Cochin

Cochin vit depuis des siècles dans le parfum des épices. Comptoir portugais dès le XVIe siècle, puis ville hollandaise avant d’être anglaise, la plus grande ville du Kerala avec son demi-million d’habitants, se compose de quartiers très différents. Monde ancien et moderne s’y côtoient.  Dès l’aéroport, alimenté à l’énergie solaire, la modernité de Cochin s’affiche.  La ville est en effet la capitale économique de cet Etat étonnamment riche pour l’Inde. Pour autant, les touristes se concentrent essentiellement dans le quartier ancien, dit Fort Cochin. Ceux-ci sont, contrairement au reste de l’Inde, en grande partie occidentaux. Ils arpentent les rues piétonnes bordées de maisons coloniales et de jolies boutiques.

Le quartier historique de Cochin s’articule autour du Fort, du Palais hollandais et de la synagogue Pardesi. Cette semaine, je vous emmène à la découverte de ces deux magnifiques monuments.

Le Palais de Mattancherry, ou Palais hollandais

Le Palais hollandais, construit pour la famille royale de Cochin, abrite le plus bel ensemble de fresques du Kerala. Bâti par les Portugais en 1557, le Palais Mattancherry fut rénové par les Hollandais en 1663. On peut maintenant y prendre des photos.

Le palais aux magnifiques boiseries se compose de deux étages. Dans les premières pièces, de fantastiques fresques mettent en scène des thèmes inspirés des épopées indiennes Ramayana et Mahabharata . Elles représentent aussi les images des dieux hindous et notamment de Krishna. Puis, une succession de salles évoque la vie des dynasties locales. Étonnement pour l’Inde, le Palais offre un bel exemple de muséographie.

A la fin du périple, d’autres peintures murales illustrent le poème épique Kumarasambhavam de Kalidasa. Un petit temple dédié à la divinité Palayannur Bhagwati se situe dans la cour centrale du palais.

Des vêtements de cérémonie utilisés par la royauté, des turbans, des armes de l’époque, des palanquins, des pièces de monnaie, des timbres et des dessins donnent un aperçu du mode de vie des familles royales dans le Sud de l’Inde. Ce palais est un must pour la qualité des fresques et des charpentes.

Tous les jours de la semaine de 10 h 00 à 17 h 00, excepté le vendredi. 

Jew Town

Si la tradition chrétienne est restée particulièrement forte au Kerala, Cochin s’enorgueillit, ou plutôt s’enorgueillissait, d’une petite communauté juive, réfugiée ici probablement lors de la destruction du temple en 70. La plus vieille synagogue d’Inde est une petite merveille Les six autres synagogues de la ville ne sont pas visitables et à peine reconnaissables dans les rues commerçantes de cette bruissante cité. Même s’il ne reste plus qu’une maigrelette famille juive, le temple bien entretenu, attire de nombreux visiteurs.

En fait, Le quartier juif de Cochin correspond essentiellement à une jolie rue commerçante, parallèle au Palais. Les magasins y sont aujourd’hui tenus par des musulmans. Les touristes fourmillent dans ce petit bout de rue extrêmement commerçant. On y vend de tout et les jolis cafés attirent les occidentaux. C’est aussi dans ce quartier que vous trouverez des magasin d’antiquités. Au fond de l’impasse, close par la tour de l’Horloge, se trouve la synagogue Pardesi, édifiée en 1568 et agrandie en 1760.  A droite du cul de sac, le temple hindou qui jouxte le Palais est pratiquement rénové. Sur la gauche s’ouvre la synagogue.

La synagogue Pardesi

Paradesi signifie « étranger » dans de nombreuses langues indiennes. Le terme fait allusion aux Juifs blancs, les premiers colons de Cochin, un mélange de Juifs de Cranganore (au Nord de Cochin, aujourd’hui Kodungallur), du Moyen-Orient et d’Europe. En 1524, ceux-ci trouvèrent un bienfaiteur en la personne du Raja de Cochin. Ce seigneur leur donna  en effet la terre sur laquelle ils bâtirent leur lieu de culte en 1568. Il leur fournit même le bois de construction. Cette synagogue contribua fortement à asseoir la présence juive au Kerala.

L’entrée de la synagogue s’effectue par un vestibule. Il donne sur un petit musée consacré à l’histoire de la communauté et de son temple. On accède alors à une courette sur laquelle s’ouvre la salle de prière. On y entre pieds nus, Inde oblige. Elle est remarquable pour ses énormes lustres belges du XXe siècle mais surtout pour son extraordinaire pavement. Les centaines de carreaux chinois de faïence bleue, rapportés de Canton au XVIIIe siècles sont tous uniques et peints à la main.

Au centre, se détache la chaire. Au fond de la salle, l’arche renfermant les rouleaux de la Torah, deux couronnes d’or présentées à la communauté juive et les plaques de cuivre du IVe siècle. Enfin, au mur, une charte gravée en mayalam décrit les privilèges octroyés à la communauté juive. Le texte est écrit en kannadiyezhuthu, écriture spéculaire ou en miroir.

tous les jours, de 10/12h, et de 15  à 17 heures, sauf les vendredis, samedis et jours de fêtes juives.10rp se déchausser, se couvrir les jambes et les épaules.

Le quartier musulman

Traditionnellement plus pauvre, et plus populaire ce quartier est lui aussi en voie de réhabilitation. Les ordures commencent à être ramassées (c’est un frémissement), les maisons en ruine à être rénovées, en tous cas pour le plus belles. Les échoppes traditionnelles sont peu à peu repeintes. Dans ce quartier, on peut manger de la nourriture typique de Cochin. On y teste les parathas au bœuf impensables dans le reste de l’Inde, les Milk shakes à l’avocat ou les puttu. Il s’agit de roulés de farine de riz et coco traditionnels au petit dejeuner.

