Little Bengal

Non loin de Mount Road, le centre de la Chennai moderne se situe un petit quartier surnommé Little Bengal. On y trouve des taka, monnaie du Bangladesh, du poisson de rivière coupé et cuisiné d’une manière inconnue au Tamil Nadu. Nous ne sommes pas à Calcutta mais à Mackay’s Garden et Greams Road.

La cuisine bengalie

Comme tous les Indiens, les Bengalis adorent manger. Néanmoins, leur nourriture, quoique quasi inconnue en France, n’a rien à voir avec l’image traditionnelle des plats indiens. L’alimentation bengalie tourne autour de poissons de cette région baignée par le delta du Gange. Elle s’assaisonne de graines de nigelle. Les graines de moutarde moulues avec des piments verts donnent à cette cuisine une saveur toute particulière. Dans la cuisine tamoule, la moutarde s’utilise beaucoup mais en graine et non moulue. Les plats typiques sont à la fois savoureux et incomparables. Ici une jolie lecture sur l’importance de la cuisine au Bengale.

Les Bengalis sont très attachés à leur culture pas seulement culinaire. Ils aiment leur langue et surtout la vie culturelle de Calcutta. La plupart du temps cinéma, théâtres et surtout joutes verbales, dont ils sont très friands, leur manquent au Tamil Nadu où les locaux vivent plus repliés sur la famille.

Les Bengalis de Chennai

Nombreux Bengalis se sont d’abord installés à Chennai en quête d’une meilleure situation matérielle. Intellectuels de renom, bijoutiers voire artisans sont venus chercher le confort financier du sud. Ainsi, les artisans bengalis se regroupent-ils autour de Snowcarpet, dans le quartier de Parry’s corner aussi surnommé Little North India.

Aujourd’hui cependant, la migration touche davantage la classe moyenne, qualifiée en informatique. Elle a largement investi le « IT corridor » (traditionnellement le long de OMR )au sud de Chennai. De ce fait, la communauté a essaimé dans la ville. Elle se retrouve dans des clubs comme l’association du Bengale (fondée en 1929), la SMCA, South Madras cultural association plus récente (1975) ou le DCPCA (Dakshin Chennai Prabasi cultural association). Elle fait corps au moment de célébrations privées comme les crémations mais aussi collectives comme Durga Pooja la grande fête bengalie.

A Chennai, ce grand festival se limite le plus souvent à des rencontres où l’on boit, mange et où l’on participe entre proches aux festivités de la Pooja. Les célébrations ont lieu au temple de Kali, lieu clé pour la diaspora bengalie à Chennai.

 A Calcutta, cette énorme fête s’accompagne de concours de statues et de pandals. Ces temples éphémères, construits de bambous et de tissus multicolores abritent la divinité. On les démantèle dès la fin de la Pooja. La compétition peut être féroce. La ville entière devient festive. A Chennai en revanche, les célébrations se limitent à quelques lieux.

Little Bengal, un quartier en phase de gentrification

Du coté de Mount road, sur Greams street, se situe un quartier surnommé Little Bengal. Ici les petites guignettes servent de la nourriture du Nord-ouest, du Bengale mais aussi de l’Assam et du Bengladesh.

Au-delà des échoppes alimentaires, se succèdent une multitude de chambres et petits appartements proposés à la location. L’on se rend vite compte que ces logements ont fait l’objet d’une réhabilitation récente. Le quartier vit une véritable mue. Les rares maisons anciennes qui subsistent sont surmontées de complexes ultra modernes. Les jardins Mackay Garden n’ont laissé leur nom qu’à un ensemble de bâtiments sans grâce.

Des agences de voyages le disputent aux petits restaurants. Elles proposent des vols à prix cassés pour le nord-est du pays. Beaucoup d’annonces sont d’ailleurs écrites en bengali.

Outre les boutiques alimentaires, les voyagistes et les marchands de sommeil, on compte un nombre impressionnant de pharmacies. Car cette communauté se regroupe par vagues autour des grands hôpitaux de la rue. En effet, Chennai s’est affirmée comme capitale médicale d’Inde et le quartier de Greams Road voit se concentrer toute la population du Nord-est en quête de traitement à Apollo Hospital. Le phénomène est tel que même les médecins et le personnel des hôpitaux de la rue parlent hindi et bengali.

De nombreux petits restaurants proposent des poissons et mets étrangers aux saveurs du sud de l’Inde. Ce sont pour la plupart des bouibouis mais la nourriture peut s’y révéler délicieuse.

Calcutta insolite

Si vous voulez découvrir un Calcutta plus insolite, après l’article de la semaine dernière, voici quelques chemins détournés. Avec deux remarques. Calcutta est une ville où l’on peut marcher. Outre les vrais grands trottoirs, on y trouve des espaces verts plaisants. Surtout, l’artisanat, étonnant, se double d’une gastronomie méconnue et savoureuse.

