Les immanquables de Hampi

Cette semaine, je vous retrouve pour vous parler des visites immanquables de Hampi. La semaine passée, je m’étais penchée sur quelques aspects pratiques. Ici, vous trouverez trois grands ensembles, visitables au pas de course ou, si vous êtes véhiculés, en une grosse journée.

watchtower in Zenana enclosure

 Pour bien en profiter néanmoins, je vous conseille d’étaler sur deux jours la découverte des zones nord et sud. N’oubliez pas si vous avez un budget serré que les deux temples plus musée qui requièrent un billet (groupé 600rp) s’étendent sur les deux zones. Dans ce cas, gardez la visite des autres temples pour le jour suivant.

paysage de rochers

Temple Virupaksha

C’est ici que s’arrêtent le bus et en général les tuk-tuk.  Celui-ci n’est pas payant et il regorge d’animation. Fondé au VIIIème siècle, puis agrandi sous les Vijayanagar, ce serait le plus ancien temple de la ville.  C’est toujours un lieu de pèlerinage même depuis la destruction de la ville. Il regroupe de nombreux petits temples antérieurs. Un long portique y mène depuis le parking et correspond au marché ancien. On y entre par une grande Gopuram puis une grande cour rectangulaire. Une plus petite Gopuram de 1510 mène à une loggia hypostyle. Sur le côté une cuisine commune.

Une autre cour mène au mandapa de Shiva, origine du temple. Le plafond du mandapa central (salle à piler au milieu de la cour) est peint. Les piliers sont ornés de yalis, ces montures mythiques à tête de lion, caractéristiques de l’art Vijayanagara. La Gopuram Nord ouvre sur le réservoir et la rivière. Le temple reste très actif et fréquenté avec son éléphant.

Temple Virupaksha

La colline Hermakuta et ses deux Ganesh monolithiques

Au sortir du temple, on peut grimper sur les dalles de granit vers la colline Hermakuta. De nombreux petits sanctuaires plus anciens que les Viyajanagara s’y succèdent. Une jolie vue englobe les champs alentours. On y déniche deux énormes statues monolithes de Ganesh, dans de petits édicules. De l’autre côté de la colline s’étendent les portiques du marché de Krishna « Bazar ».

Il ne faut pas chercher ici de bazar moderne mais des colonnades qui abritaient autrefois les commerces. Au milieu du marché se trouvait un Pushkarani, réservoir d’eau.  En face de ces portiques, de l’autre côté de la route, se trouve le temple de Krishna assez abimé.  Au sud de ce temple, de petits sanctuaires abritent le lingam de Shiva (3m de haut) et le plus grand monolithe Yoga-Narasimha, avatar homme-lion de Vishnu Narasimha en position de yogi de près de 7m.  Ces deux derniers sont tout à fait impressionnants par leur taille et leur qualité sculpturale.

Autour du temple Achyutaraya

En longeant la rivière Tungabhadra et en reprenant le portique du marché devant le temple Virupaksha, on atteint un grand monolithe de Nandi au museau abimé. Puis en cheminant dans les rochers ou le long de la rivière, on atteint un peu au milieu de nulle part, le temple Achyutaraya (1534). Ce temple fait face au Nord et est dédié à Vishnu comme en attestent les reliefs sur les colonnes. C’était un des lieux importants de la ville. Depuis la Gopuram d’entrée, la rue bordée de colonnades, dite « des courtisanes » mène à la rivière.

Le chemin de droite continue à travers les petits édifices religieux jusqu’au temple Vittala en passant par une belle porte et la balance du roi. En contrebas, un mandapa facilite l’accès à la rivière tumultueuse entre les rochers.

Le temple Vitthala essentiel lors d’une visite des immanquables de Hampi

Pour visiter ce temple il faut prendre ses billets et se munir de patience car la foule se presse devant la billetterie, et les petites voitures de golf prête à éviter 10mn de marche.  C’est le temple le plus sophistiqué d’Hampi malheureusement il est très refait. Vitthala est une des formes de Krishna. Une Gopuram permet d’accéder à la grande cour avec ses mandapas à piliers magnifiquement sculptés et son fameux chariot, en fait sanctuaire à Garuda. Ce chariot figure d’ailleurs sur le recto des billets de 50rp.

Juste à l’extérieur de ce magnifique temple malheureusement souvent bondé, une autre allée bordée de portiques ramène à la route. Elle passe devant un temple à Shiva, un réservoir et un joli petit temple dont les yalis sont remplacés par des chevaux, ceux des marchands qui s’y arrêtaient.

Le palais royal

On atteint d’abord les bains de la Reine, ravissant pavillon à bassin, de style indo-islamique. Les petites coupoles du corridor qui entoure le bassin diffèrent toutes les unes des autres. Il s’agit certainement d’un des lieux les plus raffinés de l’antique cité de Hampi.

On accède alors au Palais royal dont il ne reste que peu. L’ensemble a subi d’importantes rénovations. Néanmoins on y voit la terrasse du roi, Mahanavami platform, certainement une grande salle d’audience dominant la ville. Le socle est décoré de reliefs illustrant la vie au 14e s ainsi que les activités royales. Plus loin, le souterrain pouvait servir de trésor. On découvre surtout l’aqueduc, qui alimente le réservoir à degrés, très photographié. Découvert en 1980, il a subi une véritable reconstruction. Juste derrière, s’ouvre l’énorme complexe de bains.

Le complexe Zenana, l’un des immanquables de Hampi

En continuant, on atteint l’enceinte des femmes Zenana, dernière partie des monuments payants. Il s’agit certainement de l’ensemble de monuments les plus immanquables de Hampi. A l’abri de murs cyclopéens, le grand enclos regroupe le très élégant bâtiment du lotus sur deux étages. Avec ses arcs polylobés et ses dômes, il apporte les raffinements indo-islamiques au complexe architectural. Si l’on ne connait pas sa fonction, ce mélange d’architectures hindoue dans la forme pyramidale et d’éléments islamiques est très réussi.

Dans le même enclos, la salle de garde ou trésor abrite une partie des collections du musée archéologique. Deux bâtiments en ruine et trois tours de guet indo-islamique se dressent non loin. Une porte mène à un second enclos où se dresse le grandiose étable des éléphants. Dans cette rangée de 11 pièces, tous les dômes diffèrent. A la perpendiculaire, le bâtiment des gardes, articulé autour d’une veranda, accueille lui aussi des collections lapidaires du musée. Pour ceux qui disposeraient de plus de temps, la visite de Hampi recèle d’autres jolies découvertes. Pour vous en parler je vous propose de nous retrouver la semaine prochaine.

Hampi pratique

Ce “Hampi pratique” est le premier d’une petite série de 3 articles pour profiter au mieux de votre séjour. Alors avant de partir, comptez au moins 3 jours sur place auxquels vous rajouterez les trajets Allers-retours, assez longs et fastidieux.

Plusieurs options pour gagner Hampi = le train de nuit jusqu’à Hospet, la route ou l’avion jusqu’à Ballari et 2h de route ou Hubli et 3h de route. La haute saison s’étend de novembre à Mars.

