Ooty

Je n’avais pas beaucoup envie de me rendre à Ooty. Certes le petit train me faisait rêver. Mais des amis indiens se plaignaient de ce qu’était devenue la charmante hill station de leur enfance. La petite bourgade de montagne s’était muée en une ville embouteillée.

Ooty, vue panoramique

Il n’est pourtant pas si simple de s’y rendre depuis Chennai. Il faut compter 10h de route ou 1h d’avion jusqu’à Coimbatore puis 3 voire 6 h de taxi. Pour la route, il convient de prendre en compte la terrifiante circulation et la lenteur du toy train qui fait des pointes à 20km/h.

Sur une carte, on comprend mieux que la majorité des visiteurs viennent du Kerala ou du Karnataka. Et l’on se rend compte que Ooty s’est affirmée au cours du temps comme la station d’été non seulement de Chennai mais aussi de Bengalore et surtout Mysore. Car si Shimla était la capitale d’été du Raj, Darjeeling celle de Calcutta, Ooty elle représentait la capitale d’été de la Présidence de Madras.

Alors contrairement à mes articles habituels où j’explique ce qu’il y a à voir et de quelle manière profiter au mieux de la destination, je vous raconte ici ce que j’ai aimé et ce que je n’ai pas aimé à Ooty. Cela vous aidera à planifier ou non un week end dans la « reine des collines ».

A voir à Ooty

Ooty est une station de montagne.

paysage Ooty

Même si les Nilgiris ne sont pas l’Himalaya, la ville se situe néanmoins à plus de 2000m d’altitude. On n’y va donc pas pour la haute montagne mais pour bénéficier de vues depuis les crêtes et surtout pour profiter de températures agréables. Ce qui l’été (avril, mai, juin) est une quasi nécessité venant du Tamil Nadu. Alors ou si vous voulez éprouver cette légère sensation de relative fraicheur nocturne, vous pouvez vous précipiter à Ooty.

Raj Bhavan Ooty

Dans la rubrique fraicheur j’avoue avoir vécu un coup de cœur pour l’église du Sacré Cœur aux vitraux édifiants de naïveté et de fraicheur pastorale.

vitrail Eglise d'Ooty

l’héritage britannique

Si vous aimez les jolis bâtiments coloniaux il en reste à Ooty. Vous pouvez les découvrir au moyen d’une visite guidée ou par vous-même. Attention néanmoins ça monte et descend partout et ce à plus de 2000m. Vous pouvez vous essouffler assez rapidement. De plus, la ville s’étale de plus en plus. Les gens ne sachant visiblement pas marcher, un flot continu de voitures bloque les routes. Des magasins et restaurants moyen de gamme bordent les artères principales. Dès que vous vous éloignez du centre, vous trouverez des cafés et hôtels plus chics, mais isolés, et donc inaccessibles sans véhicule…

Bibliothèque Ooty

Vous pouvez facilement découvrir de jolis bâtiments en partant de l’église st Etienne (Stephen’s Church) puis St Thomas et son cimetière filmée entre autres dans « La route des Indes » de David Lean en 1984.

Musée Ooty

Puis vous pouvez vous rendre vers la bibliothèque, et enfin le musée dit « maison de pierre ».  Ce serait la plus ancienne construction de la ville. Malheureusement, la majorité de ces édifices ne sont pas accessibles au touriste lambda. Si vous ne connaissez personne vous ne pourrez pas entrer dans le select Club Ootacamund, ni au Fernhill, le palace du coin. Mais vous pouvez toujours déjeuner (en réservant néanmoins) au Earl’s secret.

salon hôtel Earl's Secret

Vous pourrez graisser la patte pour rentrer dans la bibliothèque des Nilgiris. Sur la colline juste en face se situe le joli tribunal.