 Pour partir à l’aventure de ce Calcutta insolite, les taxis ne sont pas chers mais il faut négocier. Par ailleurs, le métro est très pratique.

Au sud, un Calcutta insolite

Au-delà des grandes rues commerçantes s’étendent des quartiers de marchés populaires. Mais aussi des zones résidentielles construites dans les années 1930 -40. Celles-ci regorgent de bâtiments art déco  malheureusement souvent en ruine.

Temple de Kali et quartier Kalighat

 Vers le sud, ce temple intéressant attire les fidèles de Kali la grande déesse de Calcutta. Un dédale de ruelles bordées d’étals de marchands de fleurs et d’articles religieux s’enroule autour du temple, depuis la maison de la mission de mère Teresa.

Le quartier de Kalighat est très agréable pour se loger, assez central et beaucoup moins bruyant que les zones plus centrales. Méconnu du grand tourisme, on y trouve beaucoup de cafés très sympas. Le joli parc, témoin de l’époque anglaise, exceptionnellement entretenu pour l’Inde, offre un lieu idéal pour marcher ou courir autour du lac Kalibari. Non loin de celui-ci, sur une rue tranquille,le Temple japonais Bouddhiste de Calcutta, Nipponzan Myohoji.

Birla Mandir

Ce temple tout récent, construit par la famille Birla, remonte à 1996. Consacré aux différents avatars de Vishnou, c’est une merveille de marbre blanc surmonté de Prangh d’inspiration khmère. La même famille d’industriels a financé le planétarium, ainsi que le musée de l’Industrie et de la technologie

Un peu au Nord de Espalanade

Non loin de Eden Parc, s’étend le parc du millénaire le long de la rivière Hoogli. Tout près de celui-ci, le Writer’s building accueillait les employés de l’administration britannique à l’époque coloniale.  C’est un colossal bâtiment de brique rouge au fronton palladien. Dans le même quartier, l’énorme mosquée de tipi Sultan remonte à 1842. Avec ses 16 dômes verts et ses 4 minarets elle a un aspect insolite dans le paysage urbain de Calcutta.

 De là, on peut rejoindre à pied un autre bâtiment colonial et néo-palladien, voire d’inspiration jeffersonienne pour le dôme, la Grande Poste. Dans l’autre direction, vers le Nord, on atteint une zone de marchés.

Dans ce quartier aux belles maisons décaties, se dressent encore quelques maisons à cours typiquement bengalies dont l’étonnante demeure Jorasanko Thakurbari Rabindranath Tagore. Le premier prix Nobel Indien y passa son enfance. Il s’agit d’une maison bengalie typique de l’élite cultivée de Calcutta. Ce véritable palais urbain abrite aujourd’hui une université accessible uniquement en semaine.

Toujours du côté de Bara Bazar le palais de marbre est une somptueuse demeure néoclassique du 19 e s transformée en musée. Les collections hétéroclites comportent un peu de tout et beaucoup de n’importe quoi. https://kolkatatourism.travel/marble-palace-mansion-kolkata

Encore plus au nord de ce Calcutta insolite

Le long de la rivière et près du Howra bridge , la misère apparait à tout endroit. C’est à ce niveau qu’habitent artisans et manœuvres spécialisés dans la fabrication d’effigies de dieux et déesses utilisés en procession lors des festivals religieux. Ceux de Durga et Kali en novembre sont particulièrement populaires à Calcutta. De cette zone artisanale et haute en couleurs et odeurs, on rejoint un énorme marché. En direction du Pont Howrah et vers le très populeux et impressionnant marché aux fleurs on est témoin de scènes de rue ahurissantes. Un laveur d’oreilles se partage le trottoir avec un tailleur de moustache alors que son voisin teint les cheveux en public.

En continuant encore davantage vers le nord le long de la Hoogli, le quartier se paupérise encore. On voit des troupeaux de chèvres paquer dans des monceaux de détritus, des enfants à moitié nus .

Temple Dakshineswar Kali

Au nord de la ville, ce temple très populaire s’atteint à l’extrémité de la ligne de métro. De nombreux festivals y prennent place. Le temple lui-même est typique de l’architecture bengalie avec des dômes presque byzantins et est considéré comme maison de la déesse Kali, révérée à Calcutta. Il se trouve sur les bords de la Hoogli. Bras du delta du Gange, la rivière reste sacrée et on y assiste à des scènes extraordinaires de baignade ou de lessive collectives.

Il existe deux quartiers chinois à Calcutta qui a été la ville la plus marquée par la présence de ses voisins. L’un d’entre eux accueillait les Chinois pauvres qui travaillaient en tant que tanneurs. Le quartier est d’une pauvreté affligeante. Mais de petits restaurants proposent une nourriture très honnête et il reste quelques échoppes extrême-orientales.