Dans ce premier article sur Hampi, je vous donne quelques conseils pratiques, pour optimiser votre séjour. Hampi est en effet l’un des sites archéologiques les plus importants d’Inde, non par son ancienneté mais par sa taille. Contemporain de notre Renaissance ou des sites Mayas tardifs ou Aztèques, il impressionne essentiellement parce qu’i s’agit d’une ville entière. Enorme, détruite et abandonnée lors de la conquête musulmane et redécouverte seulement au 19e, fouillée puis préservée grâce à la protection de l’Unesco.

Se déplacer à Hampi de manière pratique

Le site, énorme, s’étend sur plus de 25 km. Il comprend 1500 monuments essentiellement hindous et de style dravidien. Il est possible de louer une bicyclette près de l’office du tourisme et au temple Virupaksha.  En revanche, attendez-vous à porter votre vélo la moitié du temps sur les rochers, le sable ou les zones interdites aux véhicules.

En fait, le tuk-tuk, le taxi ou les pieds sont plus simples. Certains louent un taxi à la journée. Mais on peut aussi prendre le bus depuis Hospet puis marcher et utiliser des tuks-tuks sur les longs trajets. Dans ce cas il suffit de se rendre au terminal de bus de Hospet. Les bus pour Hampi sont indiqués en Anglais (quai 12) et le trajet coute entre 15 et 20rp. En revanche le bus peut être bondé et part à des heures erratiques. Néanmoins, l’expérience est haute en couleurs.

Traverser la rivière

Concernant Hampi, autre conseil pratique. La rive gauche offre pas mal de logements, certains assez corrects. Cependant, il vaut mieux être véhiculé sans quoi vous risquez de passer des heures fastidieuses à essayer de traverser la rivière. En effet, le seul pont oblige à de vrais détours. Deux passages de ferry existent. Attention dans la série ferry, mieux vaut vous attendre à une traversée de type boat-people sans horaires réels. Le tarif de traversée est de 20rp/ pers mais vous risquez de vous faire extorquer beaucoup plus. Je vous mets donc la photo du panneau qui annonce les 20 rp. Le premier point de passage se trouve à proximité temple Vittala, le 2nd derrière le temple Virupaksha. La traversée est courte mais folklorique.

Les sites payants à Hampi, conseil pratique

Hampi, ville fortifiée fondée peut être au IIIe siècle, plus vraisemblablement aux VIème ou VIIIème siècles. Construite sur des rochers de granit rose autour de la rivière Anegundi, elle a connu son apogée entre les XIV et XVIème siècles. Puis elle fut envahie et détruite en 1565 par les sultanats du Deccan. C’était une ville prospère et puissante que les chroniqueurs perses ou portugais de l’époque considéraient comme la seconde plus grande du monde après Pékin. Les ruines ont été redécouvertes en 1800. Les fouilles continuent dans ce site déclaré sur la liste de l’Unesco en 1986 et considéré comme la capitale de l’empire Vijayanagara. Seuls les monuments principaux (temple Vittala, étables des éléphants et enclos Zenanal) et le musée sont payants (600rp pour les étrangers). Ils ouvrent de 8.30 à 5pm. Le ticket pour les 3 sites se prend à la journée. Bonne nouvelle on peut l’acheter en ligne pour éviter la queue ! Voici le site sur lequel acheter votre billet, en ligne comptez un petit rabais de 10%.

Se nourrir et se loger à Hampi

Si une petite faim ou une petite soif vous assaillent, le mieux est de regagner un des grands parkings Vittala ou Virupaksha. Vous y trouverez des petits stands de fruits, boissons, snacks. Mieux encore, le village de Kamalapur offre quelques troquets sommaires.  Rien de transcendent, mais de quoi éviter l’évanouissement. En revanche, pour les fins gourmets, Hampi n’est pas la meilleure destination.

Si vous n’êtes pas un routard aguerri, préférez l’un des hôtels de Hospet ou de la rive gauche. En étant conscient des problèmes de transports, ne visez pas trop bas. L’hôtellerie coute cher autour de Hampi. De fait, Il vaut mieux loger à Hospet que dans les Guest House très sommaires autour du site archéologique.

Je vous donne Rendez-Vous la semaine prochaine pour plus de détails de visites.

Sari, kurta, dhoti

Que mettre ou ne pas mettre en Inde du Sud ?

Grande question quand on annonce son départ en Inde : tu vas t’acheter un sari ? suivie d’une question plus anxieuse, tu t’habilles comment ?

Car la vérité c’est que le sari n’est pas le seul vêtement indien et que sauf à assister à une cérémonie officielle, il n’est pas forcément bienvenu pour une européenne. Alors que mettre, et surtout que ne pas mettre ?

Voici un petit lexique pour vous mouvoir comme un poisson dans l’eau une fois lâché dans un magasin de vêtements indiens. Car il n’est pas toujours facile de s’y reconnaitre dans la profusion textile locale.

Le sari, roi des vêtements féminins

On retrouve des saris sur des sculptures dès le début de notre ère. Signe que la mode n’a jamais évolué en Inde ? Il s’agit d’un bête rectangle de 6 à 10m sur 1,20m très semblable à la toge romaine. La pudibonderie victorienne a drapé ce tissu autour d’un jupon assorti et d’un corsage serré. On le remonte sur le torse et on le passe par-dessus l’épaule. Du coup on peut utiliser le pan libre ou pallu contre le soleil, pour se cacher ou s’essuyer les babines post prandiales. Dans les faits, on enroule son sari selon des spécificités locales qui permettent à chacune de montrer sa provenance.

Le sari est essentiellement porté par les femmes mariées. Dans sa version bon marché en coton ou matières synthétiques teintes industriellement, pour les plus pauvres, en soie rebrodé de fils métalliques ouar les plus riches lors de cérémonies.

La sari peut suivre la mode. Pour cela je ne suis pas très bon juge. En revanche j’ai bien noté que la qualité du textile et des motifs, peinturlurés ou au contraire brodés, appliqués, sont de bons indicateurs de la classe socio-économique. Pour faire bref, inutile de s’acheter un sari en polyester pour un mariage ou pour briller en société. En fait, pour les occidentales en dehors des mariages, il vaut mieux s’habiller simplement en chemise longue et pantalon

Salwars et autres vêtements que le sari

Le Salwar   est un pantalon bouffant, un peu l’équivalent du sarouel oriental. Il est très large et il vaut mieux ne pas perdre le petit cordon sous peine de ne pas pouvoir le tenir. En Inde il se porte avec la kamiz ou kurta, une chemise longue jusqu’aux hanches voire plus. Elle est munie de manches longues et fendue sur les côtés. Il vaut mieux éviter de la porter sans rien en dessous sous peine de se sentir déshabillée par des regards hostiles ou au moins inquisiteurs. Néanmoins, un caleçon long fait généralement l’affaire.On peut accessoiriserl’ensemble d’une duppata, large foulard en général de la couleur et du motif du pantalon. Il peut pourtant reprendre la chemise, tout dépend du tissu, du couturier, de l’humeur du capitaine.

