Jodhpur

Jodhpur m’évoquait les pantalons bouffant du haut et le polo. Je n’imaginais pas la beauté de cette ville du Rajasthan aux portes du désert du Thar.

Des maharajas particulièrement inspirés ont assuré sa prospérité. Ce grâce notamment à un ingénieux système d’irrigation. Dans le monde touristique contemporain, on l’appelle la ville bleue.

Je vous propose de partir à la découverte de cette ville aux divers sobriquets. Comme de plus en plus souvent, j’ai préparé une série d’articles. Ceux-ci correspondent aux monuments incontournables, aux plus insolites et enfin à ce qui pose plus question. A moduler selon votre durée de séjour, ou vos envies. Commençons des aujourd’hui avec les incontournables de Jodhpur.

Le Mehrangarh Fort,

Le fort constitue le seul site Unesco de Jodhpur. Ceci peut sembler étonnant vu la beauté de la ville. Pourtant celle-ci, toujours administrée par le Maharaja est un modèle de développement.

Le Fort se situe sur une colline de 150m. On l’atteint depuis la vieille ville. Il date de 1459 et remonte à Rao Jodha, le chef du clan Rathore. Il comprend de très belles galeries et temples. On y découvre des palanquins, harnachements d’éléphants, voire équipement de polo, passion royale du coin. Je viens ici d’évoquer le premier mot attaché à la ville et la façon dont le terme s’est diffusé dans notre langue depuis la chemise des amateurs royaux de ce sport équestre.

L’architecture y est extraordinaire. On y admire des éléments de bois travaillés très finement. https://www.mehrangarh.org/

Le palais est un rare site privé en Inde. Administré par la famille royale, il est un modèle du genre. L’organisation, la muséographie, les facilités sont d’une rare qualité pour L’Inde. Même le restaurant, le café, et la boutique sont hautement recommandables. Avec l’achat d’un billet étranger (plus cher que le billet pour les locaux bien sûr) vous avez droit à un audio guide très bien fait.

On parvient au Fort soit en transport, soit à pied depuis la vieille ville par des volées d’escaliers pentus ou un chemin (du côté de la « ville bleue ») orné de « fresques ».

La vieille ville de Jodhpur

Celle-ci s’explore à pied. Les petites rues encombrées, les jolies boutiques, bazars, l’animation ne sont en effet pas propices à la circulation. En revanche, une fois franchie la tour de l’horloge, on accède aux boulevards de cette ville de 1,4millions habitants, écrasée de chaleur. Là, il vaut mieux héler un tuktuk.

Ce quartier historique se situe au pied de l’impressionnant plateau sur lequel se dresse le fort. Un mur du XVIeme siècle percé de huit portes l’entoure. Le long des 1km de muraille c’est une profusion de marchés et échoppes artisanales. Jodhpur est en effet l’un des centres de production d’Inde. Sacs en tissus, nappages, boites, vanneries, cuir, bijoux, antiquités, on y trouve un peu de tout et de fort jolis produits.

Historiquement, la ville se trouve en effet sur la route de l’opium, du cuivre, de la soie, du santal qui reliait Delhi au Gujarat. De petits étals proposent les sucreries typiques de Jodhpur, très sucrées, comme toujours en Inde.

-Le Toorji ka Jhalra

Le magnifique réservoir à degrés, se situe dans la vieille ville en contrebas du fort. La symétrie des volumes est particulièrement spectaculaire. Ce puits du XVIIIème siècle, destiné à approvisionner la population en eau, a fait l’objet, avec le quartier alentour, d’un beau travail de réhabilitation.

Ces réservoirs si typiques de l’Inde servaient à stocker la précieuse eau. Leur architecture savante permettait à un grand nombre de gens de remplir leurs jarres et de remonter et descendre les marches sans se gêner. L’approvisionnement en masse se faisait avec un minimum d’incidents. Les magnifiques façades de grès rose abritent tout autour de plus en plus de jolies boutiques.

– Ghanta Ghar,

A l’orée de la ville ancienne, les marchés entourent ce vestige de la colonisation anglaise. La tour de l’horloge est en effet un classique des villes indiennes sous domination britannique. En passant sous l’horloge, sur la droite, commence le quartier restauré avec ses belles maisons roses si traditionnelles. Puis, sur la gauche, les rues s’ouvrent sur des maisons peinturlurées en bleu. Je dis bien peinturlurées car malgré la renommée de la ville, je conçois quelques doutes sur la couleur, ce que je développerai dans un prochain article.

Indigo

Le terme indigo désigne chez les anciens la couleur qui vient d’Inde. Autrement dit de l’autre bout du monde où on la cultivait déjà 2000 ans avant notre ère. Il se réfère à une nuance d’un bleu profond mais aussi à une plante, l’indigotier. Base d’une teinture profonde cette couleur est certainement l’une des préférées de l’occident contemporain. En revanche, elle passe au second plan en Inde.

On pourrait même se demander si la couleur des Schtroumpfs a vraiment droit de cité au pays de l’indigo, comme l’illustre avec humour Catherine Delmas dans notre livre commun.

« Qui a volé mon bleu » copyright Catherine Delmas Lett

Aujourd’hui c’est aussi avec un joli jeu de mot le nom de la compagnie aérienne indienne la plus fiable et prospère.