Ooty bâtiment administratif

les plantations de thé

Plantation de thé

Toutes ne sont pas bondées. Et une fois dépassés les loueurs de haillons qui vous photographient grimés en ramasseuse/r de thé, vous pourrez peut-être marcher. L’odeur des feuilles peut sembler âcre mais le vert en est saisissant. C’est l’occasion de belles photos. Attention aux sangsues. Si comme moi vous avez tendance à vivre une histoire unilatérale avec ces horribles bestioles, un conseil. Une fois leur pénible besogne accomplie, les bestioles gorgées de votre sang ne sont pas trop difficiles à éradiquer. En revanche il vous faudra atténuer la douleur une fois que leur produit anesthésiant se sera dissous. Pas d’hésitation, inondez votre plaie de sel, c’est assez efficace et facile à trouver.

le Jardin botanique de Ooty

 Ce grand parc paysager typique de la présence anglaise mène jusqu’au Raj Bhavan. Si vous vous éloignez un peu des grandes allées surpeuplées, de jolis sentiers s’offrent à vous.

Ooty Jardin Botanique

-Les sites et brochures publicitaires conseillent des friandises sucrées et grasses. Mais la seule vraie joie alimentaire des Nilgiris ce sont les délicieux légumes cultivés localement. Il est d’ailleurs rigolo de voir les touristes revenir avec leurs bottes de carottes. Les carottes sont en effet ce que les tomates sont à Marmande ou le melon à Cavaillon. De fait les légumes sont authentiquement délicieux. Ne vous privez donc pas. C’est suffisamment rare en Inde.

Jardin Botanique Ooty

A éviter

Penser qu’Ooty est le paradis des marcheurs

Nous sommes partis dans ce « paradis pour marcheur »et sommes revenus dépités. Car la marche échappe totalement aux Indiens. La moyenne de ceux qui en ont les moyens ne bouge surtout pas d’un véhicule. Les rares randonneurs ne s’aventurent pas sans accompagnateur. Les véhicules envahissent le moindre recoin. Ce qui rend la découverte des sentiers et de la montagne sauvage impossible.

Dans la ville même, le nombre de voitures est démentiel et le croisement central de Ooty, Charring cross ne fait pas que copier la fontaine devant la gare londonienne.

Charing Cross Ooty

Les rumeurs urbaines (ou montagnardes)

En outre, des légendes infondées circulent. Si vous émettez l’envie saugrenue de marcher seul en montagne, on vous objectera que la montagne est dangereuse. Vous risqueriez de vous faire attaquer par les guépards et les cheetah, les jaguars et toutes sorte de bêtes charmantes mais en fait éteintes en Inde. Quant aux bisons qui, parait-il, attendent le chaland, je voudrais bien savoir quel animal serait assez fou pour paitre au milieu des véhicules. Même les lapins et les rats se sauvent en courant. Le seul vrai risque vient des chauffards et des gaz d’échappements.

embouteillage sur la montagne de Doddabetta

Doddabetta Peak

Ce sommet est soi-disant un must see. Or, on ne peut pas monter à pied au pic. Si vous vous faites déposer non loin vous aurez à emprunter un bus d’état ou une jeep privée et onéreuse, attendre le remplissage et vous insérer dans les bouchons. Les Indiens se rendent tous en procession au même endroit. Une fois parvenu péniblement au sommet, votre véhicule vous éjectera dans un marché. Loin de la bonne odeur des cimes vous humerez les odeurs de graillon et de pois chiches avant d’émerger transpirant au pied de l’observatoire pris d’assaut par des hordes de touristes. Voyons le bon côté, la classe moyenne explose et avec elle le besoin et l’envie de vacances et de voir la même chose que les copains. Du coup tout le monde part en procession vers les mêmes sites surexploités au niveau touristique.

le bus pour Doddabetta

 Je passe ici sous silence le fait que minorité visible, nous autres blancs sommes quand même plus exotiques en photos que le spectacle des sommets. Bref l’expérience peut vite virer au cauchemar pour occidental amoureux des montagnes.

Doddabetta

-Dans le même ordre d’idées, le lac correspond plus à notre vision d’une décharge qu’à un lieu de loisir idéal. Ce malgré l’interdiction officielle de plastiques dans les Nilgiris. En dehors de décorer les routes de panneaux on ne voit pas bien à quoi correspond cette interdiction malheureusement.