Jupes, écharpes

La Ghaghra est une ample jupe plissée, reprise par les soixante-huitardes de Lozère et d’Ariège. Ici elle se porte à la cheville, elle-même garnie de bracelets à grelots et avec une Kurta, tunique courte. Pratique pour jouer les Esmeraldas, les spectacles de Bollywood mais pas idéale pour grimper dans les arbres. On en voit néanmoins assez peu dans les rues de Chennai où les jeunes filles arborent la panoplie kurta -caleçon alors que les femmes mariées s’enroulent dans leurs saris aux plis inversement décroissants à ceux de leur ventre.

On peut compléter l’ensemble avec un châle ou pashmina brodé ou non et jeté négligemment sur l’épaule. Autour de la tête on vous demandera immédiatement si vous êtes musulmane, sans comptez que vous risquez de mourir de chaud.

Pas de sari chez les Messieurs 

  • Chez les Messieurs, le plus pauvres et traditionnels sont vêtus de dhoti, pas très facile pour l’occidental en RV d’affaire. Non élucidé à ce jour en ce qui me concerne, ce que l’on porte ou non en dessous, visiblement pas grand-chose chez les plus pauvres. Le Khadi  lui est le tissu de laine ou coton filé main et symbole de résistance non violente. Il a donné son nom au mouvement de résistance lancé par Gandhi en 1924. Pas idéalement pratique à porter dans le métro parisien sauf si vous avez un message à faire passer.
  • Nehru lui a lancé une mode élégante, avec la version raccourcie du sherwani, le long manteau de l’aristocratie musulmane. Son Ashkan, veste col mao ou Nehru (CQFD) se boutonne sur le devant, près du corps sur le churidar. Je parle ici du caleçon coupé en biais épousant le mollet et tombant sur les chevilles. Le sadri, gilet sans manche à col Nehru, complète l’ensemble.
  • Les locaux, (et les Aurovilliens) portent aussi des kurta (longue tunique à col ras et manches longues et paijama (vêtement de jambe) caleçon large flottant à la cheville. On le complète avec le Gamcha petite écharpe portée sur les épaules ou en turban et qui permet d’éponger le visage. Le Pagri ou turban en mousseline de coton lui, protège du soleil

 Si vous partez à Chennai pour affaire, la tenue occidentale suffira néanmoins.

Ce que vous pouvez tout à fait éviter

Il est certainement tout aussi important de savoir que ne pas mettre lorsqu’on part en Inde et particulièrement dans un état aussi traditionnaliste que le Tamil Nadu, alors quelques conseils qui sentent le vécu.

  •  Première précaution, pas de Nightie. La robe tee shirt si confortable a beau être bien décente, on vous zieutera comme si vous veniez de tomber de votre lit.
  • Surtout évitez les décolletés par en bas ou par en haut, ni short, ni dos nu, ni épaule à l’air, ni poitrail en devanture, rien qui attire le chaland. Des textiles légers larges et longs permettent en outre de s’aérer
  • Attention aux motifs ils ont une signification et peuvent donc porter des messages pas si subliminaux. Mangue ou poisson symbolisent la fertilité, les perroquets, la passion. Portez les en connaissance de cause.
  • Evitez les motifs trop vus, les Indiens adorent la nouveauté et changent autant que possible de tenue, question de prestige et de statut. Les guenilles à la mode en occident, jean troués, chemises trop grandes ne les impressionnent pas forcément dans le bon sens.
  • Enfin attention aux couleurs. Le blanc est la couleur des veuves, le rouge celle des mariés, le rouge et noir celle du Parti au pouvoir dans le TN. Vous n’êtes donc pas obligés de vous vêtir en drapeau partisan, ou au moins sachez ce que vous faites. Le bleu chassant les insectes est utilisé par les agriculteurs et artisans, le vert est la couleur des fêtes.

Bref comme vous le voyez, il n’est pas si facile de s’habiller au royaume des textiles !

Autour de Chennai

5 idées d’excursions

métier à tisser Dakshinashitra

Que vous soyez autour de Chennai pour 3 jours ou 3 ans, voici quelques idées si vous vous sentez asphyxié(e) par le centre-ville.

Au Nord de Chennai

Pulikat

Cet immense lac se trouve en fait en Andhra Pradesh, c’est un beau lieu d’excursion à la journée depuis Chennai. On traverse de jolis villages puis des champs avant d’atteindre le grand plan d’eau. Il est possible de se garer au petit marché aux poissons typique. De là, il suffit de se mettre d’accord avec des pêcheurs pour partir en balade sur le lac. Entre janvier et début mai, le lieu devient une colonie d’abord pour les cigognes puis pour les flamants roses.

Une fois accompli votre reportage photo, vous pouvez reprendre la voiture traverser le pont pour vous rendre au petit village et à la plage, sale, sur la mer. A l’entrée du village se dressent les vestiges d’un campement néerlandais dont ne subsiste que l’église.

Marchés de Koyambedu et de Kasimedu

Malgré sa multitude de marchés multicolores, Chennai offre des expériences sensorielles hors norme avec ses deux grands marchés. Sensibles aux odeurs fortes, s’abstenir !

Kasimedu est l’un des villages les plus pauvres intégrés à l’agglomération de Chennai. Il s’articule entièrement autour de l’énorme marché à ciel ouvert qui se tient aux aurores. Sur près de 2km les bateaux verts accostés servent de toile de fond à la vente, assurée par les femmes de marin. S’il y a beaucoup de marchés aux poissons dans Chennai, celui-ci est le plus connu et certainement le plus renommé et le plus coloré, un must pour les photographes. Le village lui-même à été construit pour les pêcheurs sous MGR, il émane d’une volonté officielle de leur donner un cadre de vie décent.

Koyambedu le grand marché aux fleurs, aux légumes et aux fruits de Chennai, une sorte de Rungis version tropicale. Des grands bâtiments de granit accueillent la merveilleuse profusion florale destinée aux temples et cérémonies, alors que le marché alimentaire voit se presser une foule bigarrée interrompue par les vaches et les deux roues.

Autour de Chennai et au Sud

Dakshinashitra

Ce musée, dit vivant, est avant tout un village reconstitué de maisons typiques de tout le sud de l’Inde. Il est situé à 25km autour de Chennai sur la route côtière (ECR) et son nom signifie « image du Sud ». On y retrouve des maisons de bois typiques du Kerala, et des maisons à cour tamoule. C’est à la fois un musée du folklore, une exposition d’architecture et d’arts locaux mais aussi une scène de spectacle. La mission consiste à promouvoir et préserver les arts du sud de l’Inde de manière aussi ludique que possible. Cette ONG et projet de Madras Craft Foundation est ouverte au public depuis 1996.