Le bleu d’inde

L’indigo, ou Indigofera tinctoria, est une couleur située entre le bleu et le violet, Elle provient des feuilles et des tiges de l’indigotier. Les Grecs la connaissaient surtout pour se propriétés médicinales On la trouvait en Mésopotamie et en Égypte ancienne, mais aussi en Inde d’où son nom. Des découvertes récentes attestent de son existence en Mésoamérique. Elle transitait par les pays du Proche Orient qui l’utilisaent dans elurs céramiques vernissées. Cette tradition du bleu se retrouve dans l’Asie Central et l’Iran des XII, XIII ème siècle, puis un peu plus tard dans les Empires Safavide et ottoman.

Pour autant, elle n’intéressa vraiment l’occident qu’après le XVIe siècle. Pendant toute l’Antiquité, on’appréciait peu le bleu. Puis, la teinte s’affirma dans la représentation religieuse, chez Giotto, rare peintre italien à la faire sienne, dans les vitraux, voire l’héraldique.

Les vêtement et blasons royaux poussèrent à s’intérsser aux propriétés tinctoriales de la guède. Ce fut l’apogée du pastel. Mais les grandes découvertes ouvrirent la route de l’Inde. Avec cette route directe, s’améliorait l’approvisionnement en indigo. Or celui-ci offrait une couleur plus profonde, avec une meilleure tenue mais un moindre cout. L’Inde s’affirma alors comme le lieu de production du bleu et des textiles.

Il fallut attendre 1631 pour que l’importation d’indigo en France soit autorisée par la couronne et débute véritablement. La main d’œuvre bon marché des colonies américaines allait néanmoins rapidement déplacer le centre de la production de bleu.

L’indigo des Amériques

Au cours des XVIIe et XVIIIe siècles, les colonies devinrent des lieux de production importants. L’indigo poussait naturellement sur le continent et s’y montrait particulièrement qualitatif. L’esclavage, en fournissant une main d’œuvre très bon marché, allait achever de transférer la production d’Inde aux colonies américaines sous domination britannique. L’Angleterre détint alors les rouages du commerce du bleu.

 Pour obtenir la couleur, les arbustes d’indigo étaient placés dans des cuves d’eau afin de procéder à la macération puis à la fermentation. Le liquide était ensuite filtré, puis séché afin de récupérer l’indigo réduit en poudre et aggloméré en boules. C’est sous cette forme qu’il arrivait en Europe.

Avec l’indépendance américaine, la couronne britannique refusa la dissolution de son monopole et préféra déplacer une nouvelle fois sa production vers le sous-continent indien. Elle y imposa alors la monoculture de la plante au détriment des plantations vivrières provoquant des famines épouvantables qui ne disparurent qu’avec le retour à des cultures plus responsables.

le bleu des facades de Jodhpur

Le XIXème siècle s vit l’apparition de couleurs synthétiques grâce aux recherches de chimistes allemands dont Adolf von Baeyer  Ceux-ci rendirent les cultures fastidieuses et chronophages de l’indigo obsolètes. Leur découverte correspondait au brevetage des rivets qui allaient faire du blue jean un essentiel des garde-robes.

Aujourd’hui, l’indigo synthétique permet de fabriquer 4 milliards de vêtements en jean chaque année. En revanche, l’indigo renait en tant que couleur naturelle dans un cadre plus artistique. En Inde, il symbolise la ville de Jodhpur.

Mais ce rapide balayage historique permet de comprendre pourquoi le bleu ne figure pas au premier plan des couleurs indiennes.

Madras

Madras est devenue Chennai en 1996 dans un grand mouvement national d’indianisation. A la même époque Mumbai a remplacé Bombay, Kolkota, Calcutta et, plus difficile, Trichy  Tiruchirappalli… L’idée gouvernementale consistait à supprimer les dénominations anglaises et revenir à des noms locaux voire originels.

A l’origine était Madras ?

Selon certains historiens, les villages de pêcheurs de Chenna-patnam au nord et de Madras-patnam au sud de fort St Georges pré existaient tous deux à l’arrivée des Britanniques. On peut donc légitimement se demander si Chennai est plus locale que Madras.

 Le nom du hameau Madras-patnam pourrait dériver de Mundir-raj or Mundiraj, issu d’une communauté Telougou et non Tamoule. Des historiens rattachent également le nom de Madras a une déformation du « madre de Dios » portugais, ou à une famille Madeiros tout aussi portugaise.

 Le nom de Chennai, lui, pourrait provenir du Temple Chennakesava Perumal construit en 1646. A moins qu’il ne dérive de Damarla Mudirasa Chennappa Nayakudu, père de Damarla Venkatapathy, dirigeant Nayak, Général dans l’armée de l’Empire Vijayanagara. Ce brave monsieur au charmant patronyme vendit la ville aux anglais en 1639.

Des traces humaines, remontant au paléolithique, auraient en fait été retrouvées dans le quartier d’Egmore.  Certains temples remontent à la période médiévale. Et, de fait, les villages aujourd’hui agglomérés, appartinrent aux royaumes Chola, puis Pandya, Pallava and Vijayanagara. Ceux-ci régnèrent avec des fortunes variées sur la région dans les seize premiers siècles de notre ère.

Au XVIe siècle, les Portugais implantent un comptoir dans Mylapore. Ils y construisent au moins 5 églises . Ils commémorèrent également l’héritage de l’apôtre Thomas sur les hauteurs dominant la ville en construisant une série d’ermitages.

Une histoire antérieure à la colonisation anglaise

Mais la première mention officielle de Madras apparait dans le contrat de vente du lopin de terre . La Compagnie des Indes orientales le signa le 14 août 1639. A l’époque, les grandes nations européennes se disputaient la côte de Coromandel. On trouvait au sud, à Tranquebar, les Danois, et les Français à Pondichéry. Les Hollandais eux s’étaient installés plus au Nord près du lac Pulicat. Quant aux Portugais, ils avaient déjà construit un port à Mylapore. Les Anglais prirent possession du village de Madras-Patnam. Ils en utilisèrent donc le nom pour leur petite colonie.

