélanie Bass, une jeune américaine installée à Chennai. Je lui ai parlé de mon envie de décorer mon texte d’enluminures à la manière d’un manuscrit médiéval. Intéressée par le projet, elle m’a proposé d’illustrer mes premiers textes. Avec beaucoup d’humour, elle a su interpréter en images mes impressions de Chennai. Nous nous sommes prises au jeu et avons décidé de continuer l’aventure. C’est ainsi qu’est née l’idée d’un livre sur le Tamil Nadu.

Il nous fallait maintenant trouver un fil directeur. A cette époque-là, je m’étais mise au Tamoul et j’apprenais, avec difficulté, l’alphabet. L’idée d’utiliser ces jolies lettres rondes et douces pour mes enluminures s’est rapidement imposée.

En septembre dernier, j’avais bien avancé l’écriture de 4 autres chapitres, lorsque Mélanie m’a annoncé qu’elle rentrait aux Etats Unis. Pour de bonnes raisons puisque, enceinte, elle voulait vivre sa grossesse et son accouchement entourée des siens. Il m’a fallu alors retrouver un autre artiste.

Un livre et une exposition

J’ai immédiatement pensé à mon amie Catherine Delmas Lett avec laquelle j’avais participé à une exposition au Qatar il y a une dizaine d’années. Nous sommes toujours restées en contact. Surprise, celle-ci a eu l’air intéressée. Après quelques semaines pour nous organiser, nous avons commencé à retravailler sur l’idée du livre. Il a fallu redimensionner les images, les positionner différemment et repenser la présentation.

Il m’a aussi fallu passer de la collaboration avec Mélanie à laquelle j’envoyais le texte pour recevoir quelques mois plus tard une version totalement illustrée à Catherine, peintre de renom. Avec celle-ci, nous avons mis au point une routine fort différente. Nous nous parlions le matin, échangions des images et surtout je lui précisais ce que je voulais et l’image que j’avais en tête. C’est ainsi que sont nées certaines de ses images les plus inspirées, comme les petites écolières, le filter coffee ou le schtroumpf qui a perdu son bleu.

Face à la quantité de dessins et lavis (monochromes) produits, s’est rapidement imposée l’idée d’une exposition. J’ai eu la chance que Patricia Théry Hart, directrice de l’Alliance française de Pondichéry m’ouvre les portes de sa Galerie 24 pour la semaine de la Francophonie. Nous y exposons jusqu’au 28 Mars 2024 une soixantaine d’œuvres ainsi que le livre. Pour plus d’information ou pour vous procurer le livre, vous pouvez me contacter directement.

Lettres tamoules

Cela faisait un petit moment que je préparais mes lettres tamoules et les voici enfin.

Une naissance très attendue

C’est donc avec fierté que je vous annonce la naissance de mon second ….livre ! Celui-ci est le fruit d’un travail d’équipe. En effet, de gentilles fées traductrices et relectrices se sont penchées sur le berceau du bébé déjà comblé par deux (+1) marraines illustratrices. Merci Melanie, Catherine D et Catherine B ! Un parrain, metteur en page de talent a joué le conseiller technique spécialisé. Merci Bertrand !

De quoi traitent ces lettres tamoules

Il s’agit d’un abécédaire basé sur le magnifique syllabaire tamoul. Pour chaque lettre choisie, un mot transparent, lisible en anglais français et tamoul permet d’explorer quelques spécificités de la culture de l’Inde du sud. Il y est question notamment de nourriture, d’architecture, d’histoires et d’Histoire locale, de vêtements mais aussi de villes et de monuments.

Présentation officielle des Lettres tamoules

La présentation de cette petite merveille aura lieu à l’Alliance française durant la semaine de la francophonie en anglais et en français. Celle-ci s’accompagnera d’une exposition d’une semaine des oeuvres picturales illustrant mes écrits.

