Parry’s Corner

clocher blanc dans le jardin de l église arménienne

Parry’s Corner évoque pour les habitants et les touristes une succession de ruelles et de marchés de rue ou tout s’échange, se vend. Paradoxalement c’est aussi l’un des quartiers les plus anciens et les plus riches en architecture et il est dommage de ne s’arrêter qu’à la frénésie commerciale.

A l’origine du Madras britannique, Fort George et Parry’s Corner

A l’époque de la fondation de Chennai il n’y avait que des villages, parmi lesquels Chenna-Patnam, Madras-Patnam et Mylapore. Les Britanniques à leur arrivée fondèrent la ville de George Town, bientôt connue comme ville blanche et ouvrirent une route nord sud. Puis ils créèrent la ville noire en damier, le long de la plage avec le bazar birman. Une route menant à la prison au nord et à l’ouest à la gare centrale conplétait l’ensemble. Deux villes coexistaient donc, le fort à l’abri des murailles et au nord, la ville nouvelle au plan hippodaméen commerçante et locale avec ses temples et marchés.

 Lorsque la compagnie des Indes Orientales (EIC) grossit, elle eut besoin de comptoirs. Francis Day fut chargé en 1639 de trouver un nouveau port, non loin de l’implantation portugaise de Mylapore. Le commerce lusophone florissait depuis déjà un siècle. Le succès des Portugais, encouragea les Britanniques.

Sir Francis traversa le bastion hollandais et tomba sous le charme des lieux. Il obtint des terres du dignitaire local. Il fonda alors Fort st George pour la couronne britannique avec bureau, entrepôts et résidences pour la compagnie. Cette première ville fut pourvue d’une muraille.

Des 1600, la ville noire apparut hors des murs.  Elle résultait de la croissance mais aussi d’une discrimination entre chrétiens et locaux. Elle comptait des Telugus et Tamouls mais aussi d’autres groupes juifs, arméniens, gujaratis. Cette ville noire était dépourvue de murs. Les Français y tinrent siège en 1746 contre les Britanniques pour conquérir le trône des nawabs. Ils finirent par échanger Louisbourg, en Nouvelle Ecosse, au Canada contre Madras. Les négociants anglais revinrent alors et protégèrent la ville noire avec des armes et non des murs. Avec la colonisation en 1857, la Compagnie des Indes orientales remit ses territoires et parts à la couronne britannique.

temple et immeuble art déco dans Geogetown

Promenade autour de Parry’s Corner

Georgetown tient son nom du Roi George IV. Néanmoins, on parle du quartier comme de Parry’s Corner. Ce même si le nom désignait à la base juste un édifice commercial, d’où Thomas Parry fit fructifier ses activités.

Pour cette promenade, on peut justement partir de l’immeuble de Parry’s Corner. Ce nom correspond au second bâtiment d’affaire le plus ancien à survivre à Madras dans les années 1900. D’une riche famille, Thomas Parry, frère d’un administrateur de Georgetown, arriva à Madras. Marchand indépendant, il vendait un peu de tout, des voyages, du vin, de l’immobilier. Puis, il ouvrit une tannerie en 1905 et une, sucrerie en 1908. Ensuite, il s’associa avec William Dare. Ce partenariat fructueux prit fin dans les années 1920 lorsque Parry dut s’exiler pour des raisons politiques. Le bâtiment prit le nom de Dare mais le quartier et le sucre s’appellent toujours Parry.

facade art déco de Dare House

C’est au niveau de Dare House qu’eut lieu le siège français. En 1897, une esplanade jouxtait les murailles. En atteste un obélisque (sur les 5 existant à l’époque) et un bâtiment juridique néo-gothique. C’était une zone frontière entre les villes noire et blanche.  C’est en ce lieu que se sont développées les cours de Justice regroupant toutes les professions juridiques sur le modèle britannique mais selon le style indo-sarracénique. Ce fut surtout le centre de la ville et on y trouvait banques, commerces, institutions religieuses et administrations.