Bien que déjà existante et colonisée, la zone de l’actuelle Chennai fête paradoxalement, chaque année sa naissance anglaise, le 22 Aout 1639. Elle célèbre ainsi l’arrivée du Britannique Francis Day, séduit par la longue bande de plage. Il acheta au Nayak son lopin de terre. Puis, il installa son petit fort au nord de la rivière Coom, à quelques km au Nord du comptoir lusitanien. IL venait de fonder ce qui deviendrait le centre d’une incroyable réussite économique pour Les Anglais. Pourtant, le fondateur a quasi disparu des registres. Pas une rue ni même un café n’honorent sa mémoire.

La première ville anglaise s’abritait derrière les murailles bastionnées de fort st Georges, du nom du st patron de l’Angleterre. Rapidement, la forteresse devint exiguë. Une ville, dite noire, s’ouvrit au nord sous le nom de Georgetown, du nom cette fois de George IV issu de la dynastie des rois dits géorgiens. Cette ville au plan en damier typique des colonies de peuplement correspond aujourd’hui au quartier de Parry’s corner.

La fausse Fondation de Madras par les Anglais

Au XIXème siècle, la croissance de la ville imposa d’ouvrir de nouvelles avenues. Cette fois le centre se déplaça vers l’actuel quartier de Royapeta  et Anna Salai. La promenade ou North Beach road qui représentait l’avenue de parade de la première période de colonisation avec ses fastueuse façades indo-sarracéniques souffrit lorsque le chemin de fer obstrua le débouché direct sur la mer. En contrepartie, on construisit Marina Beach, le grand boulevard sud reliant le quartier anglais de Georgetown au quartier portugais et à la ville ancienne du côté de Mylapore. La promenade sud s’enorgueillit de beaux bâtiments administratifs et universitaires de Madras. Malgré la « tamoulisation » ou changement de nom de la ville et des rues, les grands bâtiments et surtout les universités de l’époque victorienne ont conservé leur dénomination Madras.

L’explosion démographique du XXe siècle explique le lotissement de nouveaux quartiers. T Nagar, Egmore, Adyar par exemple.  Après l’indépendance, Madras continua à être la capitale de la Présidence de Madras, constituée des grands états du Sud puis du Tamil Nadu. Puis, Chennai lui emboita le pas. La modification de nom ne changea pas le cœur, ni l’esprit de la ville. Constituée d‘une multitude de bourgades, elle est devenue la cinquième puissance du sous-continent indien.

Thiruvallur

A priori, Thiruvallur est une banlieue industrielle de Chennai pas forcément idéale comme destination de balade du week-end. Pourtant cette cité satellite en pleine explosion démographique recèle une agréable ambiance et de magnifiques temples.

Le temple Veera Raghavar Perumal et autour

 Sur les bords de la Coovum river, un énorme temple assure la notoriété de la ville. Il s’agit d’un des 108 temples à Vishnu et l’un des rares dans le Tamil Nadu. Malheureusement le Veera Raghava Perumal temple est interdit aux étrangers. Des prêtres vous le feront savoir de manière assez rude.

On ne peut admirer sa Gopuram et son atmosphère de piété fervente que de l’extérieur. Il est donc inutile de vous démunir de vos chaussures lorsque vous vous dirigez vers la grande porte. En revanche, l’effervescence alentour vaut le coup d’œil.

 Juste derrière le temple, à l’extrémité de l’énorme réservoir, un petit temple consacré à Shiva coloré et charmant accueille tout le monde.

Puis, en contournant la terrible enceinte du temple vaishinite, on traverse un quartier commerçant. Ce sont d’abord les orfèvres musulmans que l’on voit au travail. Plus avant dans la rue Gandhi, un atelier d’épices, réduit les plantes en poudre. Ce marché très animé nous ramène sur les marches du temple de Vishnu.

 Plus à l’extérieur de Thiruvallur

A 3km du centre de Thiruvallur, la petite localité de Kakkalur semble un village endormi. Un temple sans intérêt architectural particulier s’ouvre sur une immense statue monolithique de 12m d’Hanuman. Constitué d’une seule petite pièce dérobée aux regards, il est l’objet d’une grande ferveur. Les fidèles tournent autour du sanctuaire et couvrent l’énorme déité de fleurs jaunes. La piété est à son comble ici.

Encore plus loin dans la campagne, près de Kadambathur, Tirupathur, le temple de Shiva est réputé comme le plus ancien de Thiruvallur. Avec sa Gopuram blanche il tranche sur l’architecture habituelle du Tamil Nadu. Un petit bosquet de bambous rappelle l’origine de sa construction légendaire. En effet il aurait été érigé dans une forêt de bambous, autour d’un lingam. Son cœur remonte effectivement au temps des Cholas, voire des Pallavas, même si une fois de plus il est difficile de trouver une documentation précise. Néanmoins, les prêtres qui y officient sont très affables et près à vous conter avec moult détails, mais en Tamoul, l’histoire de ce lieu sacré. Quel que soit votre degré de compréhension, il n’en reste pas moins que le lieu un peu perdu recèle une véritable magie.

Jaipur insolite

Pour faire suite aux autres articles sur Jaipur, voici de quoi faire une visite plus insolite.