Pour les curieux et les amateurs, vous pouvez commander votre exemplaire via mon site ou mon adresse mail. Vous pouvez également réserver des cartes postales ou des planches illustrées par les artistes Mélanie Bass ou Catherine Delmas Lett. https://catherine-delmaslett.com/. A leur importante et superbe contribution, je peux ajouter les quelques magnifiques dessins sur le yoga de mon amie Catherine Brousset https://www.atelierartmotion.com/galerie4.

Calcutta

Les préjugés collent à l’image du centre de Calcutta. La troisième plus grande cité d’Inde effraye à l’avance par sa misère crasse. Et pourtant c’est oublier que la « Belle en Guenilles » fut la capitale du Raj britannique. Elle conserve d’ailleurs de magnifiques monuments de sa période de gloire.  Comme souvent, je vous propose plusieurs articles. Dans le premier, voici une visite du centre de Calcutta. il vaut mieux y venir entre octobre et mars pour des raisons climatiques.

Autour de l’Esplanade

Ce que l’on appelle le centre de Calcutta correspond au quartier historique de la capitale du Raj Britannique. Desservi par le métro, ce quartier regorge d’hôtels et de petits restaurants.

On y trouve de jolies adresses comme l’Oberoi, le Grand hôtel de l’époque britannique avec son piano bar, ses petits salons. Dans les rues avoisinantes, une foule de petites pensions bon marché accueillent des routards. Les touristes attirent une foule miséreuse autour de ces rues très commerçantes. Car on trouve de tout à New Market . Entre petits stands et jolies boutiques anciennes, ce quartier est le paradis des acheteurs. Pour une petite boisson, le joli hôtel Fairlawn vaut le détour. Il offre une vision désuète et pleine de charme du Calcutta colonial. Ses vieux sofas poussiéreux et ses photos de célébrités d’antan invitent à une halte dans le passé.

Outre les bâtiments gouvernementaux, l’on trouve deux des monuments les plus importants de la ville et de nombreux espaces verts.

Le Maidan, poumon vert de Calcutta

Le Maidan est un immense poumon vert au centre de Calcutta articulé autour de Fort William. La forteresse remonte à 1696, une cinquantaine d’‘années après Fort Saintt Georges, à Madras. Ces Forts marquent les lieux de naissance de ces villes anglaises. Celui au centre de Calcutta se trouve toujours entre les mains de l’armée et ne se visite pas. On trouve de nombreuses statues dans le parc ainsi que des jardins aménagés. Ainsi Eliott park a été financé par la famille Tata.

S’y succèdent également des bâtiments emblématiques du centre de Calcutta. On y voit le planétarium Birla, de style classique, financé par la famille du même nom . Non loin de là, se dresse le mémorial à la Reine Victoria. Puis, la cathédrale st Paul, bâtie sur le modèle de Westminster Abbaye. Son architecture est une réplique fidèle de la grande abbaye londonienne.

Le Victoria Memorial

C’est un superbe édifice de marbre blanc plus palladien que moghol. Sa construction remonte au début du XXème siècle. Elle visait à célébrer la grandeur de l’Empire dont le centre était Calcutta. Entouré de jolis jardins bien entretenus, sa forme rappelle celle d’un capitole américain. Les petits lanternons autour de la coupole ne sont pas sans rappeller l’eglise de la Salute à Venise. C’est aujourd’hui l’un des plus beaux musées du centre de Calcutta. Le rez-de-chaussée expose des peintures et statues des Anglais qui ont marqué le Raj. En revanhe, le premier étage a été aménagé en musée des « combattants de la liberté ». Dans une muséographie moderne, inédite en Inde, on y suit l’évolution des idées et des hommes qui menèrent vers l’indépendance.