Les 18 maisons de style vernaculaire que l’on peut visiter contiennent le plus souvent des meubles ou des explications. Vouées à la démolition, elles ont été rachetées, démontées transportées et reconstruites par des artisans locaux. De la hutte de pêcheur, à la belle maison en bois keralaise ou à la maison partagée typique du Tamil Nadu avec sa grande cour intérieure, on passe d’un style à l’autre. Les spécificités et originalités régionales apparaissent ainsi de manière lisible. Outres des meubles, certaines maisons donnent des renseignements sur l’économie locale, le tissage, les liens commerciaux ou la vie des habitants. C’est un très joli lieu de sortie qui peut se cumuler avec une sortie créative pour les enfants, en fonction des activités proposées par le musée à ciel ouvert.

Cholamandal, le village des artistes autour de Chennai

Si vous cherchez une idée de sortie calme et artistique autour de Chennai en voici une à la sortie de le ville, non loin du premier péage.  C’est le village d’artistes fondé en 1966. Ces artistes, mis en lumière par l’école d’art, habitent les jolies maisons qui entourent la galerie ouverte il y a une dizaine d’années. Les cabanes initiales se sont peu à peu transformées en jolies maisons entourées de jardins de sculptures.

Kovalam Beach

 C’est la première grande et belle plage au sud de Chennai avec un site de surf.

Plus loin vous pouvez aussi aller jusqu’à Kanchipuram. Ou Mahäbalipuram et aussi temple des Aigles et Gingee.

Aux Français de Pondichéry

Un des charmes de la ville blanche est d’y croiser les noms des Français de Pondichéry écrits en Français. Ils évoquent bien quelque chose, mais quoi ?

Voici un petit récapitulatif de ces célébrités parfois oubliées. Et je ne parlerai pas du soldat indien qui a combattu aux côtés des Français dans les tranchées. Un joli monument art déco le long de la Promenade l’honore. Mais j’évoquerai ici ces hommes venus de l’hexagone qui ont contribué à façonner la ville parfois de manière contestable. Alors qui sont ces hommes ?

Les gouverneurs Français de Pondichéry

François Martin

Premier Gouverneur de Pondichéry., François Martin 1634-1706 arriva à Pondichéry une première fois en 1674, un an après la création de la Compagnie des Indes orientales. Il fut appointé premier Gouverneur général de la colonie naissante alors réduite à un hameau. Puis, il revint après l’occupation hollandaise. Il agrandit alors le camp. il y agrégea des villages avoisinants et mit en place le plan en damier typique des villes coloniales. Enfin, Martin fit de Pondichéry le siège des opérations françaises en Inde. Il y mourut et fut enterré dans le Fort Louis qu’il avait fait ériger. Brulé par les Anglais en 1761, celui-ci se trouvait à l’emplacement de l’actuel Parc Bharathi.

Pierre Benoit Dumas

Celui-ci, il nous semble le connaitre. Et pourtant non, la rue Dumas de Pondichery ne tient pas son nom du célèbre Alexandre. Elle n’a rien à voir avec le Comte de Monte Christo ou les Trois mousquetaires mais tout à voir avec le gouverneur de Pondichéry et de la Réunion, Pierre Benoît Dumas (1668–1745) .

Joseph-François Dupleix,

Outre la station de Métro parisienne, on découvre à Pondichéry un gouverneur énergique et ambitieux qui a transformé le village de pêcheur en port.  De fait, Joseph-François Dupleix (1697-1763) a fondé les prémices de la colonisation européenne sur les décombres de l’Empire moghol. Une statue l’honore sur la Promenade, une rue porte son nom ainsi qu’un café. On le retrouve également dans la maison de Ananga Ranga Pillai, son Intermédiaire, confident local et interprète. Ce dernier facilita le travail de Dupleix dans la colonie. Le Français fut un contemporain et rival de Robert Clive, héros sans scrupule des débuts de Fort Georges, aujourd’hui Chennai.

Charles Joseph Patissier, Marquis de Bussy-Castelnau

Bussy  qui répond aussi au nom évocateur de Patissier (1720 –1785) fut lui aussi Gouverneur Général en 1783 – 1785. Après avoir été ditingué par Dupleix il se chargea de la reprise en main de la ville en 1748. Il coordonna les opérations militaires avec Suffren, durant la guerre d’Indépendance américaine

Jean Law de Lauriston

Pondichéry est la transcription française du Puducheria , rapporté par les premiers explorateurs portugais. Ce qui signifie « village neuf ».  Ce village a changé de mains à maintes reprises. Après avoir été pris par les Britanniques, il fut récupéré une première fois par les Français. Jean Law de Lauriston, 1719-1797, neveu du financier écossais John Law, y fut deux fois Gouverneur. Il fut à l’origine de la reconstruction de la ville, en 1765, après sa destruction par les Anglais.

André Julien, Comte Dupuy

 Gouverneur General de Pondichéry de 1816 à 1825, André Julien, Comte Dupuy (1753-1832) récupéra les territoires conquis par les Anglais pour la troisième et dernière fois, ce après le Traité de Paris.

Des Français de Pondichéry qui ont laissé leur empreinte dans la ville

Sri Aurobindo et la “Mère”

Le saint homme et artisan de l’indépendance, en venant fonder un ashram et y passant une bonne partie de sa vie commune avec la « mère », a laissé une empreinte indélébile dans la ville. Mira Alfassa, libano- égyptienne et française a fondé Auroville en 1968. Cette communauté à 6km de Pondichéry a étendu son influence depuis. Sa présence se fait sentir à travers le trust qui rachète peu à peu la vieille ville et y installe ses boutiques et bâtiments gris contrastant avec la jolie teinte miel des maisons coloniales.

Mahe de la Bourdonnais.

Cet officier naval s’est illustré en prenant Mahé sur la cote du Malabar (Kerala). Il a conquis ses lettres de noblesse en tant que gouverneur de l’Isle de France (aujourd’hui IIe Maurice) puis de l’Ile Bourbon (La Réunion) avant de s’attaquer à l’Inde où sa rivalité avec Dupleix l’a  malencontreusement mené à la Bastille. Accusé faussement de trahison et de corruption, il a été réhabilité post mortem. Si Pondichéry ne lui rend hommage que par une rue, Paris lui a dédié une magnifique avenue du 7ème arrondissement.

Robert Surcouf

On ne s’attend pas forcément à rencontrer le célèbre pirate breton ( 1773-1827), esclavagiste et homme d’affaire, à Pondichéry et pourtant ses opérations dans l’Océan Indien pour saper la marine anglaise lui ont garanti une jolie rue dans le quartier français.

Pierre André de Suffren de Saint-Tropez,

Habitués du 15ème ou du 7ème arrondissement parisiens, saviez-vous que le provencal amiral, bailli de Suffren, avait été un amiral, habile tacticien et stratège hors pair dans les batailles qui l’opposèrent aux Anglais dans les eaux indiennes durant la révolution américaine ?

Édouard Goubert,

Goubert a donné son nom au marché établi en 1826. Il fut maire de Pondichéry puis premier ministre du territoire au début des années 1960. Il œuvra pour le statut des habitants.