Sans avoir la prétention de réinventer la roue, j’ai particulièrement apprécié quelques lieux moins connus et pour autant bien passionnants

Un Jaipur plus insolite près du centre

Albert Museum

Cet extraordinaire bâtiment vaut déjà d’être admiré de l’extérieur.

 Car l’édifice lui-même est un morceau de bravoure indo-sarracénique juste en dehors de la muraille de la ville ancienne. Mêlant les influences mogholes et anglaises, il se veut musée victorien typique. Avec des collections balayant l’histoire universelle, de l’Egypte, au monde romain, aux productions plus locales. En fait, il copie, en version indienne, le Victoria and Albert Museum. La célèbre institution londonienne. A l’origine, ce devait être un point central de la culture victorienne. Ainsi, ce musée ambitionne une sorte d’érudition générale. Ses collections éclectiques se répartissent en diverses galeries refaites récemment. Celles-ci échappent donc à la poussière habituelle aux lieux d’expositions indiens.

Le cinéma Raj Mandir

 Construit en 1976 avec une façade genre gâteau rose et une salle incroyable avec balcons mousseux surplombant la fosse. L’ambiance mérite d’être vécue au moins une fois. Lors des projections de films locaux, l’apparition de stars est saluée par des hurlements ahurissants.

Les Haveli

Attention le mot Haveli est générique d’un certain type d’habitation, de grandes maisons. Il n’engage en rien la qualité de l’établissement. En fonction du prix, vous pourrez aussi bien atterrir dans un véritable palace ou un bouiboui. Ne croyez donc pas faire l’affaire du siècle parce que vous avez réservé un Haveli très bon marché. Regardez attentivement les photos et les commentaires. En revanche vous pouvez tomber sur un bijou absolu, en général un peu onéreux.

Derrière le Amber palace

Juste derrière le Amber Palace, une route mène au magnifique réservoir à degrés et passe juste devant le petit musée Anokhi.

Ce Musée Anokhi est un charmant petit musée très peu fréquenté. Il s’agrémente pourtant d’une jolie cafeteria. Pour ceux qui habitent l’Inde, Anokhi est une boutique connue pour ses imprimés batik. En fait l’initiative est partie de Jaipur. L’idée était de relancer les savoirs textiles traditionnels. Le petit musée occupe un Haveli restauré avec intelligence. Il est donc très agréable de découvrir les magnifiques créations des artisans locaux. Une petite boutique et un ravissant salon de thé complètent la visite.

Devant la porte d’Amber, la route décrit une épingle à cheveu et mène vers le réservoir du XVIème siècle.  Panna Meena Ka Kund est extraordinairement photogénique avec ses volumes géométriques et parfaitement symétriques. Comme dans tous les réservoirs, il est interdit d’y descendre.  Il permettait de conserver précieusement l’eau dans ce territoire désertique.

Au-delà d’Amber Fort, un Jaipur plus insolite

Amber Fort faisait partie d’un dispositif de fortifications de la chaine des Aravelli.

 Au-dessus du Palais, le fort de Jaigarh monte la garde depuis le sommet de la colline.  Il offre de beaux points de vue. Il est relié au Palais par un système de tunnels.

 Le fort de Jaigarh (au Nord) est relié à celui de Nahargarh (au Sud) par un vaste réseau de murs et d’ouvrages fortifiés Nahargarh est aussi appelé demeure des tigres. Il se situe le long des collines d’Aravalli et surplombe un lac. Le fort abrite aujourd’hui le musée de cire de Jaipur et le palais de verre.

Mais il se peut que vous n’ayez pas le temps, ou l’envie, de vous rendre dans ces forts relativement éloignés du centre de la ville. Si vous souhaitez néanmoins prendre de la hauteur pour jouir du panorama pourquoi ne pas escalader l’élégante tour Swargasuli du XVIIIème siècle ?

Jaipur bis

Je continue ainsi ma série d’articles sur Jaipur en évoquant ici les lieux bis indiqués par des guides papier, les blogs ou les accompagnateurs de voyage. Ces lieux sont souvent recommandés mais pas toujours indispensables selon moi. Plus encore que d’habitude, cet article m’est très personnel.

Je me base ici sur les lectures suivies lors de ma découverte de Jaipur mais aussi sur une visite guidée organisée en amont il y a quelques années. Pour faire simple, je vous indique ce que je n’ai pas forcément adoré.

Pour commencer, je ne vous recommande pas le tuk tuk. La ville est trop poussiéreuse pour cela. Et encore moins le rickshaw humain. Dans la vieille ville, vous pouvez vraiment marcher pour mieux découvrir. 

Le City Palace

 Je le sais je fais ici ma mauvaise tête. Je ne suis absolument pas d’accord avec les sites qui recommandent la visite du City Palace. La cherté du billet n’est, selon moi, absolument pas à la hauteur de l’intérêt de la visite.

 Pour tout dire, moi que ne suis pas une grande « magasineuse », la partie que j’ai préférée est l’atelier, autrement dit la boutique, magnifique il est vrai. Pour être honnête, on voit quand même dans le Palais un impressionnant durbar. Cette salle du trône est décorée des portraits hilarants des maharajas. Ces tableaux ne sont pas sans évoquer ceux des Qajars de la Perse voisine à la même époque. Il s’agit de portraits sur le modèle européen. Les dignitaires y posent de profil ou de face avec tous leurs atours. Mais l’originalité repose sur le mélange de photographie et de peinture.

Dans la même veine, le Diwan-i-Khas, zone d’audiences privées des maharajas accueille deux immenses jarres d’argent de 345kg chacune. Elles servaient à transporter l’eau sacrée du Gange, la seule ingérée par les monarques. Ces Gangajelies accompagnèrent le Maharaja jusqu’en Angleterre en 1902 pour l’intronisation du roi Edward VII en 1902. Chaque jarre pourrait contenir 4 100 litres d’eau.