Synagogue de Cochin

Trivandrum

A Trivandrum, hors du grand temple d’or et du Palais royal, évoqués la semaine dernière, s’étend une ville fort agréable quoiqu’injustement méconnue. Après avoir visité le Palais et admiré la Gopuram de loin, je vous propose cette semaine de découvrir les beautés cachées de la vraie capitale du Kerala. Je parle de vraie capitale car ce Trivandrum bis se propose d’explorer la capitale administrative et politique du Kerala. Cochin, plus grande et mieux reliée, joue, elle, le rôle de capitale économique.

le Napier Museum, belle construction indo sarracénique avec des relants Arts and Crafts

Le quartier du marché Cherai

Avec ses grands trottoirs ombragés, ses larges avenues, Trivandrum est une ville où il fait bon…marcher ! C’est suffisamment rare en Inde pour être souligné. Le côté provincial et la petite taille font que malgré les embouteillages on n’a pas l’impression d’être pris dans le vacarme habituel aux grosses cités indiennes.

Alors, on quitte le quartier du fort et du temple avec son flot de pèlerins, de marchands de tout et n’importe quoi pour se diriger vers la zone du marché Chelai. A priori le plus ancien du Kerala. Il s’agit d’un dédale de ruelles à l’abri de la circulation automobile. On y trouve toute sorte d’objets du quotidien, nappes criardes, bassines, plats, poubelles et chiens errants en prime. De petites cantines proposent les spécialités locales puttu (rouleau de farine de riz et coco), kadala (purée épaisse et noire de pois chiches) et hakka appam (beignets de bananes) idiyappam (sortes de nouilles très fines de farine de riz).

Balade Le long de MG Road

Comme toute ville indienne, Trivandrum est traversée par une grande artère MG (pour Mahatma Gandhi) Road bordée de tous les grands bâtiments ici administratifs davantage que commerciaux. En quittant le temple d’or, ou en venant du marché, on rejoint le terminus de nombreux bus en face du fort.

En remontant vers le nord, on atteint le temple Pazhavangaadi Sree Maha Ganapathy. On peut le visiter. Même s’il semble relativement récent, son activité y est fort authentique, colorée et réjouissante. Si l’on tourne le dos au temple vers la droite on gagne la gare victorienne.

Plus loin sur la MG road, commence le quartier administratif. On monte vers le Nord et le quartier de Palayam. On peut prendre un transport jusqu’au secrétariat général du Kerala, un bâtiment colonial entouré d’un jardin et d’une grille ouvragée. Un peu plus au nord, se dresse la cathédrale syrienne orthodoxe St Georges, jolie oasis de paix dans une rue à la circulation dense.

L’Université du Kerala à Trivandrum

En face de l’église, commencent les magnifiques constructions de l’Université du Kerala. On distingue d’abord Les façades donnant sur MG Road, un peu décaties au-fond d’un grand jardin. Il vaut la peine de les contourner pour admirer tout ce quartier universitaire en voie de restauration. Leur architecture éclectique en est variée et intéressante. On peut emprunter la rue dr NS Warrior ce qui permet de parvenir au siège du Parti communiste (AKG centre).

En effet, le Kerala est depuis l’indépendance un état resté fidèle au communisme. Avec celui-ci s’affirme l’importance de l’éducation et des droits de la femme. On atteint alors un quartier colonial avec de bien élégants édifices. Les bâtiments de l’université, la bibliothèque avec de jolis cafés comme le bookmark se succèdent le long de grandes allées arborées en cercle.

On revient alors sur la grande avenue Mahathma Gandhi pour déboucher au marché Connemara. Le nom se réfère au gouverneur Lord Connemara qui a donné son nom à la bibliothèque du musée de Chennai.. Moins connu que le marché  Cherai dans le centre-ville, il regroupe sous une halle britannique une série d’étals.

Bâtiments coloniaux

 Juste en face, une mosquée et un temple à Ganapathi illustrent une nouvelle fois le climat de tolérance affiché dans la région.  On traverse pour atteindre la Cathédrale St Joseph, une belle tarte à la crème néogothique sur un modèle britannique à clocher carré. Elle fait face au stade des Nairs cette caste de guerrier particulière au Kerala.

On dépasse l’Assemblée législative, édifice ancien et moderne puis le stade pour tourner à droite. C’est un quartier sympa avec grandes avenus aérées, de grands trottoirs ombragés. On atteint alors un immense et magnifique parc en face du musée d’Histoire. Dans ce grand parc, on peut se diriger vers le zoo ou vers la fantastique construction indo-saracénique du Musée Napier, une vraie réussite architecturale. Malgré la structure de brique, elle arbore des détails Queen Anne (les oriels) et des toits que William Morris et le mouvement anglais Arts and Crafts n’auraient pas rejetés.

Juste de l’autre côté du parc son aborde la colline surmontée par, Kanakakunnu Palace. Au Sommet d’un joli parc public ce palais offre une atmosphère royal, celle de la dynastie Travancore . Des spectacles ont lieu ans ce jardin.

Cette promenade n’est qu’un exemple pour passer une jolie journée dans la bien agréable capitale du Kerala. De nombreux temples et jolis lieux ponctuent la ville et offrent de belles découvertes alors n’hésitez pas et venez visiter cette ville si méconnue.

Thiruvananthapuram

Thiruvananthapuram fait peur en raison de son nom imprononçable quoique simplifié par les Anglais en Trivandrum. La ville (puram) du seigneur (Thiru) Ananda échappe souvent aux circuits touristiques. C’est dommage, car c’est une superbe découverte.

 Dommage également que la ville soit peu documentée sur les sites touristiques en français voire en anglais. De ce fait il n’est pas évident de construire un itinéraire ni de savoir que visiter. Encore une fois c’est dommage parce qu’il y a beaucoup plus à voir que le grand temple inaccessible aux non hindous et la plage voisine de Kovalam. Alors par où commencer ?

Le quartier du fort et du grand temple

Evidemment ce quartier ancien et grouillant est le must-see à Thiruvananthapuram. On descend du bus, du tuk tuk ou du taxi près de la porte du fort et de là on suit la foule jusqu’à la Gopuram de ce fantastique temple interdit aux étrangers.

Cette tour d’accès est monochrome contrairement à ses consœurs tamoules. On peut l’approcher, gravir les escaliers, en admirer la toiture et… rebrousser chemin. Car comme pratiquement tous les temples du sud consacrés à Vishnu, le Sree Padmanabhaswamy n’est pas accessible aux non-hindous. Et un clergé pas toujours charmant se précipite pour vous rappeler à l’ordre si vous tentez de vous glisser dans la foule ou de dégainer votre appareil photo. Même si les Indiens eux ne se privent pas de se faire tirer le portrait devant la divine Gopuram.