Eugène Desbassayns de Richemont

Cet administrateur (1800-1859) a été Gouverneur Général de Pondichéry entre 1826 et 28. Il a fondé en 1828 le lycée français. Le Comte de Richemont a donné son nom à une rue mais a aussi ouvert des écoles indiennes et la bibliothèque publique, ainsi que le marché central aujourd’hui nommé Goubert.

Romain Rolland

Bien que prix Nobel de littérature en 1915 Romain Rolland n’est qu’un vague souvenir en France. En revanche ses amitiés avec Tagore et Gandhi lui ont garanti une ravissante rue bordée de bougainvilliers dans le centre de la vieille ville.

Victor Schoelcher

Une jolie statue de celui qui a abolit l’esclavage en 1848 orne la Promenade. Sur un piédestal de marbre noir, la tête de ce grand libéral surmonte un petit relief montrant un esclave libéré.

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Le cinéma indien

L’objet de cette nouvelle rubrique sur le cinéma indien, nommée de manière aguichante « M. Bollywood » est de donner des exemples et avis sur la fantastique production cinématographique locale. Le mot valise composé de Bombay et de Hollywood concerne en fait uniquement la production du Nord de l’Inde tournée dans les studios de Mumbai. Mais en Occident le terme est un fourre-tout pour désigner l’ensemble très divers des cinémas régionaux.

Le Nord, territoire de Bollywood

Le cinéma est arrivé en Inde par Bombay. Maurice Sestier , chef opérateur des Frères Lumières a y en effet débarqué en 1896. A l’époque. les inventeurs du cinéma Lyonnais avaient eu l’idée d’envoyer des chefs opérateurs à travers le monde. Leur but était double, Il s’agissait d’une part de rapporter des images nouvelles de leurs voyages, d’autre part de vendre leur savoir-faire et leur matériel sur de nouveaux marchés.

Très rapidement, le cinéma tourné à Mumbai se calque sur les énormes productions hollywoodiennes en leur donnant une touche indienne, qualifiée de masala. Ce terme fait allusion aux mélanges d’épices dans la cuisine indienne. Chaque film utilise les mêmes ingrédients scènes d’action, humour, amour, chants, danses. La différence se fait dans le dosage et la répartition des personnages, souvent des stars issues de véritables dynasties cinématographiques.

Pour autant, Le cinéma indien ne se limite pas à Bollywood. Ainsi le Tollywood du cinéma bengali regroupe les films tournés dans les studios de Tollygunge de Kolkota. 

Le cinéma indien du sud plus historique

 Le reste de la pléthorique production indienne provient des différentes régions. Chacune se montre fière de sa langue, de sa musique , de ses danses, de ses stars et de l’originalité de ses créations. Ce, même si les ingrédients se ressemblent souvent. Car quoique indépendant, le cinéma régional peut manquer d’originalité. On peut même le trouver parfois simpliste dans sa démonstration constante du triomphe du bien sur le mal.

D’une manière générale, le cinéma du sud est assez conservateur. Il raffole des vastes fresques mythologiques, historiques, familiales voire, quoique plus rarement, sociales.  Les productions du Sud puisent à pleines mains leur inspiration dans les épopées du Ramayana et Mahabharata . Les personnages répondent aux doux noms des divinités du panthéon hindou. Ces productions restent ainsi plus traditionnelles avec des thématiques et personnages empruntant davantage aux mythes.

On peut néanmoins distinguer trois lieux de production importants accompagnés d‘une importante industrie de doublage permettant à chacun des films de rayonner sur l’ensemble des états du Sud .

  •  Sandalwwood s’utilise pour les films en Kannada tournés dans le Karnataka (Bengalore). Les histoires sont souvent tirées des grandes épopées, de la mythologie
  • Dans le Kerala, les films sont tournés à Mollywood en malayalam. Ils tirent plus vers le cinéma d’auteur, vers les problématiques sociales.
  • Kollywood désigne le cinéma du Tamil Nadu, jadis filmé dans le quartier de Kodambakkam. Je dis jadis car les studios ont désormais déserté le centre de Chennai.

Encore une fois, les thématiques du sud sortent souvent des grandes épopées et mettent en scène des héros indomptables et quasi immortels. Le grand public regarde ces films mythologiques un peu comme s’il allait au temple. Il admire des réincarnations divines et applaudit à leur bravoure et leurs exploits. On n’est donc pas très étonnés que Les films du sud ne récoltent pas de récompenses internationales mais beaucoup de succès localement.

Le cinéma indie ou cinéma dit « parallèle »

Ce type de film « indépendant » et à résonance sociale n’est pas le plus courant, bien évidemment, car une grande partie du public n’est attiré que par le cinéma populaire. Il faut dire qu’en Inde, le cinéma a conservé sa magie.  Le héros continue d’incarner les espoirs et les rêves du public en très grand et les films jouent le rôle de soupape en faisant oublier, le temps d’une séance, l’injustice et l’oppression. Les salles, spacieuses, et en général, relativement insonorisées, (surtout dans les centres commerciaux) offrent une rupture dans un quotidien synonyme de promiscuité et de difficultés. Le cinéma conserve donc un attrait magique.

Cependant, de plus en plus à Mumbai, voire au Kerala, apparait un cinéma indien social avec des tentatives courageuses et des sujets plus modernes

Musée du Cinéma, Chennai

Voici un spécial Musée du Cinéma à Chennai. Les lecteurs les plus avertis l’auront certainement déjà subodoré. Le Monsieur Cinéma du Petit Journal dit aussi Greg le cinéphage, est ma meilleure moitié. Il a d’ailleurs opéré sa mue pour devenir M Bollywood sur ce site.

Pour changer des salles obscures, Monsieur Cinéma est parti en quête du musée chennaiote du 7e art. Il porte le nom de AVM Heritage Museum en hommage aux studios aujourd’hui fermés et disparus dans Chennai.

On peut accéder au musée depuis le Métro Vijaya. Celui-ci se trouve dans un centre commercial tout moderne et proche du temple du même nom, Arulmigu Vatapalani Murugan . De là, on rejoint Arcot Road pour rechercher les studios.

La vaine quête des studios

Le cinéma du sud étant très prolifique, Greg le cinéphage pensait trouver des grands espaces. Il s’attendait donc à trouver décors, starlettes au maquillage dégoulinant, caméras. Malheureusement, il a fait chou blanc. Il parait que les studios ont déménagé dans la campagne pour cause d’inflation immobilière au centre de Chennai.

En effet, au lieu de studios, seul le sigle AVM permettait d’imaginer que les lieux avaient pu importer pour le cinéma. Et de fait, ils avaient abrité l’âge d’or de la création cinématographique locale. Malheureusement, celle-ci a migré hors de la ville. De ce fait, les spéculateurs immobiliers se jettent avec gourmandise sur ces quartiers relativement centraux. Ceux-ci attendaient ces vastes terrains le couteau ou plutôt le carnet de chèque entre les dents. L’année dernière encore, quelques techniciens oubliés se consolaient dans les terrains vagues et les chantiers.