Enfin, un pavillon au centre de la seconde cour expose des textiles magnifiques.

Construit sous l’impulsion du Maharaja Jai Singh II, fondateur de la cité, le complexe de palais est superbement ornementé, avec des piliers ouvragés. En fait, il s’agit de deux palais, Chandra Mahal et Mubarak Mahal. Le palais est encore habité par la famille royale. Le Maharaja de Jaipur est toujours le chef du clan Rajputs Kachwaha . Ses appartements sont visitables moyennant un billet onéreux même pour un porte-monnaie européen (4000rp).

Mais il y a tellement d’autres choses à voir à Jaipur que le City Palace ne me parait vraiment pas la visite à prioriser lors d’une première découverte de la ville.

Des bazars

Autre déception, bien personnelle, le Bapu Bazar. Si vous aimez l’ambiance souk et les odeurs, vous pouvez vous perdre dans les galeries. Sinon les kilomètres de bracelets ou de kurtas sont à peu près les mêmes que dans toute autre ville indienne. Avec peut être un bon point sur la passementerie assez remarquable je l’avoue.  Parmi les autres bazars à découvrir se trouvent Johari Bazaar, Tripolia Bazaar ou Chandpol. A vous de voir s’ils vous inspirent.

Jal Mahal palais du lac

Construit sur le lac Mansagar, ce palais combine les architectures moghole et rajpute. Jal (eau) Mahal (Palais) donne l‘illusion de flotter sur l’eau au milieu du lac Man Sagar. Il fut édifié par le Maharaja Madho Singh I comme pavillon d’été pour les chasseurs de canards. On ne peut y accéder et on se contente de l’admirer de loin ou de caboter autour. Pour les amateurs de photos, il vaut mieux s’y rendre en tout début ou toute fin de journée pour éviter qu’il ne soit écrasé de soleil. En revanche, ne vous attendez pas à visiter les lieux.

Le temple des singes

à 10 km de Jaipur, le temple de Galtaji est un lieu de  pèlerinage. Il se constitue de plusieurs temples édifiés dans une crevasse des collines de Jaipur. Une source y jaillit, remplissant une demi-douzaine de kunds ou réservoirs sacrés.

L’abondance des singes a donné le surnom de « temple des singes » à ce sanctuaire dédié sans surprise à…Hanuman. Il faut gravir la colline pour s’y rendre mais la vue sur Jaipur se mérite. Et le chemin est très beau dans la campagne et parsemé de templounets peints et décorés.

Je vous concède qu’il faut avoir envie de marcher sous la chaleur et de se frotter aux singes, trop souvent agressifs mais aussi aux locaux aux pratiques touristiques un tantinet agressives elles aussi.

Jaipur

Les Incontournables de la ville rose

Jaipur, la capitale du Rajahsatn, compte 4,4 M. Surnommée la ville rose, elle n’a rien à voir avec Toulouse. En effet, son rose tient à la peinture appliquée lors de la visite du Prince de Galles en 1876. Bien que fondée assez tardivement, en 1727, c’est une ville magnifique à découvrir et redécouvrir sans cesse. On peut y survivre sans guide. Et on peut circuler aisément dans le centre historique à pied.

Dans ce premier article, je vous propose de découvrir les incontournables d’une visite. A savoir le Palais des Vents ou Hawa Mahal, et le curieux observatoire astronomique, Yantra Mandir. Mais aussi le Fort Amber, situé à une dizaine de km du centre historique.

Amber Fort

 Un peu à l’extérieur de la ville, ce site est immanquable. Il s’agit d’un immense fort posé sur les contreforts montagneux de la chaine des Aravelli . Plus haut, le fort de Jaipur le surveille. Il domine la colline dite de l’Aigle. Celui-ci est plus une forteresse alors que Amber ou Amer ressemble dans les faits à une résidence royale. Avec ses riches cours et loggias, il apparait tel un morceau de paradis dans un environnement plutôt hostile.

Certains effectuent la petite montée à dos d’éléphant mais cette pratique est aujourd’hui montrée du doigt. Mais je vous recommande de visiter Amber tôt le matin. Cela permet de profiter de la lumière, éviter les grosses chaleurs et la foule (ouverture à 8h). On rentre par la porte de Ganesh. Elle mène à une immense cour au débouché de laquelle se tient la billetterie. De là, une pente mène à une cour entourée de pièces superbement décorées. Y logeaient les membres de la famille royale. Des escaliers et rampes annoncés par une porte magnifiquement peinte mènent au Palais des miroirs ou Jai Mandir. Les plafonds et murs y sont incrustés de panneaux de verre et de miroirs pour réfléchir les lumières des chandelles.

Comme tous les palais musulmans, il se dédouble. Coexistent ainsi une zone officielle et masculine et un zenana, mot local pour le harem. Un véritable labyrinthe de couloirs permet de gagner ce dernier. Il faut compter 2 bonnes heures pour grimper à l’assaut de ce formidable lieu. Mais aussi pour se régaler des vues et explorer les recoins.