Le musée indien de Calcutta

Ce musée est l’un de plus anciens d’Asie et remonte à 1814. Conçu à l’anglaise, mais dans une palais bengali, il est resté pratiquement en l’état depuis le départ des colons. La muséographie n’a visiblement pas été retouchée. Les chemins y sont compliqués, comme la belle salle des textiles, cachée derrière la collection de poissons et d’oiseaux. La poussière date visiblement de la même époque, en tous cas dans les salles d’histoire naturelle. Néanmoins, la richesse des collections fait de ce grand palais, articulé autour d’une cour, l’une des attractions majeures du centre de Calcutta. Parmi les merveilles, les vestiges de la cité bouddhique d’Amaravati complètent ceux exposés à Chennai. La galerie de peintures mogholes au premier étage jouit néanmoins d’un réaménagement et les œuvres valent d’y passer un moment.

Maison de Mère Teresa

La maison de la grande figure chrétienne est devenue le lieu le plus visité de Calcutta. C’est une maison grise, entretenue par les missionnaires de la charité. On y voit notamment la tombe de la Sainte, cannonisée en 2016.

Au nord de Calcutta, le Pont Howrah et la Gare

Cette fois il s’agit de partir vers le nord de Calcutta. On va y découvrir deux bâtiments emblématiques de la ville. Ils se situent de part et d’autre de la rivière Hoogli, un des bras du delta du Gange. Il s’agit du pont et de la gare.

Le pont d’acier suspendu ne date que de 1943, mais il apparait sur de nombreuses représentations de la ville. Il domine l’impressionnant marché aux fleurs. Tout autour, on croise une foule de petits commerces de rue ahurissants,tels des raseurs publics ou nettoyeurs d’oreille.

De l’autre côté du fleuve, la gare Howrah st l’une de plus anciennes d’Inde avec celle de Royapuram à Chennai. C’est surtout la plus grande et la plus fréquentée du pays. Sa belle architecture est emblématique du style indo-sarracénique.

Saint Thomas

Saint Thomas a marqué Chennai de sa présence. D’abord parce que l’apôtre qui doutait y est mort au 1er siècle de notre ère. Il s’y est arrêté. Il y a aussi vécu huit ans nous raconte la légende, prêché et y a subi le martyr.

St Thomas, epinture de Saint Homas au Mont

L’Apôtre est donc venu évangéliser, subir la torture et mourir en ces lieux, bientôt suivi de disciples du Christ. Ceux-ci ont d’ailleurs motivé la construction de l’une des trois seules basiliques bâties sur le tombeau d’un apôtre. Avec Saint Jacques de Compostelle et Rome, Madras s’enorgueillit ainsi d’une communauté chrétienne.

L’arrivée de Thomas à Madras

Il n’est pas si étrange que st Thomas ait accosté en ces terres lointaines. En effet, les Romains y avaient déjà fondé des comptoirs. En atteste le site d’Arikamedu, situé à quelques kilomètres au sud de Pondichéry.

Les bateaux des marchand romains amenaient également à leur bord des missionnaires. Ceux-ci venaient au nom de cette religion nouvelle qui depuis la terre sainte essaimait à Rome. Ces hommes de foi n’étaient pas forcément nombreux mais assez pour construire quelques églises dans le Kerala. L’un d’entre eux, Thomas s’aventura de toute évidence jusqu’à la côte de Coromandel. Il avait déja séjourné douze ans sur la côte de Malabar. Il dut gagner l’Est en traversant les Ghats ou en contournant l’extrémité sud du cap Comorin.

Saint Thomas à Chennai

Les implantations chrétiennes les plus anciennes se trouvent de fait au Kerala. D’ailleurs, l’archéologie atteste bien d’une présence précoce de chrétiens. Néanmoins c’est bien à Chennai que l’apôtre Thomas aurait décidé d’organiser une communauté.