Car en cherchant un peu, il existe nombre de petits studios de doublage et d’effets spéciaux dans la ville. Pourtant l’idée de se rendre aux ex studios AVM  n’était pas si mauvaise. En effet, en avril 2023 un petit musée du cinéma a effectivement ouvert à Chennai.

Le Musée du Cinéma de Chennai

C’est bien dans le quartier historique de cette cité du cinéma disparue que le Musée du Cinéma s’est installé dans un studio rescapé. Le quartier se voit pour le reste envahi par des immeubles flambants neufs sur un boulevard un peu pourri.

Ne vous attendez pas à y trouver de grande reconstitution. Il manque un peu d’explications. Cependant, on y trouve les voitures conduites par les grands acteurs d’hier. Elles coexistent avec les bobines à l’origine de grands succès locaux.  Le propos ici est d’exposer les bobines et machineries utilisées pour tourner les films. C’est surtout l’occasion de montrer des dizaines de voitures utilisées par les grandes stars locales.

Alors si vous ne vous intéressez pas aux voitures anciennes ou aux films du Sud, passez votre chemin. Si, en revanche, l’évocation par de petits extraits de films locaux utilisant les voitures présentées vous tente. Si, les voitures elles-mêmes vous plaisent ,c’est l’occasion de passer un après-midi sympathique. Il est préférable de connaitre a minima quelques vedettes tamoul du grand écran. Vous vous formerez un peu aux noms et grands principes du cinéma local.

Mais une fois que vous aurez compris que Kollywood raffole des films de justiciers au grand cœur avec beaucoup d’action, des personnages joviaux et des stars indéboulonnables dans leur rôle de grand gentil, que les films sont ponctués de scènes dansées chantées peut être un tantinet plus folkloriques que dans la production du nord, vous aurez déjà une bonne idée de ce que vous allez voir.

reels at cinema Museum Chennai

 Laissez les grandes reconstitutions historiques et les films à très gros budget au Karnataka. Vous comprendrez ainsi mieux ce musée sympathique coloré mais pas immense. Des affiches concluent la visite de ce grand hangar converti en musée ou plutôt en hommage aux studios AVM.

6 lieux indo-sarracéniques à Chennai

 Cette fois je vous propose des lieux indo-sarracéniques pour faire suite à l’article précèdent sur l’architecture indo-sarracénique. En effet, Chennai offre un joyeux mélange de styles. Les constructions de type néo vénitiens le dsputent aux édifices maures, au palladianisme, ou au gothique français. Cet agrégat d’éléments indiens et européens correspond à la période victorienne, très amatrice de pastiches. Globalement les gares, les universités d’époque britannique adoptent cet éclectisme teinté d’exotisme. Alors où commencer l’itinéraire indo-sarracénique à Chennai ?

High court, la tour la plus haute

Chepauk Palace , premier des lieux indo-sarracéniques.

Ce palais tombe malheureusement en ruine. Néanmoins, il marque l’acte de naissance et donc l’un des lieux indo-sarracéniques incontournables. Construit en 1768, pour le Nawab d’Arcot , il cache aujourd’hui son délabrement derrière des palissades et une façade repeinte. Le nom est cependant bien connu des locaux puisqu’ il évoque le grand stade de cricket qui lui fait face. Cependant, peu de de fans de cricket savent que Chepauk marque les débuts de ce style architectural douteux mais rigolo. Les Nababs furent rapidement déplacés par les colons et relogés au Amir Mahal, dans Royapuram où les descendants de la dynastie vivent encore.

Riipon building, un gros batiment blanc à colonnes

Madras High Court, le quartier de Parrys corner

Le Bovolo de Chennai

Connu pour ses ruelles animées et ses échoppes multicolores, le quartier de Parry’s corner vaut également la visite pour ses merveilles indo-sarracéniques. Encore convient-il de lever le nez en sortant de la gare Chennai Beach. On commence avec l’extraordinaire promenade sur North Beach road. Les marchands et marins y débarquaient et il convenait d’y afficher toute la gloire et la puissance de l’Empire. Si les bâtiments tombent ajourd’hui en ruine, il vaut la peine de regarder l’extraordinaire façade de la Poste ou des banques. On y sent l’influence de Venise et notamment du fameux Bovolo.

YMCA indo sarracénique avec des fenêtres ourlées sur l'esplanade

Si l’on traverse, on tombe nez à nez avec les joyaux de la cour de Justice. Ici c’est une profusion de dômes sculptés et minarets dignes de palais de Maharadjas.

 Madras literary society et musées

Les grandes institutions officielles impériales sont les plus révélatrices du style indo-sarracénique. A Egmore, sur College road, on peut admirer deux sites principaux, l’ancien campus st Georges qui correspond à l’embryon de l’université britannique. On peut encore y visiter la Madras Literary society .

Surtout, les musées du Gouvernement offrent des exemples épatants de la profusion architecturale de l’époque victorienne. Sur le même site se succèdent le fantastique palais ourlé qui sert de galerie d’art, alors que le théâtre rond est une réplique du Albert Hall de Londres. La galerie archéologique s’inspire des pignons de brique de Kensington et de Albertopolis, quartier emblématique de l’époque dans la capitale de l’Empire.

thátre du Musée, inspiré par le Royal Albert Hall
Théatre du Musée du Gouvernement

Autour de la gare centrale

Chowdry, ancienne auberge face à la gare centrale

Là encore nous sommes dans un quartier hautement britannique et…victorien. Quoi de plus emblématiques que les gares pour exprimer la splendeur de l’Empire en effet ?

Autour de Central Railways station, les beaux vestiges architecturaux abondent. Il s’agit d’abord du plus pur éclectisme victorien si l’on peut dire, à savoir la gare centrale néo-gothique tout droit inspirée de ses contemporaines londoniennes du style Saint Pancras. Puis le Rippon Building symbolique siège du gouvernement, l’un des meilleurs exemples de palladianisme sur le sol indien. Le Victoria Hall en brique rouge semble lui aussi directement rapporté des iles britanniques. En revanche, les deux bâtiments qui leur font face le Chawdry, auberge réservée aux Brahmanes, et l’étonnante meringue blanche qui servaient d’hôtellerie pour les voyageurs appartiennent bien au style indo-sarracénique. Je m’amuserai certainement dans les prochaines semaines à écrire un peu sur ce quartier riche en architecture. Un peu plus loin, Egmore Station avec ses coupoles et dômes est une de plus jolies réussites de ce style si unique à l’Inde pendant la période anglaise.

Egmore Station, magnifique batiment éclectique

Anna Salai, Mount Road

Avec Higginbothams, la maison des détectives et tous les bâtiments en ruine, Mount Road marqua le déplacement du centre de la ville Victorienne de st Georges à ce quartier nouveau et en expansion au début du XXème siècle. Nulle surprise que les édifices de style indo-sarracénique soient ici des bâtiments à vocation commerciale.

une facade vénitienne dans Parry's Corner

Senate House dans l’ Université de Madras, et Marina Beach

Dernier soubresaut du style indo-sarracénique, Marina ou South Beach road prit le dessus sur la promenade qui devenait un lieu moins plaisant depuis que les voies de chemin de fer avaient fermé la vue sur la mer. Ce long boulevard en bord de plage se borda de bâtiments éclectiques du plus curieux effet. Parmi les gâteaux à la crème, le Senate Building, central à l’université de Madras étonne avec ses minarets, ses coupoles néo byzantines. Un pastiche complet pour mieux affirmer la puissance de l’empire à son apogée.