Jantar Mantar, l’observatoire de Jaipur

Cet Observatoire astronomique est exceptionnel. Même une béotienne comme je le suis ne peut s’empêcher d’être impressionnée par la taille…astronomique du lieu. On parle ici d’une vingtaine d’instruments en pierre. Ils sont utilisés pour calculer l’heure, les mouvements des planètes, les distances et les positions des objets célestes. Ces instruments furent d’abord réalisés en métal ou en bois pour ajuster les mesures. Ils furent ensuite agrandis, perfectionnés et construits en pierre. Des cinq observatoires de ce type en Inde, celui-ci est considéré comme le plus important. Bien que tardif (18eme siècle) il doit sa taille à l’utilisation de ces mesures dans la religion musulmane.  Avant l’introduction de la montre par les Britanniques, l’immense cadran solaire Samrat Yantra permettaitainsi de calculer l’heure des prières.

Hawa Mahal, le symbole de Jaipur

Le palais des vents, avec sa façade de grès rouge et rose ourlée de blanc, est incontournable à Jaipur. Mais j’avais le souvenir lors d’une visite précédente de Jaipur que seule la façade de cinq étages comptait. Et l’on ne m’avait pas forcément conseillé de visiter le Palais lui-même. Certes, l’ascension n’est pas très aisée. Les escaliers sont relativement pentus et étroits pris d’assaut le week-end par une foule en goguette. Néanmoins, le jeu en vaut la chandelle. Précisément car la foule qui découvre les multiples recoins de ce palais façade est un vrai spectacle. Les salles sont petites et vides. Cependant, les points de vue multiples prédisposent à des photographies fantastiques. On y jouit ainsi d’une vue remarquable sur l’observatoire.

La géométrie des espaces, l’aspect labyrinthique donnent vraiment l’impression de se perdre dans un palais des 10001 nuits. Outre cette empreinte moghole, la forme générale de l’édifice tient davantage de l’architecture Rajpoute. Elle est en couronne de Krishna et contient une multitude de tourelles et ouvertures,.

Pour visiter, il suffit de suivre la pancarte à droite de la fantastique façade. Il faut alors contourner complètement le pâté de maison et rentrer par l’arrière. Le palais est constitué d’une multitude de cours et coursives. Une petite cafeteria dans la 1ere cour propose une halte plaisante.

C’était un palais pour les femmes. Contrairement à l’idée reçue, les jalis et balcons ne permettaient pas à ces femmes de regarder la rue. En revanche, les milliers de jharokha les autorisaient à respirer. Le palais, construit en 1799, 10 ans après notre révolution française, tire ainsi son nom des parois et fenêtres. Celles-ci permettaient des courants d’air (Hawa) parfaits pour rafraîchir l’édifice et ses recluses pendant les étés torrides de la région.

Rajasthan

Le Rajasthan constitue le plus grand état indien . Avec 342 239 km2, il dépasse en taille l’Italie. Situé au nord-ouest du pays, il a pour capitale Jaipur.

Triangle d’or

C’est d’ailleurs en général par la ville rose que l’on aborde cet Etat, qualifié de « Terre des Rois ». La grande majorité des voyageurs venant d’Europe se cantonnent en effet au triangle d’or. Partis de New Delhi, ils se rendent au célébrissime Taj Mahal, à Agra. Ils complètent cette boucle haute en couleur, et en population à Jaipur. Ils traversent au passage trois Etats, celui de Delhi, puis l’Uttar Pradesh, le plus peuplé et l’un des plus pauvre à Agra pour enfin chatouiller le Rajasthan à Jaipur (4M d’hab). C’est dommage car l’Etat a tellement plus à offrir. Le désert du Thar s’étend à l’Ouest avec ses magnifiques forteresses, dont Jaisalmer. Mais il offre aussi des villes princières comme Udaipur ou Jodhpur et d’extraordinaires temples.

Cerise sur le gâteau, une fois éloigné des gros centres de Delhi et Agra, les villes sont à taille humaine, les paysages deviennent plus doux et surtout la population locale est adorable.

Certes les sites sont éloignés les uns des autres et il n’est pas forcément facile d’en voir beaucoup lorsque l’on vient de l’autre bout de la planète. Cependant, si vous n’adorez pas la foule et que vous recherchez le dépaysement, la question de vite fuir New Delhi pour passer plus de temps à découvrir cet état peut se poser.

Province d’histoire

Le Rajasthan résulte d’un regroupement des États princiers Rajputs. Ceux-ci connurent leur apogée entre les VIII et XIIèmes siècles.

 Dans l’histoire, cette terre a vu passer les grands Empires et Royaumes mais aussi nombre d’envahisseurs des Huns aux Moghols puis aux Britanniques. Malgré les vagues migratoires, la population reste marquée par la tradition. Ainsi les femmes portent toujours des voiles colorés sur le visage, les festivals ont gardé leurs couleurs. Les villages apportent un véritable dépaysement et sont particulièrement photogéniques avec leur population aux vêtements très vifs abrité du violent soleil de ces contrées quasi désertiques.

C’est aussi la terre des Maharajas et donc de merveilleuses demeures construites à l’époque moghole. Pour résumer le Rajasthan correspond à l’image rêvée d’une Inde fantasmée. Outre les palais, la région regorge de temples animés et de villes ravissantes et à l’identité forte. Jaipur, rose et caractérisée par ses nombreux palais, n’a rien à voir avec la blanche Udaipur construite autour de 5 lacs artificiels. Quant à Jodhpur, dominée par sa puissante forteresse perchée sur un piton, elle est un modèle de conservation patrimoniale et d’organisation touristique.

Rajasthan pratique

Le Rajasthan est un état en grande partie désertique. Il y fait donc très chaud et sec. Il se compose de deux parties très distinctes :

  • au nord-ouest, s’étend le désert du Thar bordé par la frontière du Pakistan.
  • au sud-est, la fertile vallée de la Chambal, beaucoup plus peuplée, séparée du désert par la chaîne des Ârâvalli, qui borde la ville de Jodhpur. C’est dans cette chaine que se forment les quelques rivières alimentées par la mousson estivale.