Je trouve d’ailleurs surprenant que tous les guides, blogs, sites touristiques sur Thiruvananthapuram parlent du temple alors que les étrangers ne peuvent y accéder. En revanche, silence sur le reste de la ville comme si elle ne comptait pas.

Joyau du sud

Il est vrai que le temple d’or est l’un des plus sacré du pays. Surtout de nombreuses légendes le créditent d’une richesse phénoménale. L’Etat fédéral est venu enquêter sur des dysfonctionnements dans sa gestion en 2011 et y a découvert un trésor estimé entre 14 et 15 Milliards d’euros dans 5 des 8 chambres des pièces souterraines du temple. Il se constitue d’or, argent diamants, bijoux, statues, monnaies et autres donations des fidèles accumulées au cours des siècles.  Les autres chambres n’ont pas été ouvertes, la sculpture de cobra qui monte la garde portant malheur selon les fidèles. Elles sont néanmoins sous haute garde. Une bataille féroce s’est engagée entre les différents propriétaires  potentiels des lieux.

Outre le côté trésor de conte de fée, l’architecture du temple est remarquable. On peut noter (de l’extérieur) une fusion d’éléments keralais et dravidiens. Les boiseries merveilleusement travaillées sont typiques de l’artisanat du Kerala. Au contraire, le travail stuqué de la Gopuram s’apparente à ce que l’on trouve dans les différents états voisins du sud de l’Inde.

Le Palais Royal de Thiruvananthapuram, un joyau dans le joyau

Le long du temple les bâtiments aux belles toitures de bois ouvragé mènent au Palais royal. Kuthira Maliga C’est l’occasion d’admirer l’habileté, très reconnue dans toute l’Inde, des charpentiers du Kerala. De manière unique dans le pays, la région jouit d’une double mousson et donc d’une abondance de bois comme le tek.

Construit en 1840 par le Maharaja Swathi Thirunal Rama Varma, le palais reflète l’architecture typique de la région avec ses toits débordants à forte pente, ses vérandas à colonnes et ses cours intérieures. Le travail d’ébénisterie y est remarquable. Les 122 sculptures et gravures équines lui ont donné le nom de demeure des 122 chevaux.  C’est aujourd’hui un Musée et il offre une idée de la dynastie royale Travancore qui habite non loin de là le palais Kowdiar construit pour la sœur du roi. Car dans cette famille matrilinéaire, c’est la sœur qui règne…

On peut passer du temps au palais pas forcément au musée qui exhibe des photographies passées de tableaux de qualité variées. Celles fanées de la ville à l’époque de l’indépendance ne sont pas inintéressantes en ce qu’elles montrent une bourgade perdue dans les forêts. Les photocopies colorisées de divinités ne me paraissent en revanche pas incontournables. Vous l’aurez compris, je conseille vivement la visite du palais, moins celle du musée dans le palais.

Le Palais est lui passionnant, on déambule dans une vingtaine de pièces des 80 constituant les habitations royales de la dynastie Travancore.

Entre l’extérieur du temple avec son réservoir et le Palais, il y a de quoi occuper une grosse demi-journée. Mais il vous reste beaucoup encore à explorer à Trivandrum. Alors retrouvons nous la semaine prochaine !

Dakshina Chitra

Dakshina Chitra  (vision du sud) au sud de Chennai regroupe 19 maisons représentant des communautés différentes des 5 états du Sud de l’Inde. Un audio guide est en préparation auquel j’ai eu la chance de contribuer. Dans ce musée architectural, chaque maison a été patiemment démontée et reconstruite pour montrer la technicité et la diversité de l’artisanat et des coutumes.

mur esterieur maison Andhra Pradesh

Le projet d’une vie

Ce musée à ciel ouvert est le projet d’une vie pour le docteur Deborah Thiagarajan. Cette anthropologue américaine s’est installée dans les années 1970 à Chennai. Elle s’y est mariée, y a eu et y a élevé ses filles. L’une de celles-ci, l’aide aujourd’hui sur ce projet extraordinaire crée en 1984 et en évolution permanente. L’idée à l’époque de la fondation était de faire connaitre et apprécier aux Indiens sortant du colonialisme leurs propres traditions.

maison du Cherrinad avec son original toit de tuiles multicouches

Il s’est agi de trouver un terrain dans un lieu alors quasi désertique. Puis a suivi l’aménagement en un vaste musée ethnologique, un peu à la manière des villages reconstruits roumains ou suédois. Celui de Bucarest est un peu un modèle. Reconstituer les maisons permet d’étudier et de tenter de conserver des savoir-faire en perdition aujourd’hui.

Le site comprend désormais 19 maisons, la dernière a été inaugurée en octobre 2024. Il s’agit de la maison de Coorg une communauté isolée de chasseurs dans la jungle du Karnataka. On y présente l’architecture typique du lieu mais aussi les coutumes, les vêtements et les spécificités d’une communauté de 200 000 hab.

travail du bois

C’est d’ailleurs le propos que de mettre en avant des communautés spécifiques. Leurs caractéristiques sont explorées de manière à montrer l’extraordinaire foisonnement culturel de l’Inde du sud

L’Inde du sud en miniature.

Car Dakshina Chitra propose un condensé des 5 états qui constituent le sud de l’Inde. Le plan du site correspond d’ailleurs à la carte de ces régions. En tournant le dos à l’entrée, on rejoint ainsi à main gauche au-delà des jeux pour enfants, les maisons du Kerala. La remarquable liberté religieuse de cet état luxuriant y apparait. On passe ainsi de la maison chrétienne syrienne à celle du marchand musulman. La société y est tolérante mais aussi matrilinéaire. Elle accorde une vraie place à la femme. Le système pluvieux explique quant à lui les toits très pentus.