Après la mort de Victoria (1901) en effet, l’architecture se fit plus sage et revint à des lignes plus classiques voire à des références réellement locales comme l’immeuble néo dravidien du South Railways building. Les derniers soubresauts anglais consistèrent en des décorations baroques sur des facades classiques, correspondant au style edwardien.

facade édouardienne
la sagesse d’une facade édouardienne dans Parry’s corner

Le style indo-sarracénique

Le style indo-sarracénique désigne les bâtiments de l’époque victorienne en Inde. Sur le sous-continent d’une manière générale, et plus précisément à Madras qui présente une belle collection, on découvre avec amusement les vestiges du Raj. Ce mot hindi désigne le gouvernement colonial britannique en Inde.

 Également nommé indo-moghol ou indo-gothique, gothico-moghol ou néo moghol, ce style affecte essentiellement des monuments publics ou des bâtiments administratifs du Raj.

Formation du Raj

En 1857, la compagnie des Indes orientales qui contrôlait de larges pans du sous-continent, légitimise son pouvoir en prenant sous sa protection l’empereur moghol Shah Alam II. La rébellion des princes indiens et des soldats anglais marque la fin de l’empire moghol. Celui-ci est dissous officiellement par les Britanniques. Les territoires de la Compagnie des Indes sont alors transférés à la couronne qui implante son administration de façon officielle. La colonisation anglaise a débuté.

Pour afficher ce nouveau pouvoir tout en l’inscrivant dans la continuité de l’héritage moghol, Les architectes empruntent leur vocabulaire décoratif à l’architecture indo-islamique laissée par les prédécesseurs et inspirateurs des Britanniques. En revanche, ceux-ci empruntèrent assez peu aux temples hindous.

Vers une architecture officielle

Dans les faits, les colons construisirent des bâtiments contemporains en leur ajoutant une décoration qui leur paraissait locale. En l’occurrence, ils s’inspiraient des descriptions de l’Inde de la fin du 18e siècle. Les architectes anglais mélangèrent joyeusement ces images exotiques avec des lignes plus européennes. De fait, on retrouve le style indo-sarracénique de la Malaisie au Sri Lanka et jusqu’ aux Iles Britanniques avec l’extraordinaire Royal Brighton Pavillon construit pour George IV (1787–1823). Plus largement ,le style néo arabe se retrouve à travers l’Europe et aux Etats Unis . On peut penser ici aux bâtiments près de Brick Lane à Londres, école de mode de style néo mudéjar espagnol.

Le terme médiéval sarracène désignait les musulmans arabophones. Et les Anglais furent les premiers à utiliser le mot indo-sarracénique pour évoquer l’architecture moghole indo-islamique. Ce style mêlant grandeur anglaise et héritage indien aux yeux des colons légitimait pour eux leur présence en ces territoires.

Naissance de l’architecture indo-sarracénique

Le premier bâtiment indo-sarracénique est né à Madras, au Chepauk Palace. D’ailleurs, la ville reste un bel endroit pour voir ce style si particulier qui se retrouva également dans les deux centres de Bombay et Calcutta. Ironiquement, Madras en fut un des centres. Ironiquement, car le Tamil Nadu avait été épargné de la tutelle directe des Moghols. En outre, les détails indo-sarracéniques empruntent souvent à l’architecture rajahsthani ou même aux premières incursions turques. Mais, ils ne font aucunement référence à l’histoire tamoule.

Chepauk Palace

La majorité de ces bâtiments indo-sarracéniques remontent donc à la colonisation britannique, de 1858 à 1947, avec un pic dans les années 1880. Elle correspond en partie aux aspirations britanniques pour un style impérial et proclame le concept inaliénable de l’empire invincible. Il s’agit en général de bâtiments imposants et couteux. Les matériaux et l’ornementation demandent beaucoup de savoir-faire. On compte peu de résidences privées dans ce style.

Ce style est donc à la fois proclamatif et fonctionnel car il visait à accueillir des fonctions nouvelles. Gares, bâtiments administratifs pour une bureaucratie croissante, tribunaux, universités, tours horloges, musées. Ce sont tous des bâtiments de grandes dimensions. Souvent, ils incorporaient des méthodes constructives modernes. Même si les façades étaient souvent de pierre, la structure recourait à l’acier, au fer et au béton, puis au béton armé.

Particularités du style indo-sarracénique

Le style indo-sarracénique se caractérise par des motifs nouveaux mais aussi imités d’écoles d’architecture locales ou régionales, notamment Bengali ou Gujarati

  • Avant-toits en surplomb, souvent soutenus par des corbeaux saillants
  • Dômes en bulbe (oignon) ou toits arrondis.
  • chajja : brise soleil ou avant-toit sur un porte à faux fixé dans le mur d’origine Bengali ou Gujarati
  •  arcs en pointe,  arcs festonnés,  motifs tels les encorbellements avec de riches stalactites sculptés
  • arcs en fer à cheval caractéristique de l’Espagne islamique ou Afrique du nord mais souvent utilisé
  • Couleurs contrastantes des arches (rouge et blanc comme en Espagne )
  •  chhatri avec un dôme, kiosques sur le toit
  • pinacles, tours, minarets, balcons, kiosques
  • Pavillons ouverts ou avec toits bengali.
  • jalis ou écrans ouverts, ou fenêtres travaillées d’origine moghole.
  • Mashrabiya or jharokha-fenêtre écrans.
  • Iwans, en guise d’entrée en retrait par rapport à la façade, sous un arc.

Parry’s Corner

clocher blanc dans le jardin de l église arménienne

Parry’s Corner évoque pour les habitants et les touristes une succession de ruelles et de marchés de rue ou tout s’échange, se vend. Paradoxalement c’est aussi l’un des quartiers les plus anciens et les plus riches en architecture et il est dommage de ne s’arrêter qu’à la frénésie commerciale.

A l’origine du Madras britannique, Fort George et Parry’s Corner

A l’époque de la fondation de Chennai il n’y avait que des villages, parmi lesquels Chenna-Patnam, Madras-Patnam et Mylapore. Les Britanniques à leur arrivée fondèrent la ville de George Town, bientôt connue comme ville blanche et ouvrirent une route nord sud. Puis ils créèrent la ville noire en damier, le long de la plage avec le bazar birman. Une route menant à la prison au nord et à l’ouest à la gare centrale conplétait l’ensemble. Deux villes coexistaient donc, le fort à l’abri des murailles et au nord, la ville nouvelle au plan hippodaméen commerçante et locale avec ses temples et marchés.