Se loger

Le Rajasthan déjà remarqué par l’Unesco à de nombreuses reprises est un modèle de développement touristique.

Dès lors il est facile et souvent bon marché de trouver de beaux hébergements, aussi bien dans des palais que des maisons traditionnelles, les Haveli. Vue la qualité de certaines de ces demeures, je ne vous conseillerais pas les hôtels de chaine.

Venir et se déplacer au Rajasthan 

Le train ne relie pas toutes les villes. Le bus peut être pratique mais un peu folklorique. L’avion dessert plusieurs villes. A Udaipur, l’aéroport est petit et se trouve à 1 bonne heure du centre-ville. En revanche, il est proche du centre de Jodhpur et pratique. Quant à celui de Jaipur il est plus grand avec de jolies boutiques (rien à voir avec le somptueux terminal de Hyderabad néanmoins) et dessert relativement bien le pays. Une voiture avec chauffeur permet de s’arrêter dans les villages et temples mais l’état des routes implique de longues heures de voyage. Vos arrêts dicteront en fait votre moyen de locomotion. Il s’agira d’arbitrer entre votre volonté de visiter plusieurs villes ou de découvrir la campagne et les sites.

Textiles

Chennai et les Textiles

La ville de Chennai est née des textiles. C’est pour s’emparer des précieuses cotonnades que les Britanniques ont décidé au XVIIème d’installer un fort. Les Hollandais, Danois et Portugais puis bientôt les Français se disputaient déjà la côte de Coromandel.

Si le Kerala devait sa réputation aux épices, la côte orientale, elle, tenait la sienne des cotonnades révolutionnaires pour une Europe abonnée aux vêtements de chanvre, lin et laine.

Chennai, La fondation d’un comptoir pour les textiles

Les Anglais prirent peu à peu possession des lieux.  Au XVIIe siècles, ils bâtirent d’abord le fort bientôt nommé selon le Saint patron de l’Angleterre st Georges. Cet établissement ne doit rien à la couronne mais à la Compagnie des Indes orientales. St Georges fut en fait la première fondation britannique sur le sol indien. Rapidement, elle prit le contrôle de l’extraordinaire production de tissus locaux. Car les Indiens avaient mis au point des techniques ingénieuses pour fixer les couleurs et les motifs.

Rapidement, les tissus indiens prirent plus d’importance que les épices dans les échanges internationaux.  A la fin du XVIème siècle, la Compagnie des Indes orientales assura la promotion de ces cotons pour vendre des sous-vêtements puis des vêtements, plus lucratifs que les riches soieries. Les Britanniques échangeaient alors des textiles bruts contre des denrées alimentaires.

Ces « indiennes » devinrent si prisées dans l’Europe du XVIIe que les gouvernements européens légiférèrent pour en limiter voire en interdire l’importation. De ces prohibitions sont nées les grandes manufactures françaises, notamment les toiles provençales ou les toiles de Jouy.

Une production textile encore impressionnante

Avec la révolution industrielle et l’invention de la vapeur, le tissu anglais se mit à concurrencer dangereusement les fabrications d’indiennes. Jusqu’à ce que l’Empire décide d’implanter des usines autour de Manchester au XIXème siècle. Ce qui ruina les manufactures en Inde. Pourtant avec les délocalisations de la fin du XXème siècle, les usines textiles ont repris de la vigueur dans le sous-continent.

Chennai reste le centre commercial de cette industrie éparpillée dans les campagnes et les provinces. Si la soie est toujours liée à la ville de Kanchipuram et les cotonnades davantage à la région de Pulicat, le nom de Madras demeure synonyme pour les Français de ces toiles légères et colorées que l’on trouve principalement aux Antilles. Car paradoxalement on trouve peu de ces carreaux en Inde d’où ils sont pourtant originaires. C’et pour contrer la prohibition européenne qu’ils furent directement envoyés dans les Amériques pour habiller créoles et esclaves.

Le quartier de T Nagar construit dans les années 1920 a l’emplacement d’un réservoir est aujourd’hui synonyme de marché aux tissus.

 Il regorge de magasins historiques vendant des kilomètres de soieries et de cotonnades. Ce quartier bruissant d’animation devient extrêmement encombré dans les périodes auspicieuses. Les familles s’agglutinent alors dans les magasins pour acheter saris et bijoux susceptibles de vêtir mariés et convives.

Bollywood

Bollywood désigne le cinéma produit à Mumbai. Le terme date des années 1970. En Occident, la pléthorique production indienne est souvent assimilée à cette seule origine. Or les cinémas du sud tirent de plus en plus leur épingle du jeu. 1/4 de la production annuelle uniquement vient de Bombay, rebaptisé Mumbai en 1995.

Naissance de Bollywood

Néanmoins, le cinéma indien est bien apparu à Mumbai lors de la première projection en 1896 au Watson’s, une salle exclusivement fréquentée par les colons . Cette ville alors aux mains du Shah du Gujarat était passée entre les mains portugaises sous le nom de Bom Bahia en 1534. Puis ceux-ci l’avaient donnée aux Anglais en 1661 lors du mariage de Catherine de Bragance et de Charles II.

Très rapidement la population locale, se prit de passion pour le cinéma. L’industrie naissante fut rapidement contrôlée par la communauté parsie. Celle-ci fit de Bombay la capitale du cinéma dans les années 1920. La production de films s’affirma alors avec le textile comme l’industrie la plus importante de la ville. Bollywood existait déjà, avant Hollywood. Cette industrie toujours florissante a connu quelques étapes.