Proche de l’entrée, après le marché artisanal, se présentent les maisons à toiture travaillée du le Tamil Nadu. A commencer par une superbe maison du Chettinad articulée autour de sa cour intérieure bordée de magnifiques piliers de bois sculptés. Cette communauté de financiers s’est enrichie à l’étranger pendant la période du Raj. Malgré son apparence patriarcale, elle laissait un grand pouvoir de décision aux femmes.

cour maison du Chettinad

Plus à droite, face au restaurant, qui offre des plats typiques, des maisons de pierre d’Andhra Pradesh rappellent la pauvreté en bois de cette zone désertique.

Sur la droite se trouvent les maisons du Karnataka dont celle de Coorg déjà évoquée ainsi qu’un espace d’exposition.

maison du tisserand Andhra

Dakshina Chitra, un lieu de culture vivante.

Dakshina Chitra se veut une vitrine vivante de la culture dravidienne. Outre les reconstitutions, le site accueille donc des artisans. Ainsi, la maison du tisserand dans le Tamil Nadu permet elle à une famille financée par l’entreprise textile Sundari Silk de montrer son travail et surtout sa manière de procéder.

Outre l’artisanat permanent, le site accueille de nombreux événements. Chaque grande fête est l’occasion d’une célébration. Pour Onam, une fête de moisson typique du Kerala, des troupes de danseurs se succèdent alors que le restaurant propose des plats adaptés. Pongal est également l’occasion de manifestations culturelles, expositions, chants danses, films documentaires.

De nombreuses publications ciblées sont disponibles à la boutique du musée qui malgré son aspect chaotique recèle un certain nombre de trésors. Enfin les différentes maisons abritent des collections permanentes comme l’écriture à la maison du Chettinad) ou temporaires, comme à la maison du Kerala.

maison Andhra Pradesh

Bref un lieu ou venir et revenir pour mieux comprendre le sud de l’Inde.

intérieur maison du tisserand

 

Bibliothèques de Madras

Aujourd’hui je vous emmène découvrir des Bibliothèques de Madras plus ou moins connues . Pour l’ensemble on peut y accéder entre 10 et 17h les jours de semaine. Certaines valent le coup pour l’édifice, d’autres incitent davantage à l’étude ou la lecture.

la Société littéraire, l’une des plus belles Bibliothèques de Madras

J’avais déjà accordé un article à ce lieu extraordinaire niché dans l’ancien campus st Georges . Extraordinaire non pour les livres, en piteux état, mais pour les bâtiments indo-sarracéniques.

Le bâtiment a besoin de restauration mais l’architecture n’en reste pas moins exemplaire de la présence britannique à Chennai. Elle allie la modernité (pour l’époque) des rayonnages coulissants métalliques à l’aspect traditionnel des jalis et autres fioritures néo mogholes affectionnées par les colons. A remarquer également quelques œuvres hors du commun comme l’original de Ponyam Selvan par Kalki Cette bibliothèque est tenue par un trio d’amateurs zélés et adorables.

Bibliothèque Rameswari

Peut être la plus méconnue des Bibliothèques de Madras, la Bibliothèque Rameswari se niche dans l’ arrière-cour d’une école sur Ednam road. Elle se situe derrière la Shakuntala Art Gallery,. Elle se cache à l’écart de la circulation importante de ce quartier central de la ville (quasi en face du Kauvery Hospital, face à l’échangeur de TTK road).

C’est une bibliothèque ancienne et privée malgré tout mieux dotée que la Madras Literary Society et surtout beaucoup mieux entretenue. Elle se dresse à l’emplacement de la maison familiale du défunt mécène et homme de loi Rameswari qui a tant fait pour sa ville.

Les salles donnant sur rue servent souvent pour des expositions, voire des ventes. Mais il ne faut pas hésiter à prendre la petite entrée de droite pour demander ce que le centre culturel propose. Derrière la grande salle de conférences on découvre une jolie cour couverte comme les maisons typiques en recèlent puis, à l’étage, une fantastique bibliothèque.

Avec un peu de chance, le bibliothécaire vous emmènera de pièces en pièces découvrir les trésors cachés. On commence par des ouvrages vieux ou désuets de géopolitique ou d’économie dans la salle de lecture. En traversant un petit toit, on atteint la salle de fumigation, lieu étonnant ou sont traités les livres, atteints de maladies rares et certainement transmissibles. Ce couloir débouche sur une ravissante salle ancienne. L’on pénètre vraiment le saint des saints avec des ouvrages rares et/ ou en restauration. Feuilles anciennes ou volumes au cuir dépecé jouxtent des meubles et gravures d’un époque révolue.

La Connemara Library

Ce grand bâtiment se dresse dans l enceinte du musée du Gouvernement.  Réputée pour la beauté des lieux elle risque décevoir le visiteur en quête de beaux lieux.

En fait, la bibliothèque Connemara se situait à l’origine dans l’un de plus beaux bâtiments indo-sarracénique du complexe. C’est ce bâtiment qu’évoquent les articles en ligne et non l’actuelle bibliothèque sans grâce. La construction des années 1970 attire aujourd’hui les étudiants et chercheurs et nullement les visiteurs plus intéressés, à juste titre, par la collection de bronzes cholas ou par le théâtre. Néanmoins une passerelle intérieure relie ce bâtiment moderne à l’une des merveilles du Raj, la fameuse bibliothèque Connemara, la vraie. Celle-ci n’est malheureusement pas accessible au public.

Faiblement ventilée, l’aile moderne, ouverte au public et répartie sur plusieurs étages n’est pas de plus attirantes pour l’européen en mal de lieu exotique. Juste derrière un magasin vend des livres en tamoul. Il ne peut pas rentrer en compétition avec la merveilleuse librairie Higginbothams.

Anna centenary Library

Nous voici maintenant devant la grande des bibliothèque de Madras.

Cette fois, il s’agit d’une bibliothèque moderne puisque son inauguration remonte à 2010. Des conférences y ont lieu régulièrement. L’immense et confortable auditorium accueille des évènements que l’on peut suivre sur le site. Contrairement aux deux premières, c’est une bibliothèque publique donc mieux dotée et financée. Elle compte 9 étages, un auditorium. Une grosse section de livres en anglais.  Pour le reste tout est écrit en tamoul et il n’est pas forcément aisé de naviguer dans cet énorme vaisseau silencieux et impeccable. Un vrai oasis de quiétude propice à l’étude dans cette ville bruyante et poussiéreuse.