-Le chocolat,

Cela a beau être THE attraction ici, vous êtes français. Sur ce point en particulier comme sur le fromage ou le vin nous sommes en droit de nous montrer chauvins. Si vous aimez le sucre, le sucre et le sucre vous pouvez donc goûter au « chocolat » local…

Bref vous l’aurez compris je n’ai pas aimé Ooty au mois de mai.

Shimla

Petit village de montagne, Shimla devint capitale d’été du Raj en 1846. Soucieux d’éviter les étés torrides de Calcutta, les Britanniques transformèrent le village d’altitude en une ville royale. Au passage, ils repoussèrent les autochtones sur les basses pentes. Ils installèrent leurs résidences et administrations sur la crête à 2200m d’altitude. Face à un panorama à couper le souffle, ils étendirent la ville sur les 7 collines avoisinantes. Un des habitants célèbres a d’ailleurs beaucoup écrit. Même si Rudyard Kipling reste coincé dans sa posture coloniale, il y décrit la société britannique et le cadre avec beaucoup de précision.

Shimla resta capitale d’été après 1931 quand le Raj transféra sa capitale à Delhi. Après l’indépendance, la ville devint capitale de l’Himachal Pradesh et temporairement du Punjab nouvellement crée après la partition de l’Inde et du Pakistan.

Cette capitale d’un des 13 états montagneux de l’Union regroupe un peu plus de 200 000hab aujourd’hui. Elle a conservé son charme montagnard ainsi qu’un magnifique patrimoine colonial. Les 2 villes sectorisées par les Anglais restent divisées. La ville haute concentre les jolis magasins et hôtels et jouit de vues magnifiques. En revanche, la ville basse représente le cœur commerçant et industrieux.

La bourgade construite en crête reste donc une ville double, étagée et hiérarchisée. La population autochtone a du se réinventer sur les pentes encombrées de la montagne. Dans la ville basse se pressent les locaux, alors que les touristes déambulent dans la ville haute.

La ville basse

Quand on arrive dans la jolie gare de Shimla, on est pris d’un côté par la vue spectaculaire sur les montagnes. De l’autre un gros embouteillage de taxis attend le dernier petit train en provenance de Kalka ou de Delhi.

C’est que Shimla, à plus de 2000m d’altitude, est un une capitale d’état un peu enclavée. Si vous n’avez pas déjà réservé votre carrosse mieux vaut prendre votre mal en patience. En fait, si vous n’êtes pas trop chargés vous pouvez remonter la cuvette dans laquelle se blottit la gare. Au débouché de ce cul de sac, la circulation se disperse un tantinet et il s’avère plus simple de prendre une voiture ou de marcher. Le long de la route très encombrée, une jolie promenade en balcon relie le centre-ville.

On y longe la ville basse à l’abri des voitures. La vue sur les montagnes avoisinantes est magnifique. On en oublie presque que la ville basse bruyante se développe de l’autre côté de la route très passagère. Parallèle à celle-ci, le marché bas accueille les locaux. Cette longue rue quasi piétonnière porte le nom de Lower Bazar.

Le Lower Bazar

Ce « marché du bas » court sur une rue en contre bas de la ville avec des boutiques regroupées par spécialités. Ce sont d’abord des chaussures, puis des fournitures scolaires, et, plus amusant, des diplômes. Leur succèdent les vêtements, des bijoux puis la nourriture.

La longue rue monte progressivement jusqu’ au Upper bazaar ou Mall rd. A l’époque du Raj, les locaux chassés de leurs habitations sur la crête se trouvèrent relégués au bas de la montagne. Pour se faire, les Anglais n’hésitèrent pas à incendier les vieilles maisons de bois. Une fois la population autochtone chassée sur les pentes, les colons dotèrent le Lower bazar d’un tunnel. Les porteurs purent alors transborder leurs lourds chargements de l’autre côté de la montagne sans déranger les gentlemen qui profitaient de l’air des cimes.