L’arrivée du parlant et le choix de l’hindoustani

Le parlant arrive dans les années 1930. Avec le son naissent les premiers films avec danses et musique. L’industrie, en se développant, affronte une vraie question, celle de la langue dans une cité polyglotte. Car Mumbai accueille une mosaïque de populations (Sikhs et zoroastriens hindous et musulmans). Bollywood est en effet le seul lieu où la langue des films diffère de celle de la rue mais est globalement compréhensible par tous.

Pour atteindre une plus grande audience, on faisait alors appel à des actrices anglo-indiennes. Leur métissage les sauvait du poids de la censure et de la tradition. Les acteurs, à la base venus du cirque, se virent peu à peu remplacés par des chanteurs puis des danseurs avec l’apparition des techniques de playback. Cette spécialité de Bombay s’imposa autour de 1935. De cette époque datent les filmi, ces chansons utilisées avant la sortie des films pour en assurer la promotion. Les chanteurs devinrent alors des stars. C’est d’ailleurs la période où s’impose le vedettariat avec Dilip Kumar, Ashok Kumar ou Raj Kapoor, premier d’une dynastie encore représentée avec Kareena.

Les soubresauts de l’Indépendance.

La partition correspond à un regroupement des élites cinématographiques musulmanes à Bombay.

Avec l’indépendance en 1947, la politique des Anglais de diviser pour mieux régner sépare en 2 entités éloignées de 1500km les majorités musulmanes. Se pose la question du Punjab très musulman mais aussi berceau de la foi Sikh. D’énormes mouvements de population entrainent morts, famines et drames. On parle de 10 à 15 Millions de déplacés. L’industrie du cinéma en bengali s’’écroule à Calcutta tout comme celle en Punjabi basée à Lahore. Bombay, promue capitale économique, va bénéficier de la division territoriale en attirant les artistes et s’affirmant comme la plateforme nationale.

Les poètes ourdous se reconvertissent alors en scénaristes ou écrivent les chansons et maintiennent la tradition littéraire. Mais l’austérité de la nouvelle nation ne profita pas au cinéma. Censure et promotion des spectacles classiques indiens tels la danse  et la musique allaient à l’encontre du cinéma, cet héritage anglo-saxon et colonial.

L’ère de la télévision et des héros ordinaires.

Dans les années 70/80, l’Inde connut une grande crise. Politiquement, la corruption, socialement le contrôle des naissances et le programme de nettoyage des bidonvilles mené par Sanjay Gandhi mais aussi les déplacements eurent des répercussions cinématographiques. Fini les films patriotiques ou les drames familiaux aux héros courageux. Les années 1980 s’ouvrirent sur plus de violence et traitèrent de sujets nouveaux comme la justice, l’insécurité, les problèmes d’emploi. La mode de l’homme ordinaire, devenu héros  malgré lui naquit avec le  « Western curry » Shalay.

Les années 1970/80 marquent aussi la naissance du cinéma masala . Le héros romantique des années 1950 y devient un travailleur plus énegique dont l’histoire va mélanger revanche, danse, chansons avec une pincée de populisme. Ce nouveau style profita d’un medium nouveau. En effet à la fin des années 1980, la télévision se diffusait. Avec elle une réorganisation de l’industrie cinématographique, faisant du petit écran l’accompagnateur, le promoteur, le diffuseur, du grand écran.

Les années 1990 et l’ouverture

Depuis les années 1990, le cinéma indien, comme l’ensemble du pays s’ouvre de plus en plus vers le reste du monde.

D’abord dans la réalisation puisque les conflits récurrents dans le Kashmir ont obligé les équipes à tourner les scènes de montagne non plus dans l’Himalaya mais en Suisse. Le Lauenensee  porte d’ailleurs le nom de Chopra, tant le réalisateur indien y a tourné.

La Suisse devenant trop chère, les réalisateurs et producteurs indiens explorent maintenant les montagnes slovaques et alentours. En montrant d’autres pays, le cinéma indien, s’ouvre à des audiences étrangères. Il touche également sa diaspora. Avec et pour ce public renouvelé, de nouvelles thématiques apparaissent. Des héros plus humains, moins clinquants. La célébration de l’identité culturelle ou des succès économiques remplacent peu à peu  le patriotisme ou l’exaltation de la vertu indienne.

Depuis 2000, la mode planétaire de Bollywood.

Depuis 2001 et le succès planétaire de Lagaan, le monde fait des œillades à Bollywood. Ce succès fut le premier à toucher des communautés de la diaspora ou d’autres anglophones non indiens. Suivi de succès Anglo indiens comme « joue-la comme Beckham » ou « Monsoon Wedding ».

Hollywood louche désormais sur le cinéma version indienne avec chants et danses comme véhicules d’émotion. En Inde, cela permet d’éviter les baisers ou autres scènes hautement censurables. L’industrie du disque a bien compris l’énorme intérêt de ce modèle. En Inde en effet 80% de la production musicale correspond à des musiques de films. Et celles-ci, tout comme les images ont évolué selon les modes de la musique et poésie traditionnelles ourdoues à des sons plus modernes et universels. Les 150 à 200 films annuels sortis des studios de Bollywood garantissent en effet un flot de « filmi » (musique de film) quasi continu.

Même les Français s’y mettent, à Cannes avec 1 film indien en compétition. Et une grande exposition à l’automne 2023 au Musée du Quai Branly.