Park Town

Park Town s’adresse aux nostalgiques d’une Chennai coloniale. L’histoire anglaise de Madras commence à Fort St George en 1639. A la forteresse s’ajoute rapidement Georgetown.

 Qualifiée à l’époque de ville noire, elle suit un plan en damier.  Cette « ville ouverte » accueille les locaux mais aussi tous les étrangers. On la connait aujourd’hui sous le nom de « Parry’s Corner ». Rapidement la colonie britannique s’étend et va conquérir les territoires arborés à l’ouest de la forteresse, bientôt transformés en parcs bordés d’édifices administratifs.

Une colline disparue

Cette zone, située à l’ouest du fort, se caractérise à l’époque du Raj par une colline boisée, Hog Hill. Les Britanniques conserveront d’ailleurs des espaces verts dans ce nouveau quartier. Deux grands parcs, Town Park et People’s Park en assurent la fraicheur.

Ce quartier jouxte le village de Periamet. Ce nom signifie village douane, autrement dit le lieu où l’on taxait les marchandises qui rentraient en ville. Le long du chemin qui menait à Poonamallee aujourd’hui connue sous le nom de EVR salai, on arrasa la colline pour y construire Memorial hall. Cet édifice en piteux état affecte une forme de temple grec. Juché sur un podium, il commémore la fin de la révolte des Cipayes et le passage de la Compagnie des Indes orientales à la couronne britannique.

Dans sa continuité (en fait en traversant la rue), on tombe sur le grand bâtiment des chemins de fer du sud de 1922. Celui-ci adopte un style néo dravidien intéressant. Pour une fois, le Raj semble faire cas des spécificités architecturales régionales. La grande bâtisse de granit ne comporte pas d’arches. Elle s’inspire en revanche des temples du Tamil Nadu. On ne peut en dire autant de la gare centrale.

 construite sur le modèle néogothique des grandes gares londoniennes. On retrouve les lignes victoriennes dans cet édifice de 1896 surmonté d’une grande tour emblématique en 1959. La gare s’ouvrait sur le grand hôpital.

Chennai a semble-t-il toujours été la capitale médicale du sud de l’Inde. Sur le côté, aujourd’hui occupé par une grande dalle moderne très plaisante, se trouvait à l’époque coloniale le grand marché Moore dont les bâtiments indo-sarracéniques ont malheureusement disparu.

Que reste-t-il de Park Town

Aujourd’hui le terme de Park Town désigne un quartier. A l’époque du Raj il s’agissait d’un parc dans une zone planifiée. En revanche, le Victoria Public Hall conçu pour être un lieu de spectacle subit une rénovation complète. Les fenêtres en arc de cercle d’inspiration néo-romane contrastent quelques peu avec la tour aux accents gothique mais l’ensemble est plutôt convaincant. Elle fait face au Ramaswamy Choultry .

 Celui-c- hébergeait les voyageurs Hindous. En revanche, le Siddique Sarai blanc accueillait lui les musulmans. Des boutiquiers occupent aujourd’hui la dentelle Moghole. Le reste du terre-plein autrefois occupé par le parc de la ville qui a donné son nom au quartier a malheureusement disparu, avalé par la pression immobilière.

Néanmoins, l’énorme Ripon building bâtiment de la corporation de Chennai (mairie) subsiste et projette son énorme vaisseau blanc illuminé le soir. Cette tarte à la crème s’inspire lointainement de la magnifique basilique de Palladio. Mais surdimensionnée, elle n’en a ni la grâce ni l’élégance. Devant, l’on distingue des statues, presque à l’angle de la rue Sydenham, dont celle noire du gouverneur qui a donné son nom à l’édifice. Les illuminations nocturnes donnent cependant une certaine grandeur au lieu.

People’s Park

Ce quartier s’est construit à l’emplacement d’une forteresse avancée à l’extérieur de fort st George. Comme George Town, il a été planifié. Ces projets d’urbanisme sont aujourd’hui perdus dans la ville moderne. La circulation, les destructions et reconstructions sauvages font en effet oublier la volonté d’une avenue de parade à la sortie de la gare bordée de rues plus commerçantes.

Ainsi le long de Sydenham, se succèdent les façades de maisons de la fin du XIXème siècle ornées de balcons, de toits terrasses (dit toit Madras même s’il s’agit essentiellement de toits terrasses ornés de balustrade). Le People’s Park a été englouti lors de la construction du stade Nehru. Il en reste une maigre bande de jardin. Même le zoo a été repoussé hors des limites de la ville pour faire face à la folie constructive. Les musulmans se rassemblent autour de la petite mosquée et ont fait de cette zone le cœur palpitant du commerce du cuir à Chennai.

Mumbai

Je vous propose aujourd’hui de partir à la découverte de Mumbai. Cette énorme cité de plus de 20 Millions d’habitants ne se découvre pas en un seul jour. Aussi je consacrerai une petite série avec des choix tout personnels pour vous faciliter la visite.

Victoria Station Mumbai

Si vous n’avez qu’un seul jour à consacrer à Mumbai, autant ne pas manquer l’essentiel. Le centre historique abonde en lieux remarquables, pour la plupart inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco. Cette zone, au sud de l’immense mégalopole, s’explore à pied ce qui vous évitera de chercher un taxi et rester des heures coincées dans l’effroyable circulation.

 Gateway of India et Taj

Gateway of India

Le bâtiment victorien de l’hôtel Taj et l’arche symbolisent une occupation coloniale révolue. La grosse porte commémorait à l’origine l’arrivée, en 1911, du prince de Galles, futur George V. Elle correspond aujourd’hui pour les Indiens au départ définitif des colons, en 1948. La foule est compacte le soir dans l’enclos qui entoure le monument, joyeux pastiche de l’arc de triomphe, d’une maison mauresque et d’influences Gujarati. De la pointe, on aperçoit la façade néogothique de l’ancien Yacht club établi en 1846, construit 35 plus tard et aujourd’hui occupé par le centre de recherche atomique. Bien que gâchée par la tour disgracieuse qui sert d’annexe à l’hôtel Taj, la meilleure vue est celle du ferry que l’on peut emprunter pour se rendre à Elephanta Island.

