Chypre

Chypre, l’île d’Aphrodite a tout misé ou pratiquement sur le tourisme pour se redresser après l’invasion de 1974 puis la grosse crise financière de 2008. Pourtant, si elle promeut ses plages et son soleil, les merveilles archéologiques et byzantines, mais aussi gothiques et romaines sont bien souvent oubliées par les héliophiles venus en masse de Russie ou du Royaume-Uni.

L’ile à la croisée de trois continents a forgé son identité au gré des vagues migratoires successives. Elle offre donc des vestiges riches et divers.

http://www.kypros.org/Chypre/chypre_hist.htm

Une histoire tri-millénaire

  • Dès le dixième millénaire avant notre ère, des hommes se sont installés puis ont apportés vraisemblablement du croissant fertile la néolithisation.
  • Vers le cinquième millénaire se met en place la civilisation chalcolithique, fondée sur exploitation du cuivre qui donnera son nom à l’ile (Kyprum). On voit apparaître rites de fertilité et idoles. Les échanges s’accélèrent à l’âge du Bronze au troisième millénaire.
  • C’est au bronze tardif que se développe véritablement l’ile. Avec les colons minoens puis mycéniens, la culture grecque se diffuse tant dans les cultes religieux que dans l’écriture, la langue et l’art. Au tournant du premier millénaire, des cités royaumes se mettent en place qui survivront aux migrations des Assyriens, des Phéniciens, des Perses puis des macédoniens.

Des vagues d’invasion successives

  • Au 4e siècle avt JC, La dynastie des Ptolémées achève hellénisation alors que politiquement Rome puis Byzance (après le 4e siècle ap JC) dominent. C’est à cette période que Chypre devient chrétienne. Évangélisée très précocement, elle rentre dans la sphère de l’église d’Antioche et y restera jusqu’au 12e siècle lors de la conquête franque.
  • En pleine croisade, Chypre passe entre les mains d’une dynastie française qui régnera pendant trois siècles (1191-1489)
  • Venise domine un siècle (1489-1571) l’ile qui tombe entre les mains des Ottomans
  • Il faut attendre 1878 pour que l’étau turc se dessère et que les Anglais annexent l’île à laquelle ils n’accorderont l’indépendance qu’en 1960.

Depuis, Chypre a connu une partition traumatisante à la suite de l’invasion d’un tiers de son territoire par l’armée turque.

Elle a placée de grands espoirs en son adhésion à l’Europe en 2004 mais se sent aujourd’hui toujours menacée.

Lagoudera, la Chapelle Sixtine des Troodos

L’église de la Panayia Araka de Lagoudera est l’une des 10 églises chypriotes classées sur la liste de l’UNESCO.

Une église de campagne en forme de grange

Perdue dans la montagne, elle ressemble de l’extérieur à une grange avec son toit à double pente et une galerie à claire-voie.

une toiture double pour abriter des chutes de neige et de pluie mais aussi pour dissimuler le culte orthodoxe alors que l’île devient franque et latine

La petite église au plan cruciforme a été agrandie. Sa paroi ouest n’est pas décorée mais tout le reste du sanctuaire offre une remarquable homogénéité picturale.

En effet, les fresques du 12es présentent un des exemples les plus aboutis de l’époque des Comnènes. Une inscription au dessus de la porte Nord précise la date des peintures 1192 et le nom du donateur. L’artiste byzantin a donc peint ces fresques à un moment charnière de l’histoire chypriote, lorsque l’ile est passée entre les mains franques.

Pour des détails historiques, vous pouvez lire : http://visitesfabienne.org/wordpress/chypre-lile-daphrodite/

Un ensemble de fresques exceptionnel

Quelques scènes sont d’une qualité exceptionnelle. Ainsi, le Pantocrator de la coupole domine de manière majestueuse le petit sanctuaire. Sur le tambour se détache une hétimasie (trône vide dans l’attente du retour du Christ) ainsi que les apôtres. Sur le mur Sud, on voit la Vierge Arakas « du pois » qui a donné son nom à l’église. Vêtue de rouge, elle se tient debout devant le trône vide. Des anges l’entourent et portent les instruments de la passion.

La Vierge du Pois

Sur l’intrados du chœur, l’archange Gabriel de l’Annonciation est d’une légèreté et d’une élégance remarquables. Au dessus de la Vierge d’Arakas, une Dormition, classique représentation de l’Assomption de la Vierge, montre le Christ tenant dans ses bras l’âme maternelle figurée par un bébé.

