Madras

Madras est devenue Chennai en 1996 dans un grand mouvement national d’indianisation. A la même époque Mumbai a remplacé Bombay, Kolkota, Calcutta et, plus difficile, Trichy  Tiruchirappalli… L’idée gouvernementale consistait à supprimer les dénominations anglaises et revenir à des noms locaux voire originels.

A l’origine était Madras ?

Selon certains historiens, les villages de pêcheurs de Chenna-patnam au nord et de Madras-patnam au sud de fort St Georges pré existaient tous deux à l’arrivée des Britanniques. On peut donc légitimement se demander si Chennai est plus locale que Madras.

 Le nom du hameau Madras-patnam pourrait dériver de Mundir-raj or Mundiraj, issu d’une communauté Telougou et non Tamoule. Des historiens rattachent également le nom de Madras a une déformation du « madre de Dios » portugais, ou à une famille Madeiros tout aussi portugaise.

 Le nom de Chennai, lui, pourrait provenir du Temple Chennakesava Perumal construit en 1646. A moins qu’il ne dérive de Damarla Mudirasa Chennappa Nayakudu, père de Damarla Venkatapathy, dirigeant Nayak, Général dans l’armée de l’Empire Vijayanagara. Ce brave monsieur au charmant patronyme vendit la ville aux anglais en 1639.

Des traces humaines, remontant au paléolithique, auraient en fait été retrouvées dans le quartier d’Egmore.  Certains temples remontent à la période médiévale. Et, de fait, les villages aujourd’hui agglomérés, appartinrent aux royaumes Chola, puis Pandya, Pallava and Vijayanagara. Ceux-ci régnèrent avec des fortunes variées sur la région dans les seize premiers siècles de notre ère.

Au XVIe siècle, les Portugais implantent un comptoir dans Mylapore. Ils y construisent au moins 5 églises . Ils commémorèrent également l’héritage de l’apôtre Thomas sur les hauteurs dominant la ville en construisant une série d’ermitages.

Une histoire antérieure à la colonisation anglaise

Mais la première mention officielle de Madras apparait dans le contrat de vente du lopin de terre . La Compagnie des Indes orientales le signa le 14 août 1639. A l’époque, les grandes nations européennes se disputaient la côte de Coromandel. On trouvait au sud, à Tranquebar, les Danois, et les Français à Pondichéry. Les Hollandais eux s’étaient installés plus au Nord près du lac Pulicat. Quant aux Portugais, ils avaient déjà construit un port à Mylapore. Les Anglais prirent possession du village de Madras-Patnam. Ils en utilisèrent donc le nom pour leur petite colonie.

Bien que déjà existante et colonisée, la zone de l’actuelle Chennai fête paradoxalement, chaque année sa naissance anglaise, le 22 Aout 1639. Elle célèbre ainsi l’arrivée du Britannique Francis Day, séduit par la longue bande de plage. Il acheta au Nayak son lopin de terre. Puis, il installa son petit fort au nord de la rivière Coom, à quelques km au Nord du comptoir lusitanien. IL venait de fonder ce qui deviendrait le centre d’une incroyable réussite économique pour Les Anglais. Pourtant, le fondateur a quasi disparu des registres. Pas une rue ni même un café n’honorent sa mémoire.

La première ville anglaise s’abritait derrière les murailles bastionnées de fort st Georges, du nom du st patron de l’Angleterre. Rapidement, la forteresse devint exiguë. Une ville, dite noire, s’ouvrit au nord sous le nom de Georgetown, du nom cette fois de George IV issu de la dynastie des rois dits géorgiens. Cette ville au plan en damier typique des colonies de peuplement correspond aujourd’hui au quartier de Parry’s corner.

La fausse Fondation de Madras par les Anglais

Au XIXème siècle, la croissance de la ville imposa d’ouvrir de nouvelles avenues. Cette fois le centre se déplaça vers l’actuel quartier de Royapeta  et Anna Salai. La promenade ou North Beach road qui représentait l’avenue de parade de la première période de colonisation avec ses fastueuse façades indo-sarracéniques souffrit lorsque le chemin de fer obstrua le débouché direct sur la mer. En contrepartie, on construisit Marina Beach, le grand boulevard sud reliant le quartier anglais de Georgetown au quartier portugais et à la ville ancienne du côté de Mylapore. La promenade sud s’enorgueillit de beaux bâtiments administratifs et universitaires de Madras. Malgré la « tamoulisation » ou changement de nom de la ville et des rues, les grands bâtiments et surtout les universités de l’époque victorienne ont conservé leur dénomination Madras.

L’explosion démographique du XXe siècle explique le lotissement de nouveaux quartiers. T Nagar, Egmore, Adyar par exemple.  Après l’indépendance, Madras continua à être la capitale de la Présidence de Madras, constituée des grands états du Sud puis du Tamil Nadu. Puis, Chennai lui emboita le pas. La modification de nom ne changea pas le cœur, ni l’esprit de la ville. Constituée d‘une multitude de bourgades, elle est devenue la cinquième puissance du sous-continent indien.

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