L'Hotel Taj

Oval Maidan

bâtimentsnéogothiques sur l'oval Maidan

La promenade architecturale sur l’Oval Maidan est un vrai musée à ciel ouvert. Construit sur une partie du Champ de Mars ou Esplanade, il reliait la zone du fort à celle de Church Gate et de la mer.

On découvre sur le côté Est de cette immense terre-plein herbeux, assez similaire au circus maximus de Rome, une succession extraordinaire de bâtiments néo gothiques. La Cour de Justice et l’Université illustrent l’inventivité et la diversité victorienne. Il y a là un véritable précis à faire frémir de joie John Ruskin, grand amateur des pierres de Venise.  Des escaliers en colimaçon tirés tout droit du Bovolo voisinent avec des vitraux typiques des cours de justice londoniennes ou des grandes universités britanniques. Au centre le grand clocher, Rajabaj Tower n’est pas sans évoquer les campaniles italiens ou les clochers gothiques de nos contrées.. L’homogénéité de ces bâtiments publics victoriens explique leur classement au patrimoine mondial de l’Unesco.

bâtiment de l'université de Mumbai, parfaite réplique du Bovolo de Venise
beffroi de l'Université de mumbai

L’autre côté du Maidan est occupé par des immeubles art déco. J’en reparlerai prochainement. Non loin du Maidan, la fontaine de Flore marque l’emplacement des murailles britanniques.

Horniman Circle

Horniman Circle Mumbai décrit un crescent très britannique

Du Maidan, on rejoint facilement à pied le port avec son impressionnante façade. On passe alors devant l’Eglise st Andrew et l’Oriental Building. On atteint enfin le superbe Horniman Circle. Celui-ci nous ramène dans le Londres de la fin du XIXème siècle. Avec ses immeubles qui suivent la courbe de la place arrondie, elle rappelle les plus belles créations urbanistiques anglaises.

société asiatique, facade néoclassique. Mumbai

La référence anglaise est poussée au bout avec le jardin central fermé d’une grille. Cette jolie place donne d’un coté sur l’ancien hôtel de ville, aujourd’hui société asiatique de Mumbai conçue à la base comme société littéraire. Ce bâtiment néo-classique juché sur un socle d’une trentaine de marches, affecte le style d’un temple grec. De l’autre côté de la place, la Cathédrale Saint Thomas propose, elle, un bel exemple néogothique. Elle s’inspire assez nettement de Ste Margaret, dans le quartier de Westminster à Londres.

Victoria terminus

Gare de Mumbai intérieur

Dans la même veine victorienne, la gare Chhatrapati Shivaji Maharaj Terminus, ex Victoria Terminus est un véritable chef d’œuvre. Ce bâtiment à l’ossature métallique ressemble à une cathédrale gothique. Le contraste avec la cohue le long des quais de cette énorme bâtiment industriel est saisissant. Le pastiche extérieur est incroyable. L’architecte n’a pas hésité à mêler la façade de Sainte Marie des fleurs à Florence à celle de Saint Pancras à Londres. Un joyeux mélange des genres rendu splendide grâce aux illuminations vespérales.

victoria terminus, le soir, Mumbai

Gangtok

Gangtok est la capitale actuelle du Sikkim.

Bâtie a flanc de montagne, elle serpente le long d’une grande rue qui s’élève de 1200 à 1700m. La circulation intense en bloque l’accès. Fait rare en Inde, un trottoir souvent couvert permet néanmoins de marcher. On peut alterner quelques découvertes à pied mais le gros de la visite se fait en voiture même pour les bons marcheurs en raison des distances et des montées.

La capitale du un ancien royaume

Capitale tardive du Royaume du Sikkim, Gangtok a conservé quelques bâtiments administratifs mais surtout de nombreux témoignages bouddhistes.

L’Institut tibétain permet de mieux comprendre la culture tibétaine et bouddhique. Le musée expose une collection donnée par la famille royale. On y découvre livres anciens, manuscrits sur le bouddhisme Mahayana, objets sacrés, superbes thangkas et statues. Réputé dans le monde entier, il est spécialisé dans les recherches sur les traditions, la langue et la religion tibétaine. Tout à côté, le Do Druk Chorten, permet de se familiariser avec chorten, moulins et drapeaux de prières.

Juste avant le musée et le monastère, le rope way ou télécabine relie au sommet de la ville. Des cabines, la vue sur la vallée et la ville est impressionnante.

– Le monastère d’Enchey, récent mais typique domine le Nord de Gangtok sur le chemin de Tsomgo Lake. Bien que datant de 1910 à la place d’un ermitage, il a beaucoup de charme et jouit d’une vue magnifique sur la chaine du Khangchendzonga.

Il fait bon marcher dans cette ville de montagne au charme résolument himalayen.

Devenue capitale du 22e état indien

Quelques temples hindouistes rappellent néanmoins que nous sommes bien en Inde. Ainsi le temple d’Hanuman, un peu à l’extérieur de la ville sur la route de Tsomgo lake. Référence à l’épisode où le dieu singe partit sur le monde Kailash, il est devenu un lieu de pèlerinage hindouiste très important.

Le temple de Ganesh (tok), plus petit, adopte un toit en pagode. Des drapeaux de prières le décorent.

Comme tout ville indienne, Gangtok témoigne d’une animation importante. Les vendeurs d’artisanat alternent avec les petits restaurants et cafés. A l’époque coloniale, des Népalais avaient été forcés de venir travailler dans les plantations. On les voit côtoyer des Limboos et Lepchas autochtones sur MG Margh, certainement l’une des avenues piétonnières les plus agréables d’Inde. Contrairement à beaucoup de villes du sous-continent Gangtok jouit d’une vraie zone commerciale piétonne. Des cafés ravissants et des restaurants excellents voisinent avec des établissements plus modestes et traditionnels. Les piétons arborent des tenues très occidentales, jeans et gilets noirs, loin des saris colorés du sud. Un vrai dépaysement que ces rues piétonnes, coquettes et peu bruyantes.