Entre le lower bazar et Mall Road se trouvent des escaliers très pentus. il s’agit de Middle Bazar, tout petit mais assez typique avec notamment ses coiffeurs, tailleurs. Il relie en fait les deux parties de la ville. Celles-ci ont gardé une ambiance et une fréquentation différente.

La ville haute de Shimla

La ville haute s’étend sur 9 km le long de 7 collines. Son centre s’articule autour de Mall Road et du Ridge. Ces deux avenues piétonnières accueillent les plus jolis magasins. Les touristes, y côtoient les étrangers et la bonne bourgeoisie locale. Au croisement des 2 avenues de parade, de belles constructions de pierre, dont le Town hall, l’église du Christ. Elles marquent le centre de cette petite ville promue capitale d’été de l’empire indien (le Raj). Christ Church revêt, comme souvent en Inde, l’aspect d’une église anglaise avec clocher carré comme celui de Ste Margareth à Westminster.

A l’époque du Raj, la bonne société y imitait la vie de la cour à Londres. C’est ce qui explique la profusion de grandes demeures de pierre, d’édifices coloniaux imposants. Les demeures des grands personnages de l’époque abritent aujourd’hui des musées et administrations. Mais dans l’ensemble ils ont été bien conservés ou bien restaurés.

Un cadre idyllique

Ces beaux bâtiments coloniaux confèrent un charme certain à cette ville située dans un cadre idyllique. Au point culminant de la ville,un temple à Hanuman s’atteint par une petite route. Rouge et rutilant, il offre un panorama sur les montagnes alentours saisissant. On peut y accéder à pied en partant de Christ Church. Il faut compter 30mn d’une montée facile sans charme mais avec une superbe récompense à l’arrivée. Les groupes s’y rendent à partir de 9h30, heure d’ouverture de la télécabine. Mais vous pouvez assister à des offices si vous êtes plus matinaux et prêts à monter à pied ou en voiture, Depuis Christ Church on peut également partir en direction du typique Lakkar Bazaar .

On peut marcher beaucoup si on le souhaite dans cette jolie ville pour relier le Ridge au Palais du vice-roi ou au musée. Les grands hôtels sont situés en périphérie et il semble que les tour opérateurs y parquent les touristes étrangers. C’est dommage car la vieille ville vaut le coup de s’y promener. Elle abonde en jolis cafés et petits restaurant mais aussi en hôtels. Le Clarks emblématique est à ce jour en restauration. il fut le point de départ de la fortune de M Oberoi, le papa de la chaine hôtelière. Il vaudra le coup une fois restauré de par son emplacement et la beauté du cadre architectural.

Une belle promenade coloniale dans Shimla

La partie haute n’est pas accessible pour les voitures. De grands parkings retiennent les véhicules et permettent aux deux grandes avenues le Mall et le Ridge de rester piétonniers. C’est un vrai bonheur de la parcourir tout en contemplant les paysages de montagnes. Vous n’êtes pas obligés de recourir aux services d’un guide local.

A Scandal point juste derrière le Town hall une pancarte indique le début de la promenade historique. Des panneaux la ponctuent.Celle-ci commence sur le Ridge avec la super vue, Christ Church puis l’hôtel de ville, Scandal point où le roi local aurait convolé avec la fille du vice-roi britannique au grand dam de la bonne société anglaise. Ce bon article vous permet également de découvrir la ville à votre rythme.

De là, on continue vers la poste, le palais Bantony aménagé en Musée. Dans une jolie maison coloniale typique de Shimla des photographies parlent de temps révolus. Peu après, on croise le grand bâtiment de la compagnie des chemins de fer, puis le musée régional et l’énorme Gorton Castle. Enfin, après le Raj et l’hôtel Oberoi, se dessine l’ancien palais du Vice-Roi transformé en Institut d’Etudes supérieures. Cette construction éclectique rappelant un chateau écossais se situe dans un superbe parc. 

 A pied, il faut compter 2h pour cette belle promenade. Tout est écrit et signalé. Et l’on se régale de vues magnifiques sur les Monts shivalik avec des sommets enneigés à 6000m.

Pour les marcheurs On peut tenter les balades plus lointaines Elyseum Hill, Paba et Kamiana.