Thomas, si l’histoire est vraie, a prêché sur la plage au milieu des pécheurs. Il se retirait sur les hauteurs tropicales alentours. Une charmante petite église rappelle son lieu de retraite, au sommet de la colline. Avec son autel carrelé d’azulejos elle a un petit air portugais. Les escaliers qui y mènent, l’architecture de type missionnaire, avec sa façade simple, ourlée et blanche rappellent également le Portugal. A l’intérieur, on peut s’interroger sur l’étrange écriture sur un certain nombre de pierres tombales. Elles proviennent des marchands arméniens . Ceux- ci y pratiquaient leur culte avant de construire leur ravissante église à George Town au début du XVIIIème siècle.

Sur les côtés de l’autel, un extraordinaire étalage de reliques souligne la sainteté du lieu. Cela va des rognures d’ongles, au morceaux de dents de diverses figures plus ou moins illustres de l’Eglise locale.

Little Mount, lieu du martyr de Saint Thomas

Sur le chemin de sa retraite, en haut du Mont Saint Thomas, une flèche aurait transpercé Saint Thomas, lancée par un hérétique un peu énervé par son prosélytisme. Un étonnant lieu, nommé “Little Mount”, le petit mont, rappelle l’évênement. Ici, deux jolies chapelles portugaises à l’architecture missionnare cotoient une grande église ronde comme un tipi. Sa clarté disille une foi étonnante. Sur le même site, un fléchage permet de suivre la cellule dans laquelle l’Apôtre aurait été enfermé. On voit également au sommet de la colline un rocher dans lequel est imprimée une empreinte de pied, une infractuosité, nommée source miraculeuse, ainsi qu’un rocher maculé de sang. Une reconstitution en cire très haute en couleurs retrace la mort de Saint Thomas. Le tout est abrité sous une construction curieuse et destinée à accueillir des foules de pélerins.

La Basilique Saint Thomas

Il y a pourtant des reliques de Saint Thomas, a priori tout au moins. Et elles se trouvent dans la Basilique à son nom. Celle-ci est construite tout près de la plage, là même où l’apôtre se serait rendu pour prêcher. Celle-ci fut construite à l’aplomb de la sépulture. On est ici dans le schéma de st Pierre de Rome . A savoir une basilique majeure construite sur la chapelle construite autour de la tombe de l’apôtre. Néanmoins, l’architecture y est moins glorieuse ou spectaculaire qu’à st Jacques de Compostelle ou à st Pierre de Rome. Il s’agit d’une église néogothique blanche dans le plus pur style colonial britannique. Cette structure à clocher ressemble un peu à une tarte meringuée dans le paysage de Chennai. Cependant, l’intérieur ne manque pas de charme avec son étonnant plafond vouté à croisée d’ogive en bois.

 La basilique recèle quelques morceaux de bravoure. Ainsi, la crypte propose une reconstitution édifiante en carton-pâte de la mise à mort de St Thomas. Juste au-dessus, un petit musée recèle des vestiges de l’ancienne église. Quelques images le disputent à de vieilles pierres dans un joyeux fatras dont l’Inde a le secret.

 Le long de l’édifice néogothique, une petite chapelle abrite une vierge en saree assez unique. On peut lui préférer l’ensemble de portraits des apôtres qui ornent les murs de la nef de l’église supérieure. Au lieu de tableaux pompiers ou de mauvaises reproductions d’œuvres sacrées anciennes, le diocèse a choisi des photographies. Il s’agit de portraits de jeunes hommes magnifiques en guise d’apôtres, en tous cas certains d’entre eux. Bien que depuis longtemps fanés, ces portraits conservent la beauté de stars de cinéma.

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Architecture coloniale

Voici un petit lexique récapitulant l’architecture coloniale à Chennai et sa signification  avec en prime quelques bâtiments emblématiques.

Le baroque Portugais

Au XVIeme siècle, le petit village tamoul de Mylapore est conquis par les Portugais en quète d’épices. Les Fransiscains qui les accompagnent en profitent pour évangéliser et reconstruire la basilique de l’Apôtre Saint Thomas, martyrisé et mort en ces lieux. Puis ils construisent des missions. De petites chapelles se multiplient à Mylapore : Saint Thomas bien sûre, mais aussi l’Eglise de la Lumière Luz, Sainte Rita, Notre Dame du Rosaire. Sur les hauteurs, les jolis ermitages blancs et baroques du Petit Mont et de mont Saint Thomas dominent la ville.