Peu bruyant également et peu odorant, mais coloré et bien fourni, le marché Lal propose ses étals dans un immeubles de 4 étages sans prétention. Bien qu’intérieur et sur plusieurs niveaux il n’ a rien d’un supermarché. Les stands proposent churpi (fromage de yak traditionnel impossible à mâcher), légumes appétissants, fruits issus de l’agriculture locale bio, épices ou accessoires de cuisine dans un cadre qui rappelle un peu les marchés de Trajan à Rome.

étal de churpi, le fromage de yak immangeable quand il est dur

Gangtok la porte de l’est du Sikkim

A la sortie de Gangtok, la nature prend le dessus avec de belles cascades et un panorama à couper le souffle. On l’admire notamment depuis Tashi Point. Puis la route continue vers Tsomgo lake et Nathu la Pass, à la frontière du Tibet. Elle suit l’antique chemin de la soie entre Chine et Inde, entre Lhassa et le Bengale. On y vendait du thé chinois, de la soie, des bijoux indiens et des chevaux. Au début du XXème siècle 80% du commerce entre les deux géants s’y faisait encore. Tout cessa avec les conflits frontaliers après 1962.

La route en lacets monte au travers des camps militaires et des petits villages himalayens. Car la frontière seulement réouverte depuis 2006 est extrêmement militarisée. Les paysages y sont extraordinaires. On passe des bambous, habitat privilégié du panda roux aux rhododendrons. Ils entourent le lac Tsomgo autour duquel on peut marcher et duquel part une télécabine. On triche ici pour atteindre 4000m sans grand effort. Au-delà de cette altitude, les paysages deviennent austères et dénués de végétation. Si le permis pour se rendre au lac est facile à obtenir, les étrangers ne peuvent pas dépasser ce point et se contentent de regarder la frontière à une dizaine de km et plus de 1000m d’altitude.

Kalimpong

 Considéré comme district depuis 2017 seulement, Kalimpong a vu sa population et son activité décupler ces dernières années. Constructions et jolis petits cafés se multiplient.

A l’origine, il s’agissait d’un petit village de montagne sur la route du Tibet. Dépendant du Royaume du Bhoutan, il fut vite annexé par les Britanniques en 1865. Dans la foulée, des missionnaires écossais s’y installèrent.

On retrouve le même schéma à Kurseong nichée dans ses collines à thé parsemées de pins. Mais si Kurseong se destinait à la culture du thé, Kalimpong s’orientait davantage vers les fleurs. On trouve encore de nombreuses pépinières d’orchidées, glaïeuls, roses ou gerberas autour de la ville.

Située à plus de 1500m de hauteur, les deux stations attiraient les planteurs britanniques fatigués par l’écrasante chaleur des plaines du sud et de la capitale du Raj, Calcutta. Aujourd’hui à nouveau, les deux villes attirent la bonne bourgeoisie citadine en quête d’un peu d’air frais.

L’empreinte britannique

On retrouve la trace britannique notamment dans les églises protestantes et dans de nombreuses villas.

 Les hauteurs de Kalimpong correspondent encore aux jolis quartiers prisés par les colons. Certains d’entre eux habitaient Morgan’s House ou Crookety dans les années 1930. Ces deux belles villas art déco se sont transformées en hôtels boutique et sont inaccessibles au pékin moyen. Morgan’s House jouxte d’ailleurs le golf, autre héritage anglais. Malgré la profusion de ces cottages au charme suranné, voire d’hôtels remontant à l’empire tels le Sterling ou plus chic, le Elgin, il s’avère difficile voire impossible d’accompagner le thé local d’un scone, quel dommage !

Plus intéressant encore, de l’autre côté de la ville, dr Graham’s home est devenu une école. On peut se faire déposer tout en haut de Deolo Hill. Un parc très agréable occupe le sommet de la colline. On y trouve également un Science center, un jardin botanique et un technology center. De là, on peut redescendre à travers les constructions de ce phalanstère construit par le missionnaire écossais et philanthrope. Le dr Graham, voulait donner la chance d’une éducation aux enfants métis Les nombreux bâtiments qui entourent l’église commémorant sa femme Katherine, servent aujourd’hui d’école huppée.

L’église McFarlane atteste également du culte protestant et domine de sa haute silhouette néogothique bleue le centre de la ville.

Kalimpong, ville de montagne

C’est que le centre de Kalimpong lui reste attaché à ses racines tibéto népalaises. Le marché montre que Kalimpong fait maintenant partie du Bengale et de l’Inde. L’atmosphère agitée, la saleté, la circulation nous rappellent que nous avons laissé derrière nous la frontière du Sikkim (à Rangpo).

Néanmoins, les pulls et bonnet mais aussi les stands de fromage parlent d’une région montagneuse.  On trouve des drapeaux de prière, des thangka (image) bouddhistes, les objets en argent, des couteaux Lepcha, des Khukaris (armes) népalais, des masques bouddhistes tibétains  Le churpi s’y vend. Il s’agit d’un fromage de yak tellement dur qu’il convient de le garder des heures dans la bouche pour espérer l’amollir. Mais on trouve également une curieuse spécialité locale bienvenue pour les Français le fromage de Kalimpong Introduit par un jésuite suisse. On peut notamment l’acheter chez Larks et dans les magasins alentours. L’épicier, un monsieur âgé, pèse avec émotion le fromage introduit dans la boutique par son grand-père.

Une forte empreinte tibétaine

L’héritage tibéto-népalais survit néanmoins essentiellement dans les lieux religieux. Kalimpong compte certes des églises, des temples hindouistes (comme le spectaculaire Mangal Dham). Cependant, les monastères bouddhistes restent les plus spectaculaires dans la ville. On peut attaquer par le Monastère Durpin dan un très beau paysage dominant le Kanchenjunga On y voit des petits bonzes sortant de cours pour admirer les matchs de foot. Ces mêmes petits bonzes se pressent sur les bancs du grand monastère école Sakya.

Non loin de celui-ci, le magnifique Tharpa Choeling Monastery se visite. Outre les cellules, le temple lui-même et la fantastique statue de bouddha domine la ville, un petit musée expose des objets du quotidien, des photographies et autres thangka. Le Thongsa est le plus ancien de la région il date de 1692.

On peut compléter la visite de cette agréable ville en passant devant la maison du Bhoutan, résidence temporaire de la reine du Bhoutan en Inde et se rendre dans la Neora Valley Park pour des marches magnifiques.