 Lorsque la compagnie des Indes Orientales (EIC) grossit, elle eut besoin de comptoirs. Francis Day fut chargé en 1639 de trouver un nouveau port, non loin de l’implantation portugaise de Mylapore. Le commerce lusophone florissait depuis déjà un siècle. Le succès des Portugais, encouragea les Britanniques.

Sir Francis traversa le bastion hollandais et tomba sous le charme des lieux. Il obtint des terres du dignitaire local. Il fonda alors Fort st George pour la couronne britannique avec bureau, entrepôts et résidences pour la compagnie. Cette première ville fut pourvue d’une muraille.

Des 1600, la ville noire apparut hors des murs.  Elle résultait de la croissance mais aussi d’une discrimination entre chrétiens et locaux. Elle comptait des Telugus et Tamouls mais aussi d’autres groupes juifs, arméniens, gujaratis. Cette ville noire était dépourvue de murs. Les Français y tinrent siège en 1746 contre les Britanniques pour conquérir le trône des nawabs. Ils finirent par échanger Louisbourg, en Nouvelle Ecosse, au Canada contre Madras. Les négociants anglais revinrent alors et protégèrent la ville noire avec des armes et non des murs. Avec la colonisation en 1857, la Compagnie des Indes orientales remit ses territoires et parts à la couronne britannique.

temple et immeuble art déco dans Geogetown

Promenade autour de Parry’s Corner

Georgetown tient son nom du Roi George IV. Néanmoins, on parle du quartier comme de Parry’s Corner. Ce même si le nom désignait à la base juste un édifice commercial, d’où Thomas Parry fit fructifier ses activités.

Pour cette promenade, on peut justement partir de l’immeuble de Parry’s Corner. Ce nom correspond au second bâtiment d’affaire le plus ancien à survivre à Madras dans les années 1900. D’une riche famille, Thomas Parry, frère d’un administrateur de Georgetown, arriva à Madras. Marchand indépendant, il vendait un peu de tout, des voyages, du vin, de l’immobilier. Puis, il ouvrit une tannerie en 1905 et une, sucrerie en 1908. Ensuite, il s’associa avec William Dare. Ce partenariat fructueux prit fin dans les années 1920 lorsque Parry dut s’exiler pour des raisons politiques. Le bâtiment prit le nom de Dare mais le quartier et le sucre s’appellent toujours Parry.

facade art déco de Dare House

C’est au niveau de Dare House qu’eut lieu le siège français. En 1897, une esplanade jouxtait les murailles. En atteste un obélisque (sur les 5 existant à l’époque) et un bâtiment juridique néo-gothique. C’était une zone frontière entre les villes noire et blanche.  C’est en ce lieu que se sont développées les cours de Justice regroupant toutes les professions juridiques sur le modèle britannique mais selon le style indo-sarracénique. Ce fut surtout le centre de la ville et on y trouvait banques, commerces, institutions religieuses et administrations.

En face des dômes et pinacles d’allure néo-moghole, Dare House à l’angle, utilisé comme consulat américain a été détruit en 1908. Il a été reconstruit en acier et béton, de manière plus moderne. C’est un des rares bâtiments art déco de la ville à vocation commerciale.

Dubashi et Chetty  Street

Avant de tourner sur Dubashi Street, se dresse l’église du missionnaire John Anderson venu monter une école de filles dans St George et propager la foi chrétienne. L’église fut ensuite affiliée à l’université de Madras en 1877. Du collège, ne reste qu’un mur.

Le terme de dubashi se réfère aux serviteurs, traducteurs devenus en quelques sortes, intermédiaires, collaborateurs, agents, intermédiaires, receleurs, agents double au service des colons. Cette position avantageuse les enrichit considérablement. Ils possédaient beaucoup de terres et ont donné leurs noms aux rues. Mais ils volaient souvent les locaux. dubakul in tamul se traduit par tricher. La petite histoire raconte que pour se faire pardonner ils construisèrent de nombreux temples à travers la ville.

Chetty Street évoque en revanche les nombreux Chettiar, ces commercants qui ayant fait fortune avec les Anglais se firent batirent des palais somptueux dans le Chettinad.

Le bâtiment victorien de style vénitien rappelle les écrits de Ruskin. Il s’agissait d’une succursale d’une société de Mumbay. Construit en 1900 dans le style indo-sarracénique, l’édifice de brique possède une façade de brique et pierres aux spectaculaires vitraux et aux arcs de style venitien. La structure est néanmoins moderne et implique fer et acier, emblématiques de la révolution industrielle. Une véranda soutient le toit terrasse.

Armenian street

Cette rue prend le nom de la très belle église arménienne véritable oasis de charme dans le tohu bohu du quartier. Les Arméniens, d’abord à San Tome au Mont (ils ont financé l’escalier) sont tous partis. Mais ils étaient très prospères. Ils s’étaient enrichis grâce au commerce de la soie, des bijoux et épices. De ce fait, ils construisirent une église en 1712 plus proche de leur lieu de commerce fort st George.

Un peu plus loin se trouvent le centre catholique, un grand bâtiment art déco. A l’emplacement du parking qui le jouxte se trouvaient Benny and co ou les Arméniens vendaient leurs propriétés avant de rentrer chez eux. Cette énorme société a fait faillite. John Benny travaillait avec le nabab, il occupait de nombreuses fonctions et vendait des uniformes, fournitures de toutes sortes. Il investit dans 2 moulins, Buckingham et Karnatikam, puis à la fin du 19ème siècleune filature à Bengalore. Après l’indépendance, la société plongea du fait de la crise. Benny fut racheté dans les années 1960.

En face, la Compagnie d’assurance privée, est une succursale de celle de Bombay. Un architecte indien créa le bâtiment moderne, un des premiers planifiés en 1945 avec une entrée en angle. Le bâtiment est célèbre pour son sous-sol enterré pour les dépôts. Il recourait à des matériaux locaux. La décoration rappelait l’architecture indo-sarracénique avec le balcon de côté avec jally, le petit dôme, le joli Chatri  (kiosque) sous le toit. Aujourd’hui, la compagnie devenue LSI a été nationalisée à l’indépendance.

Un peu plus loin sur la rue, South India house, de style Edwardian offre une décoration bien différente presque rococo sur une façade toute simple.

Le Long de Beach road face au marché birman

Cette rue était l’avenue de parade bordée d’arbres et de luminaires le long de la plage avant le percement de Marina et le déplacement des clubs de plage. Avec l’ouverture de la gare, les Britanniques construisirent le long de la belle promenade, leurs plus beaux bâtiments. Les nouveaux arrivants, marchands, marins pouvaient y admirer la splendeur du Raj à travers de somptueux édifices. Aujourd’hui la vétusté et l’incurie font pratiquement oublier la grandeur indo-sarracénique de ces façades en relief. En diffère, celle du Metropolitan Magistrate court, pour les cas civils. Construite en 1892, sa façade plate ornée de mosaïques atteste combien les Britanniques consacraient un minimum d’argent pour rehausser un édifice pour les locaux.