Le néo-palladianisme ou classicisme anglais.

Inspiré de l’architecte vicentin Palladio qui travailla au seizième siècle non loin de Venise, il est ramené en Angleterre par Inigo Jones et se diffuse dans les campagnes britanniques avant de s’imposer dans les plantations et les bâtiments officiels américains. Il est devenu emblématique de l’idée de démocratie et de bien publique. Avec ses lignes équilibrées et symétriques on le retrouve notamment au Rippon Building mais aussi dans les belles églises st Andrew et St Georges. Il émane d’une Angleterre triomphante qui impose sa vision de l’ordre et du bon gouvernement.

Le style indo-sarracénique emblématique de l’architecture coloniale

Le style indo-sarracénique nait à Chennai au Chepauk Palace, juste à côté du stade de cricket du même nom. Il correspond à la vision anglaise des édifices indiens. Il mêle influences mogholes (alors que les Moghols ne sont pas parvenus à Chennai), néo-byzantines voire gothiques. On le voit aux musées du Gouvernement mais aussi dans les bâtiments de l’université de Madras ou les cours de justice. Il témoigne d’une Angleterre qui se veut intégrante et compréhensive de l’héritage musulman mais qui ne se rend pas compte qu’elle commet un anachronisme majeur puisque les Moghols ne sont pas parvenus au Tamil Nadu. La présence coloniale impose ici un modèle unique indien dans une vision hégémonique.

Le style néo-gothique.

Emblématique de la fin du XIXe anglais, on le retrouve dans beaucoup d’églises coloniales avec ces flèches à clochers pointus. SanTome en est un bon exemple. La gare centrale, sur le modèle de Saint Pancras de Londres illustre aussi joliment ce style.

Il connait une variante vénitienne avec notamment les bâtiments de brique rouge du quartier de Parry’s Corner. Le long de la ligne de chemin de fer, les belles façades donnaient sur la Promenade, allée de parade à l’epoque coloniale vite abandonnée lors de l’ouverture du chemin de fer et de la nouvelle Marina Beach plus au sud. Cette variante repose sur les écrits de John Ruskin et est essentiellement adoptée pur les édifices à vocation commerciale. Certains architectes poussent l’imitation jusqu’à reproduire des édifices célèbres de la République Sérénissime de Venise comme le fameux Bovolo. Venise à Madras, il fallait oser, mais les Anglais au faite de leur puissance coloniale n’hésitent pas.

L’éclectisme

Il très typique dans toute l’Europe de la fin du XIXe apparait à Chennai dans certaines constructions originales comme le bâtiment du Sénat de l’Université de Madras sur la Marina. Le plus bel exemple est néanmoins certainement Egmore Station avec son ravissant toit en coupole et ses piliers décorés de dentelles.

Le style néo dravidien, plus rare est une concession à l’âme dravidienne locale. Plus profondément tamoul, il apparait plus tardivement au centre ferroviaire du sud-ouest près de la gare centrale par exemple. Il témoigne d’un intérêt voire de concessions de l’Empire par rapport à l’originalité et l’identité tamoule dans un océan anglo-hindi.

Également très rare à Chennai, le style Arts and Crafts témoigne du mouvement Art Nouveau mené par William Morris en Angleterre. On le retrouve non loin de la gare à l’école d’Art, lieu d’expérimentations artistiques.

Le style art- déco

Il marque la fin de l’architecture coloniale et une certaine forme de revendication par rapport à l’Empire britannique. Français à l’origine, remanié par son passage américain, il orne les nombreux quartiers nouveaux du Chennai des années 1940 et correspond à la montée du sentiment indépendantiste. On le trouve donc essentiellement dans les maisons privées des quartiers modelés dans les années 1930 tels T Nagar, ou Royapet. A Parry’s Corner, quelques édifices commerciaux adoptent également ces lignes droites et modernistes.