Enfin peu connu mais tout à fait extraordinaire le Musée Lepcha, se niche derrière un petit chorten. Il y a ici une sorte de concurrence entre le temple aménagé en musée (du chorten) relativement documenté et le petit musée privé au 1er étage d’une maison en mauvais état et offrant des dortoirs aux enfants lepchas pauvres. Le propriétaire des lieux, fils du fondateur, vous explique la vision de son père et leur lutte pour préserver un témoignage de ce peuple autochtone au Sikkim mais trop méconnu.

Darjeeling

Le nom de Darjeeling fait rêver. On imagine des champs et des tasses de thé, un train pittoresque, des paysages de sommets enneigés. Puis on commence à se documenter et l’on ressort perplexe. Car Darjeeling est aujourd’hui la base arrière de Calcutta. La foule et la saleté semblent s’y bousculer.

Les commentaires abondent sur l’incurie et les effroyables embouteillages. Cependant depuis 2022, la ville a changé vers le mieux ! Des arrêtés municipaux interdisent les ordures et le ramassage s’organise peu à peu. Reste le problème des encombrements difficiles à résoudre dans une ville qui qui s’étire sur une crête et le long d’une route  étroite et pentue. Pourtant, Darjeeling a gardé un charme anglais tout en restant résolument népalaise.

Capitale du thé anglais

Le petit hameau se transforma en une sorte de ville frontière dans les années 1840. Il accueillait alors des européens en rupture de ban, des indépendantistes tibétains. S’y trouvaient également des Chinois, des espions, et des Anglais prêts à y introduire des graines chinoises de thé. Le Docteur Campbell fut le premier à les planter dans son jardin. Depuis, près de 90 plantations se disputent l’appellation Darjeeling. Certaines se visitent avec plus ou moins d’intérêt. On peut également déguster les prestigieuses feuilles récoltées à différents stades de l’année dans les nombreux et ravissantes maisons de thé.

Autre témoignage colonial, les nombreux cottages et l’architecture religieuse, comme l’église st André. Des banques, bâtiments administratifs, horloge rappellent aussi la présence britannique. Tout comme les pâtisseries emblématiques Glennary and Kernegen. Le thé s’y sert dans de ravissantes théières en argent sans lait (réservé à l’Assam) et s’y accompagne de petits gâteaux et sandwichs.

Le joli jardin botannique Lloyds constitue  une autre délicieuse pause anglaise . La grande serre et les parterres ne sont pas sans rappeler Kew Garden en petit.

Encore un souvenir anglais bien plaisant et peu commun dans une ville indienne. Darjeeling est une ville où il fait bon marcher. Des trottoirs bordent les rues et une magnifique promenade depuis la place principale le Chowrasta et le plateau piétonnier autour de la rue Nehru offre des vues fantastiques sur le Kandchenzunga, troisième sommet du monde et plus haut sommet indien. Cela vaut le coup d’y aller tôt le matin (vers 6h) pour contempler les locaux en plein jogging, exercices physiques voire séance de zumba face aux cimes enneigées.

Darjeeling,Ville himalayenne

Malgré l’héritage anglais, Darjeeling reste à 80% népalaise. On y mange des momos le long des marchés animés qui bordent les rues en pente raide. Les magasins vendent bottes et gros pulls et les riverains arborent des bonnets tricotés. Bâtie le long de crêtes entre 1 800 et 2 800 mètres d’altitude, la ville est toute en étages. Ses ruelles se rejoignent par des escaliers abrupts. Dans la ville basse, non loin de la gare, le marché Chau est énorme mais calme, comparé aux autres villes indiennes.

La ville haute reste plus élégante. Elle était jadis réservée aux plus belles demeures britanniques. On y trouve les jolies promenades et les bons hôtels. Au sommet de la ville, le Mahakal temple présente un étonnant syncrétisme de traditions bouddhistes et hindoues avec ses drapeaux tibétains ornant le sanctuaire de Shiva.

Le centre de réfugiés tibétains, crée en 1959 permet à de nombreux Tibétains exilés de vivre dans le respect de leur culture. On y trouve aujourd’hui une école, un hôpital, un gompa. Un centre commercialise des objets d’artisanat. Pour compléter ce panorama tibétain, le musée se trouve derrière l’Horloge, dans le centre de la ville.

Une manière amusante de se rendre à Darjeeling ou d’en partir consiste à emprunter le petit train de l’Himalaya instauré en 1878 par les ingénieurs britanniques. Néanmoins il roule à 12km et il vous faudra plus de 7h pour relier Siliguri à 70km. Mieux vaut opter pour un petit trajet dans ce pittoresque train (Ghoom ou Kurseong) et en admirer les prouesses constructives.

Que voir quand on ne vient que quelques jours

Les touristes se rendent en procession au lever du soleil sur Tiger Hill. Les locaux eux profitent des vues du Chowrasta. Les tours opérateurs et taxis offrent des boucles avec plusieurs arrêts. Celle proposant le magnifique lever de soleil sur Tiger Hill (à 14km de Darjeeling et 2600m d’altitude) opère entre 3.30 et 6,30 du matin et vous permet de vous rendre au monastère de Ghoom où se situe également la fameuse boucle ferroviaire destinée à affronter un dénivelé impressionnant.

Si vous préférez échapper à ces circuits quasi obligatoires et à la foule et que marcher ne vous rebute pas, en dehors de Tiger Hill et Ghoom, tout peut se faire à pied. A commencer par le fantastique zoo et l’institut de l’Himalaya. Ce dernier retrace les différentes expéditions himalayennes au travers de coupures de presse, photos, échantillons et matériel utilisé au fil des années pour les ascensions, et notamment les expéditions vers l’Everest. Fondé en 1954, un an après la première ascension de l’Everest, il évoque les hommes et leurs aventures. Cours d’escalade, films et démonstrations complètent le parcours.

Le zoo lui vise à protéger et assurer la survie des espèces. On y voit donc uniquement des espèces himalayennes et elles sont particulièrement bien nourries et ont un pelage magnifique. Parmi les stars, le panda roux et l’ours de l’Himalaya mais aussi le tigre du Bengale.