En face des dômes et pinacles d’allure néo-moghole, Dare House à l’angle, utilisé comme consulat américain a été détruit en 1908. Il a été reconstruit en acier et béton, de manière plus moderne. C’est un des rares bâtiments art déco de la ville à vocation commerciale.

Dubashi et Chetty  Street

Avant de tourner sur Dubashi Street, se dresse l’église du missionnaire John Anderson venu monter une école de filles dans St George et propager la foi chrétienne. L’église fut ensuite affiliée à l’université de Madras en 1877. Du collège, ne reste qu’un mur.

Le terme de dubashi se réfère aux serviteurs, traducteurs devenus en quelques sortes, intermédiaires, collaborateurs, agents, intermédiaires, receleurs, agents double au service des colons. Cette position avantageuse les enrichit considérablement. Ils possédaient beaucoup de terres et ont donné leurs noms aux rues. Mais ils volaient souvent les locaux. dubakul in tamul se traduit par tricher. La petite histoire raconte que pour se faire pardonner ils construisèrent de nombreux temples à travers la ville.

Chetty Street évoque en revanche les nombreux Chettiar, ces commercants qui ayant fait fortune avec les Anglais se firent batirent des palais somptueux dans le Chettinad.

Le bâtiment victorien de style vénitien rappelle les écrits de Ruskin. Il s’agissait d’une succursale d’une société de Mumbay. Construit en 1900 dans le style indo-sarracénique, l’édifice de brique possède une façade de brique et pierres aux spectaculaires vitraux et aux arcs de style venitien. La structure est néanmoins moderne et implique fer et acier, emblématiques de la révolution industrielle. Une véranda soutient le toit terrasse.

Armenian street

Cette rue prend le nom de la très belle église arménienne véritable oasis de charme dans le tohu bohu du quartier. Les Arméniens, d’abord à San Tome au Mont (ils ont financé l’escalier) sont tous partis. Mais ils étaient très prospères. Ils s’étaient enrichis grâce au commerce de la soie, des bijoux et épices. De ce fait, ils construisirent une église en 1712 plus proche de leur lieu de commerce fort st George.

Un peu plus loin se trouvent le centre catholique, un grand bâtiment art déco. A l’emplacement du parking qui le jouxte se trouvaient Benny and co ou les Arméniens vendaient leurs propriétés avant de rentrer chez eux. Cette énorme société a fait faillite. John Benny travaillait avec le nabab, il occupait de nombreuses fonctions et vendait des uniformes, fournitures de toutes sortes. Il investit dans 2 moulins, Buckingham et Karnatikam, puis à la fin du 19ème siècleune filature à Bengalore. Après l’indépendance, la société plongea du fait de la crise. Benny fut racheté dans les années 1960.

En face, la Compagnie d’assurance privée, est une succursale de celle de Bombay. Un architecte indien créa le bâtiment moderne, un des premiers planifiés en 1945 avec une entrée en angle. Le bâtiment est célèbre pour son sous-sol enterré pour les dépôts. Il recourait à des matériaux locaux. La décoration rappelait l’architecture indo-sarracénique avec le balcon de côté avec jally, le petit dôme, le joli Chatri  (kiosque) sous le toit. Aujourd’hui, la compagnie devenue LSI a été nationalisée à l’indépendance.

Un peu plus loin sur la rue, South India house, de style Edwardian offre une décoration bien différente presque rococo sur une façade toute simple.

Le Long de Beach road face au marché birman

Cette rue était l’avenue de parade bordée d’arbres et de luminaires le long de la plage avant le percement de Marina et le déplacement des clubs de plage. Avec l’ouverture de la gare, les Britanniques construisirent le long de la belle promenade, leurs plus beaux bâtiments. Les nouveaux arrivants, marchands, marins pouvaient y admirer la splendeur du Raj à travers de somptueux édifices. Aujourd’hui la vétusté et l’incurie font pratiquement oublier la grandeur indo-sarracénique de ces façades en relief. En diffère, celle du Metropolitan Magistrate court, pour les cas civils. Construite en 1892, sa façade plate ornée de mosaïques atteste combien les Britanniques consacraient un minimum d’argent pour rehausser un édifice pour les locaux.

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