L’Ange Gabriel, l’une des merveilles du style des Comnène

Sur la même paroi, la nativité conjugue sur la même scène la naissance du Christ, l’arrivée des rois mages . Au premier plan, Joseph se tient pensif et Salomé lave le nouveau-né.

Sur le mur Nord, l’Anastasie correspond à la descente aux enfers, le Christ rompt les serrures et emmène avec lui Adam et Eve. La scène très impressionnante est typique de l’iconographie byzantine ; tout comme l’est le baptème du Christ qui le montre totalement nu et immergé dans l’eau du Jourdain. La dernière représentation typique de la manière byzantine s’inspire des Evangiles Apocryphes, et plus précisément du Proto-évangile de Jacques et illustre la présentation de Marie au Temple. Marie, petite fille, est suivie par trois jeunes filles juives richement parées. Leurs vêtements et bijoux montrent l’influence  de la capitale des Comnène sur la peinture chypriote du 12e siècle.

l’Anastasie, version byzantine de la descente aux enfers

Comment s’y rendre ?

Depuis Limassol compter 1h30 de route, sur le chemin il est possible de s’arrêter à Pelendri pour y visiter l’église principale du village, la Katoliki connue pour ses icones ainsi que l’église de la Sainte Croix au remarquables fresques du 14es (époque des Paléologues) avec un cycle marial quasi complet.

Une journée à Paphos

Premier article d’une petite série pour découvrir Chypre… Je vous propose de commencer par la découverte de Paphos.

avec tous mes remerciements à MC Lefevre pour ses photos…

Pourquoi aller à Paphos ?

Mosaique dite du Labyrinthe dans la maison de Thesee

Paphos, fondée au 4e s avant notre ère devint capitale de Chypre à l’époque Ptolémaique en raison de sa proximité avec Alexandrie. Elle succédait ainsi à Palaipaphos dont les vestiges remontent à l’âge du bronze (12e s avant notre ère). La ville connut son apogée à l’époque romaine avant d’être ravagée par des tremblements de terre. Elle se dégrada peu à peu jusqu’à l’arrivée des britanniques en 1878. Appréciant le climat, ils assainirent la région et la redynamisèrent pour en faire une station balnéaire florissante.

Qu’y a-t-il à voir?

  • Les merveilles gréco-romaines de Néa-Paphos, avec notamment les fantastiques mosaïques des villas du 2e (villa de Dionysos) et 4e siècles de notre ère (villa de Thesée, certainement résidence officielle du proconsul romain).
  • Je vous recommande d’ailleurs les sites très bien faits mis en place par le gouvernement chypriote dans le cadre de la politique européenne (programme Eden).
  • https://www.visitcyprus.com/index.php/fr/discovercyprus/culture-religion/sites-monuments/item/239-parc-archeologique-de-kato-pafos
  • L’étonnante nécropole, d’époque ptolémaique. Chaque tombeau dit royal, en raison de sa taille, s’ouvre par un dromos sur un atrium avec un puit pour la purification des morts et des loculi pour les sacorphages.
  • L’immense basilique Paléochrétienne Chrysopolitissa avec le pilier contre lequel fut flagellé Saint Paul. Une seconde basilique plus petite fut reconstruite puis une petite église byzantine après les raids arabes des 7e, 8e et 9e siècles
  • Le site antique de Palaipaphos, méconnu et isolé, remonte au 12es avant JC. Les quelques rares vestiges romains y montrent la continuité du culte d’Aphrodite. Le lieu fut abandonné au 4es avec la christiannisation de l’ile et réutilisé par les Lusignan. Cette famille franque régnante à Chypre du 12e au 15e siècles en fit un centre sucrier. Le manoir montre des vestiges de cette longue présence humaine.
  • Le musée des Icônes de Yeroskipou, tout neuf et totalement inconnu, montre une belle collection d’icones, parmi lesquels la plus vieille image sainte de Chypre « Ayia Marina » et un curieux St Jean l’Egyptien à l’oreille percée
La basilique Chrysopolitissa

Combien de temps prévoir ?

  • Il faut compter 2 bonnes heures pour apprécier pleinement les mosaïques des villas du Parc archéologique, davantage pour découvrir l’ensemble du site, les restes d’Odéon, l’Asklepion…
  • Et 1 bonne heure pour chacun des autres sites.