Résidences de Royapettah

Avec les Résidences de Royapettah, je vous propose le deuxième épisode de notre decouverte d’un quartier du centre de Chennai. Après avoir présenté deux bâtiments emblématiques la semaine dernière, voici maintenant une plongée dans l’architecture art déco.

L’horloge de Royapettah, point de ralliement

L’horloge de Royapettah, face au Mall, est un des beaux témoins de la période coloniale finissante. Elle est l’une des quatre horloges art déco à subsister de l’époque anglaise. Et l’on peut espérer que celle-ci ne sera pas détruite. Repeinte à plusieurs reprises en couleurs vives, elle reste une balise importante de la ville. Construite dans un quartier central, elle équivaut à un lieu de rassemblement et un point de repère reconnaissable. Qu’importe finalement si aujourd’hui l’heure suit plus ses caprices internes que l’écoulement réel du temps.

Lors de son érection dans les années 1930, elle servait tout à la fois de repère visuel et de marqueur temporel. A cette époque, les gens disposaient rarement de montres..

Le quartier comptait alors de nombreux théâtres et cinémas. Il y en aurait eu plus de 80 également dans le style art déco. Celui-ci se distingue par sa verticalité et son ornementation géométrique.

Royapettah, quartier résidentiel

Il ne reste guère de jardins dans ce quartier en proie à une véritable fièvre spéculative. Néanmoins le café Amethyst offre un agréable oasis de paix.

Les rues qui partent depuis le mall proposent un florilège de résidences adoptant le style art déco local. Celui-ci recourt à des matériaux nouveaux comme le béton armé. En revanche, le vocabulaire architectural combine les éléments verticaux et géométriques. Ces éléments emblématiques de l’art déco se doublent ici de particularismes locaux. Ainsi en va-t-il des jalis en béton, ou des sculptures de divinités hindoues. Les jalis correspondent à des écrans de pierre ajourés et étaient fréquents dans l’architecture moghole.

Contrairement à Mumbai, il n’y a pas de quartier art déco homogène. En revanche, le style mâtiné d’influences locales a essaimé à travers tout Chennai. L’art déco y prend des formes tardives et vernaculaires marquées. Le rinceau, très classique d’inspiration pour nous, revêt ici une symbolique religieuse. Il rappelle les colliers de fleurs que l’on trouve dans les temples. Les motifs verticaux tripartites inspirés des ornementations automobiles américaines se mêlent à des œil de bœuf typiques de l’influence paquebot hexagonale.

Souvent malheureusement, ces maisons sont en piteux état, les enfants des propriétaires habitent à l’étranger. Faute de véritable conscience patrimoniale, ces chefs d’œuvre se décomposent peu à peu. Pire, ils deviennent la proie de spéculateurs en attente de ces terrains idéalement placés au centre de Chennai.

Un palais princier survivant de la fièvre immobilière

Au débouché des incroyables Maisons de Thalayari street, une très belle construction d’angle a été rénovée avec habileté. Plus loin sur la rue, deux tours néo mogholes marquent l’entrée du dernier palais des Nawabs de Arcot. Le Mahal est le dernier vestige de la puissance des derniers monarques du Royaume carnatique. Les Nawabs d’Arcot administraient les Etats du sud et prirent leur indépendance des Nizams de Hyderabad sous la domination anglaise. A la mort du dernier des Nawabs en 1855 les propriétés familiales échurent au Raj. Dans les faits, le royaume carnatique avait déjà été pratiquement annexé par les Britanniques.

Ils disposaient également comme résidence du palais de Chepauk et de Triplicane. Mais les Anglais les confisquèrent en échange d’un édifice indo sarracénique très inspiré par l’architecture moghole. Celui-ci avait été construit pour accueillir des bâtiments administratifs. Les descendants des Nawabs y furent relogés et à partir de 1867 eurent droit à une rente annuelle. La propriété appartient désormais au gouvernement qui y loge toujours les descendants de la famille.

 Ceux-ci ne jouissent plus d’aucun pouvoir mais mènent une vie sociale active et animent de nombreuses œuvres caritatives

Un peu plus loin sur la rue, la maison Gandhi Peak offre une extraordinaire façade blanche. A partir de 10h du matin, la frénésie de la rue et l’abondance d’échoppes occultent totalement ce type de façade. Néanmoins, il vaut la peine de s’y intéresser . On peut alors constater que chaque étage a dû correspondre à un habitant et une volonté différente. Ainsi le propriétaire du dernier a voulu honorer Gandhi. Il a donc fait orner la façade d’une niche avec une statue commémorative à l’effigie du Mahatma.  En continuant le long de Pycrofts Road, on rejoint le centre commercial Express Avenue.

Sari, kurta, dhoti

Que mettre ou ne pas mettre en Inde du Sud ?

Grande question quand on annonce son départ en Inde : tu vas t’acheter un sari ? suivie d’une question plus anxieuse, tu t’habilles comment ?

Car la vérité c’est que le sari n’est pas le seul vêtement indien et que sauf à assister à une cérémonie officielle, il n’est pas forcément bienvenu pour une européenne. Alors que mettre, et surtout que ne pas mettre ?

Voici un petit lexique pour vous mouvoir comme un poisson dans l’eau une fois lâché dans un magasin de vêtements indiens. Car il n’est pas toujours facile de s’y reconnaitre dans la profusion textile locale.

Le sari, roi des vêtements féminins

On retrouve des saris sur des sculptures dès le début de notre ère. Signe que la mode n’a jamais évolué en Inde ? Il s’agit d’un bête rectangle de 6 à 10m sur 1,20m très semblable à la toge romaine. La pudibonderie victorienne a drapé ce tissu autour d’un jupon assorti et d’un corsage serré. On le remonte sur le torse et on le passe par-dessus l’épaule. Du coup on peut utiliser le pan libre ou pallu contre le soleil, pour se cacher ou s’essuyer les babines post prandiales. Dans les faits, on enroule son sari selon des spécificités locales qui permettent à chacune de montrer sa provenance.

Le sari est essentiellement porté par les femmes mariées. Dans sa version bon marché en coton ou matières synthétiques teintes industriellement, pour les plus pauvres, en soie rebrodé de fils métalliques ouar les plus riches lors de cérémonies.

La sari peut suivre la mode. Pour cela je ne suis pas très bon juge. En revanche j’ai bien noté que la qualité du textile et des motifs, peinturlurés ou au contraire brodés, appliqués, sont de bons indicateurs de la classe socio-économique. Pour faire bref, inutile de s’acheter un sari en polyester pour un mariage ou pour briller en société. En fait, pour les occidentales en dehors des mariages, il vaut mieux s’habiller simplement en chemise longue et pantalon

Salwars et autres vêtements que le sari

Le Salwar   est un pantalon bouffant, un peu l’équivalent du sarouel oriental. Il est très large et il vaut mieux ne pas perdre le petit cordon sous peine de ne pas pouvoir le tenir. En Inde il se porte avec la kamiz ou kurta, une chemise longue jusqu’aux hanches voire plus. Elle est munie de manches longues et fendue sur les côtés. Il vaut mieux éviter de la porter sans rien en dessous sous peine de se sentir déshabillée par des regards hostiles ou au moins inquisiteurs. Néanmoins, un caleçon long fait généralement l’affaire.On peut accessoiriserl’ensemble d’une duppata, large foulard en général de la couleur et du motif du pantalon. Il peut pourtant reprendre la chemise, tout dépend du tissu, du couturier, de l’humeur du capitaine.

Jupes, écharpes

La Ghaghra est une ample jupe plissée, reprise par les soixante-huitardes de Lozère et d’Ariège. Ici elle se porte à la cheville, elle-même garnie de bracelets à grelots et avec une Kurta, tunique courte. Pratique pour jouer les Esmeraldas, les spectacles de Bollywood mais pas idéale pour grimper dans les arbres. On en voit néanmoins assez peu dans les rues de Chennai où les jeunes filles arborent la panoplie kurta -caleçon alors que les femmes mariées s’enroulent dans leurs saris aux plis inversement décroissants à ceux de leur ventre.

On peut compléter l’ensemble avec un châle ou pashmina brodé ou non et jeté négligemment sur l’épaule. Autour de la tête on vous demandera immédiatement si vous êtes musulmane, sans comptez que vous risquez de mourir de chaud.

Pas de sari chez les Messieurs 

  • Chez les Messieurs, le plus pauvres et traditionnels sont vêtus de dhoti, pas très facile pour l’occidental en RV d’affaire. Non élucidé à ce jour en ce qui me concerne, ce que l’on porte ou non en dessous, visiblement pas grand-chose chez les plus pauvres. Le Khadi  lui est le tissu de laine ou coton filé main et symbole de résistance non violente. Il a donné son nom au mouvement de résistance lancé par Gandhi en 1924. Pas idéalement pratique à porter dans le métro parisien sauf si vous avez un message à faire passer.
  • Nehru lui a lancé une mode élégante, avec la version raccourcie du sherwani, le long manteau de l’aristocratie musulmane. Son Ashkan, veste col mao ou Nehru (CQFD) se boutonne sur le devant, près du corps sur le churidar. Je parle ici du caleçon coupé en biais épousant le mollet et tombant sur les chevilles. Le sadri, gilet sans manche à col Nehru, complète l’ensemble.
  • Les locaux, (et les Aurovilliens) portent aussi des kurta (longue tunique à col ras et manches longues et paijama (vêtement de jambe) caleçon large flottant à la cheville. On le complète avec le Gamcha petite écharpe portée sur les épaules ou en turban et qui permet d’éponger le visage. Le Pagri ou turban en mousseline de coton lui, protège du soleil

 Si vous partez à Chennai pour affaire, la tenue occidentale suffira néanmoins.

Ce que vous pouvez tout à fait éviter

Il est certainement tout aussi important de savoir que ne pas mettre lorsqu’on part en Inde et particulièrement dans un état aussi traditionnaliste que le Tamil Nadu, alors quelques conseils qui sentent le vécu.

  •  Première précaution, pas de Nightie. La robe tee shirt si confortable a beau être bien décente, on vous zieutera comme si vous veniez de tomber de votre lit.
  • Surtout évitez les décolletés par en bas ou par en haut, ni short, ni dos nu, ni épaule à l’air, ni poitrail en devanture, rien qui attire le chaland. Des textiles légers larges et longs permettent en outre de s’aérer
  • Attention aux motifs ils ont une signification et peuvent donc porter des messages pas si subliminaux. Mangue ou poisson symbolisent la fertilité, les perroquets, la passion. Portez les en connaissance de cause.
  • Evitez les motifs trop vus, les Indiens adorent la nouveauté et changent autant que possible de tenue, question de prestige et de statut. Les guenilles à la mode en occident, jean troués, chemises trop grandes ne les impressionnent pas forcément dans le bon sens.
  • Enfin attention aux couleurs. Le blanc est la couleur des veuves, le rouge celle des mariés, le rouge et noir celle du Parti au pouvoir dans le TN. Vous n’êtes donc pas obligés de vous vêtir en drapeau partisan, ou au moins sachez ce que vous faites. Le bleu chassant les insectes est utilisé par les agriculteurs et artisans, le vert est la couleur des fêtes.

Bref comme vous le voyez, il n’est pas si facile de s’habiller au royaume des textiles !